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'EST particuliérement dans les Ouvrages de Confucius qu'il faut puifer les ximes du Gouvernement & de la Morale des Chinois: il est en même tems leur Philofophe & leur Législateur, & l'on ne peut à

* Les Ouvrages de Confucius ont été imprimés à Paris en 1687 en un feul Volume In-folio qui a pour titre: Confucius Sinarum Philofophus, five Scientia Sinenfis latinè expofita Studio & operâ Profperi Intorcetta, Chriftiani Herdtrich, Francifci Rougemont, Philippi Couplet, Patrum Societatis JESU, juffu Ludovici Ma

gni, eximio Miffionum Orientalium
& Litteraria Reipublica bono, è Bi-
bliotheca Regiâ in lucem prodits ad-
jecta eft Tabula Chronologica Sinica
Monarchia ab hujus exordio ad bac
ufque tempora. C'eft-à-dire, Confu-
cius Philofophe des Chinois, ou la
Science des Chinois expofée en latin
par les foins des Péres Profper Inter-
A

Utilité de la lec

ture des Ouvrages de Confucius.

la Chine parvenir à aucune dignité fans les avoir étudiés.

Lecture des On

utile pour

naturelles.

La lecture des Ouvrages de Confucius eft curieuvrages de Confu- fe, elle fait connoître l'Empire de la Chine; mais l'étude des Loix elle est encore plus (1) utile. On y voit des préceptes de vertu dont un Philofophe Chrétien s'aplaudiroit: ces préceptes fe trouvent confirmés par des exemples dont les Héros Grecs ou Romains n'ont point aproché. Un autre motif encore m'engage d'en faire l'extrait: les livres du Philofophe Chinois font voir ce que la nature feule est capable de faire, lorsqu'on écoute fes confeils. Ces fortes d'ouvrages font beaucoup mieux connoître les Loix naturelles, que ceux des Jurifconfultes modernes. Beaucoup ont traité des Loix civiles, en forte même qu'on peut dire qu'il y en a trop: quelquesuns, mais trop peu, ont traité du Droit naturel;

cetta,

Chriftian Herdtrich, François Rougemont & Philippe Couplet de la Compagnie de JESUS, par l'ordre de Louis le Grand, pour l'avantage des Miffions Orientales & de la République des Lettres, tirée de la Bibliothéque du Roy, fuivie d'une Table Chronologique de la Monarchie des Chinois depuis fon origine jufqu'à préfent. C'eft de ce livre particulièrement qu'on a tiré cette Idée générale du Gouvernement & de la Morale des Chinois. Il faut remarquer que ce n'eft point de Confucius que l'on tient fes Ouvrages, mais d'un de fes Difciples qui a eu foin de les recueillir, & de conferver à la poftérité la mémoire des Difcours & des Sentences de ce Grand Philofophe.

(1) Les fentimens des Chinois fur la Divinité & le culte dont on doit

l'honorer, font le fujet de plufieurs livres qui ont paru en grand nombre, & dont les difcuffions tiennent plus de l'animofité que de l'examen : elles ont fait naître à tout le monde l'envie de connoître la Chine. Peu de perfonnes ont cherché cette connoiffance dans les livres de Confucius; l'efprit de parti dont on étoit ocupé, n'a point permis de l'envifager par les endroits eftimables; il a tenu lieu de tout autre apas, & en a même fait trouver dans des fubtilités purement métaphyfiques. On ne lit point les Ouvrages de Confucius, parce qu'on ne connoît pas toute leur beauté. Nos études font intéreffées ; Confucius eft un Philofophe Chinois, la Chine eft bien éloignée: en voilà affez pour nous empêcher de les lire: honteufes réfléxions! fauffes conféquences!

aucun ne l'a fait d'une manière à n'en laisser point fouhaiter un nouveau traité.

Je commencerai par l'Hiftoire abrégée de la vie de Confucius; elle fera fuivie d'une idée générale de l'Empire de la Chine (2): je parlerai enfuite de l'amour réciproque des Péres & des Enfans, fondement principal de la politique des Chinois: de leur Gouvernement; & de leurs foins pour l'Agriculture & le Commerce. Je raporterai les diférens traits dont Confucius caractérise la Vertu, le Sage & les Loix: je finirai par les préceptes que donne ce Philosophe pour bien gouverner.

I.

HISTOIRE ABRÉGÉE

DE LA VIE DE CONFUCIUS.

.

térité de Confu

CONFUCIUS tiroit fon extraction d'un des pre- Extraction miers Empereurs. Il naquit 551 an avant la venue naissance & pofde Notre-Seigneur. Ses defcendans ont aujourd'hui cins. le titre de Ducs; c'eft la feule famille éxemte de tribut : elle réside à Kiofeu, Ville natale de Confucius, dans la Province de Kanton, & compte plus de 4400 ans d'ancienneté. La maison de ce grand Philofophe fubfifte encore, & les Empereus vont quelquefois la visitër.

A

Confucius vivoit d'une maniére très-dure; il ne mangeoit que les viandes les plus communes & les plus faciles à préparer: il ne buvoit que de

( 2 ) Cette idée générale de l'Empire de la Chine, eft tirée particuliérement des Tables Chronologi

Divifion &' ordre des matières

articles.

ques qui font à la fuite des Ouvra
ges de Confucius.

Sa maniére de

vivre.

l'eau, & couchoit fur la dure : il n'avoit point d'autre chevet que fon bras placé fous fa tête. Cette maniére de vivre avoit pour lui, ainfi qu'il le difoit lui-même, de plus grands agrémens que n'en a la vie la plus voluptueufe pour la plûpart des

hommes.

Le progrès de Il s'apliqua d'abord à connoître les préceptes fes connoiffances. des Anciens. A trente ans, il fut fi conftant & fi ferme, que rien n'étoit capable de le détourner de l'étude de la Philofophie; aucune chose ne l'ébranloit, il ne craignoit plus les événemens de la fortune. A quarante, il s'étoit rendu certain dans ses connoissances; il n'hésitoit plus, & ses doutes s'évanouirent. A cinquante ans, il reconnut la Providence, & conçut la néceffité de rapeller toutes les actions à la pure lumiére de la raison. A foixante, la force de fon entendement se trouva portée à sa perfection. Enfin à foixante & dix ans, il lui étoit plus facile de faire le bien, que de penfer le mal.

Sa mort & fa

mémoire.

L'autorité de Confucius parmi les Chinois est plus grande que n'étoit chez les Grecs, celle de Socrate ou de Platon. Ce Philofophe eut jufqu'à 3000 Disciples: il mourut à 73 ans. On voit dans presque toutes les Villes des Colléges magnifiques bâtis en fon honneur, avec ces Inscriptions ou d'autres femblables écrites en caractéres d'or: Au GRAND MAÎTRE, A L'ILLUSTRE ROI DES LETTRE'S. Rien ne fera mieux connoître le caractére de ce grand Homme, que les sentimens de vertu & d'humanité dont font remplis fes ouvrages.

II.

IDÉE GÉNÉRALE

DE L'EMPIRE DE LA CHINE.

fes Habitans,&

pereur.

L'EMPIRE de la Chine se divise en quinze Pro- Grandeur de la vinces, qui pourroient à cause de leur grandeur & Chine nombre de de leurs richeffes être regardées comme de grands revenus de l'ĒmRoyaumes. Ce vaste pays eft habité par foixante millions d'hommes, fans compter les femmes, les enfans, les Troupes & les Lettrés. Ce nombre paroît prefqu'auffi incroyable que les revenus immenfes que le Traducteur de Confucius atribue à l'Empereur. Il les fait monter à 150 millions de piéces d'or qu'il évalue à quatre florins de Hollande; ce feroit fur le pié de 27 livres le marc d'argent, environ 720 millions.

raille.

,

Le mur qui sépare la Chine d'avec la Tartarie, Dimensions de eft de tout ce qu'on peut dire ce qui fait fentir da- la grande muvantage la puissance & la grandeur des Chinois parce que c'eft ce qu'il y a de plus réel. Il a 400 lieues de long, près de 500 fi on en fuit tous les circuits; 30 coudées de haut, 12 de large, & 15 dans quelques endroits. Ce mur fut élevé 215 ans avant la venuë de Notre-Seigneur. Le Corps qui en avoit autrefois la garde étoit de près de 700

mille hommes.

On s'eft imaginé que les Chinois étoient des Nation Chinoibarbares: ce que nous pensions d'eux, ils le fe eft civilifée. penfoient de nous avant que de nous connoître : ce font les Peuples les plus polis de l'Afie. Ils ont eu la connoiffance de la plupart des fciences & des arts

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