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nois. Le Nouvellifte faute de connoî tre le génie de cette nation, s'égare: il décide hardiment de tout ; moins de hardieffe, plus de capacité l'empêcheroient de fe rendre méprifable.

Le Nouvelliste dit, ce que l'auteur a écrit fur la religion des Chinois, n'eft pas moins entortillé. La fecte des Lettrés a une religion particulière. Ils femblent fe faire une divinité de je ne fais quelle vertu répandue dans l'univers, & fur tout dans le ciel matériel fon principal. inftrument: fi ce font des athées, &c.

vrages de Confucius la vie de ce Philofophe, il eut vu que le progrès de fes connoiffances eft raporté par les. auteurs Chinois de la maniére dont on le trouve dans mon ouvrage. Peu au fait de la maniére dont penfent & dont s'expriment les Chinois, la gradation lui a paru bizarre. Il en est à peu près du Nouvelliste, comme du François à Londres qui trouve que les Anglois ont l'air étranger.Peut-être que tout cela, ajoute le Nouvellifte, n'est pas écrit fans deffein. J'emprunte fes expreffions pour lui répondre. Il me Jemble que l'auteur n'auroit pas du prendre un air fi miftérieux... il y a quelque miftére que je ne faurois pénétrer*. Je réponds plus pofitivement le motif de mon travail eft expliqué fufifament dans ma réponse à l'auteur des Nouvelles Ecléfiaftiques.

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Pour juftifier Confucius, il fufit de remarquer que c'eft à la religion chrétienne que

J'avoue que ce que j'ai dit de la religion des Chinois eft fort entortillé, & je foutiens que s'il étoit autrement, il ne vaudroit rien, les Chinois n'aiant qu'une idée très confuse de la divinité. Tout le monde connoit le Décret de Clément XI: il est émané d'une congrégation établie pour les afaires Eclefiaftiques de la Chine. Les dificultés font propofées en forme de demandes & réfoluës par des réponses. Le Pape n'a fait qu'aprouver ces réponfes. On a aporté dans l'expofition des faits & dans les réponses relatives, toute la clarté & toute la précision poffible, & je crois cependant que ce qu'on y dit ne paroitra pas moins entor tillé que ce que j'ai dit.On voit dans ce que j'apelle ici une expofition des faits, que les Chinois Lettrés n'entendent autre chofe par le mot TIEN, que je ne fais quelle vertu naturelle du ciel qu'ils eftiment être le principe ou plutôt le comprincipe de toutes chofes, d'où il arrive qu'ils facrifient au ciel pris en ce fens. De la comparaison des termes du Décret avec les miens, résulte ma juftification: cela prouve encore la juftice du reproche que j'ai fait au Nouvelliste qu'il eft fouvent peu au fait des chofes dont il décide hardiment.

l'on doit l'exacte connoiffance de la providence. Je ne prétens pas décider par là que Confucius ait eu cette connoiffance exacte; mais je dis qu'au moins il en avoit aproché affez,pour fupofer dans ce Philofophe un grand fonds de réflexions, & pour lui mériter l'éloge qui lui eft donné. La maniére dont il eft loué, eft remarquable par cette fingularité, qu'elle paroit moins un éloge qu'une expofition, qu'un recit. La gradation du progrès de fes connoiffances, peut mériter le nom de finguliére, mais ne mérite pas celui de bizarre. Enfin la Providence est un des principaux atributs de la divinité; les Chinois ont fur la divinité de fauffes idées: combien a-t'il falu détruire de préjugés pour faire connoître à cette Nation le vrai Dieu & fa providence? Ainfi ce qui ne nous paroit point un digne objet d'éloges, peut l'être pour les Chi* Le fujet qui a donné lieu au Nouvellifte de me faire ce reproche est expliqué ci-après.

. Le Nouvellifte ataque la fuite de la phrafe dont je viens d'expliquer une

partie: voici cette fuite. Si ce font (les Chinois Lettrés) des Athées, c'en est une efpece fingulière. L'erreur monstrueuse qu'ils fuivent n'a pu entrer dans leur efprit qu'en s'acomodant à l'idée naturelle qu'on a de Dieu, & en donnant à leur être chimérique les traits de la divinité, le Nouvellifte ajoute, je fuprime la fuite qui donneroit encore plus de prife à une critique favante. Cette fuite eft ce qui a été relevé, propofition quatrième, par l'auteur des Nouvelles Ecléfiaftiques. Sur les paroles que je viens de raporter, le Nouvellifte demande : Pourquoi mettre en probléme fi les Chinois font Athées ? fut-il jamais d' Athéisme plus décidé?

Je ne crois pas qu'on doive acufer d'athéifme une nation qui reconnoit le ciel, qui l'invoque, qui lui fait des facrifices, où il y a un culte établi & des cérémonies réglées. C'eft parce qu'ils ont été acufés d'athéifme par un favant critique qui a toujours faifi les ocafions de faper les fondemens de la religion, qu'on a propofé ce fait d'une maniére problématique, quoique véritablement il ne dût point l'être : & qu'on a ajouté que l'erreur où ils font, n'a pu entrer dans leur efprit qu'en s'acomodant à l'idée naturelle qu'on a de Dien, & en donnant à leur être chiméri

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que les traits de la divinité. En éfet cette nation atribue à l'objet de fon culte, une espece de justice, de science, de fageffe & de bonté. On eft Athée pour ne reconnoître aucune divinité & non pour en avoir une fauffe idée; car fi par cette raifon on regardoit les Chinois comme Athées, on devroit auffi regarder comme tels, les Idolatres. C'est une autre queftion, s'il peut y avoir des peuples athées la plupart des Théologiens font perfuadés qu'il n'y a pas d'athées de bonne foi. C'est au fujet de ce que je viens d'expliquer, que le Nouvellifte me - fait des reproches de faire peu d'usage de

ma Logique, d'enfanter des idées chimériques, qu'il m'acufe d'extravagance, & qu'il dit qu'on reconnoît l'ouvrage d'un jeune homme peu exercé dans la dialectiques J'ai démontré la jufteffe des idées le

que

Nouvellifte a fi mal ataquées, que loin de faire cas de fa critique, je dois, pour éviter le jufte reproche qu'on pourroit me faire de vouloir me revêtir d'une gloire étrangère, déclarer ici l'auteur dont j'ai emprunté les expreffions critiquées. C'est un savant univerfellement reconnu pour un génie trans cendant & Métaphificien ; j'ai marqué dans ma réponse au Nouvellifte Ecléfiaftique, que cette idée de la religion des Chinois, étoit tirée des réflexions du P. Tournemine fur l'Athéisme.

Parmi les notes de l'Auteur, dit le Nouvellifte, il y en a une qui me paroit fingulière. C'eft au fujet du Japon où les Chinois commercent, & d'où ils ils raportent beaucoup d'or. Je remarque qu'il n'y a point de mines d'or dans le Japon, que la recherche du pays dont il vient eft intéreffante, &

que la découverte n'en feroit pas dificile fi c'étoit celui que j'imagine. La plupart des Géographes dít le Nouvellifte,parlent du Japon comme d'un pays fertile en or. Ces Géographes fe trompent en cette ocafion. Le Nouvelliste ne devroit pas ignorer que l'on n'a point encore de cartes bien exactes des parties les plus reculées de l'Afie, & que ce que la plupart des Géogra phes difent de ces pays, a été fouvent copié dans des mémoires peu exacts. J'avois, dit le Nouvellifte, d'abord foupçoné que l'auteur faifoit les Japonois inventeurs de la pierre Philofophale. C'eft mal à propos faire le mauvais plaifant. Le Nouvellifte n'a pas de difpofition pour jouer ce role : le ridicule retombe fouvent fur ceux qui ont voulu le donner. Il n'y a pas de relation de l'invention de la pierre Philofophale,

à la découverte d'un pays fertile en or. Sur l'air mistérieux qu'il me reproche, je lui répons, que c'eût été une differtation trop longue & trop peu liée à mon fujet : que pour bien faire cette differtation, il auroit falu avoir communication de certaines relations & mémoires qui font dans les bureaux de la Marine, que cette differtation feroit moins fondée fur des faits que fur un grand nombres de conjectures qui quadrent, & que peut être même on ne m'auroit pas permis de rendre cette idée publique ; car je fais pofitivement, qu'il y a eu des mémoires qu'on n'a pas voulu permettre d'insé

rer dans le Dictionnaire de commer ce: il y a certaines chofes dont on ne doit pas donner connoiffance aux étrangers.

Ceux qui liront le Nouvellifte du Parnaffe, doivent remarquer qu'il fe fert fouvent d'exclamations, & que c'est là le reffort, le fel, & la démonftration de fes critiques. Le ton impofant ne convient pas, mais furtout à ce Nouvellifte; car on fait quel eft l'auteur de cette fatyre. Les exclamations ne font pas propres pour inftruire & éclairer l'efprit des Lecteurs, ce qui est le véritable objet de la critique.

RÉPONSE

AU JOURNALISTE DE TRÉVOUX

Ldonne des éloges que je ne méE Journaliste de Trévoux me rite pas. Loin d'y être fenfible, je les défavouë. Je redoute beaucoup redoute beaucoup moins fa critique, que fes éloges. Je crains que des éloges fi outrés, ne me donnent un ridicule. La paffion de tourner tout en ridicule est un vice afecté à notre nation, vice dificile à définir.

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Suivant le Journaliste le titre de Gracian eft fimple, Le politique D. Ferdinand le Catholique je le regarde comme un titre très-fingulier, c'est un titre mystérieusement pompeux; c'eft plutôt une infcription qu'un titre: Mais fût-il fimple, il ne s'enfuivroit pas qu'il fût exact, & qu'il défignât la nature de l'ouvrage, Je juftifie celui que j'ai fubftitué, par les propres paroles de Gracian, C'eft plûtôt, dit-il en parlant de fon ouvrage, la critique de plufieurs Rois, que le panégyrique d'un feul Roi,

Le Journaliste trouve de l'ordre & de la méthode dans l'ouvrage de Gracian. Il éléve beaucoup cet ouvrage & femble chargé du foin de le justifier, D'un autre côté le Nouvellifte du Parnasse semble acharné à le dégrader. Le proverbe est vrai, tout excès eft vicieux. Je m'en tiens à ce que j'ai dit fur l'ouvrage de Gracian dans ma Préface. L'ordre que le Journaliste trouve dans Gracian,eft un ordre imaginaire. Il y a plus de la moitié de l'ouvrage qui ne fe peut raporter fous aucune des trois parties qui font la triple divifion que le Journaliste s'aplaudit d'avoir trouvée. Enfin quand même l'ordre trouvé par le Journalifte fe trouveroit dans Gracian, cela feul ne feroit pas un ouvrage méthodique, il faudroit encore que l'on reconnût de l'ordre dans chaque partie, ce qui eft impoffible, puifqu'il n'y en a point. Le Journaliste des Savans eft d'un fentiment contrai

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re à celui du Journaliste de Trévoux. On conçoit bien, dit le Journaliste des Savans, qu'un livre dont le texte eft un éloge outré de tous les talens vrais ou faux d'un Prince comparé avec prefque tous les Princes qui l'ont précédé, & dont les notes font des traits d'histoire tous détachés les uns des autres, ne peut jamais produire un extrait METHODIQUE & fuivi.

Les phrafes Efpagnoles raportées dans le Journal ont été fi défigurées par l'Imprimeur, qu'il eft quelquefois impoffible de les deviner ; & quelquefois ces erreurs font un fens ridicule qui fe trouve favorable à la critique du Journaliste. Telle eft cette phrase Espagnole raportée dans le Journal, Que fi todo Rey, para fer el primero de Los hombres, ha de fer el MAJOR de los hombres, para fer el primero de los Reyes, ha de fer el maximo de los Reyes. Ce qui traduit littéralement veut dire que fi tout Roi, pour être le premier des hommes, doit être le plus grand (major) des hommes; pour être le premier des Rois, il doit être le plus grand des Rois: au lieu que le fens Espagnol eft que, pour être le premier des hommes, il en faut être le meilleur ( mejor); pour être le premier des Rois, il en faut être le plus grand. Cette phrase ainfi rendue n'a pas encore toute la beauté dont elle eft fufceptible, C'eft pourquoi fans m'atacher fervilement aux exprefLions de Gracian, j'ai préféré de n'être pas dans cette ocafion fi fidéle traducteur, & de donner à fa penfée toute la force, & tout le fens que la réflexion y fait trouver. Gracian a voulu exprimer en quoi confifte la prééminence d'un homme fur les autres hommes, & celle d'un Roi fur les autres Rois; c'eft par le dégré de bonté qu'il mefure l'une, il mesure l'autre par le dégré de grandeur: delà cette conféquence naturelle, Les

belles inclinations font l'honnête homme, & les grandes qualités font les grands Rois. C'eft de cette maniére que j'ai rendu la pensée de Gracian, & ce n'eft pas la feule qui a eu befoin d'être plûtôt expliquée que traduite. Avec un peu de réflexion le Journaliste de Trévoux n'eût point avancé que ces phrafes n'étoient point dans Gracian. Renvoier le Journalifte à lui-même, le faire fouvenir de réfléchir, c'eût été fufifament lui répondre fur la dificulté que je viens d'expliquer, & fur plufieurs autres de cette nature qu'il feroit trop long, & affez inutile de réfuter.

Quelquefois la critique du Journaliste n'eft fondée que fur fon défaut de goût & de délicateffe. Voici la preuve de ce que j'avance. Traduction littérale de Gracian. La poftérité a cru que Xénophon avoit moins représenté ce qu'avoit été Cyrus, que ce que doit être un Monarque parfait. J'ai traduit: La postérité a cru que Xénophon avoit moins repréfené ce qu'avoit été Cyrus, que ce qu'il devcit être. J'en apelle à tout homme d'efprit & de goût. La penfée de Gracian eft exactement renduë. Laquelle de ces deux traductions eft la plus fpirituelle, c'eft le Lecteur qui doit le décider,

Le Journaliste toujours entoufiafmé de Gracian, dit que c'eft un Auteur qui dit toujours des chofes, Gracian en dit fouvent qui n'ont plus ou moins de fens, que fuivant l'imagination du Lecteur qui en met peu ou beaucoup. Telle eft cette phrase qui par ellemême ne dit rien, mais qui peut donner beaucoup à penfer. Avec la capacité, jeune an eft vieux, Sans elle, vieux on eft jeune. J'ai cru qu'elle devoit être paraphrafée. La paraphrafe eft en caractére italique, & j'ai marqué dans une note de la même les page que paraphrafes font quelquefois permifes pour

donner plus de clarté & plus de grace à la pensée d'un Auteur, pour en mieux exprimer toute la force & toute la beauté. Cette note qui devoit au cas de befoin, me fervir de justification, n'a point arrêté la critique du Journalifte.

Le Journaliste me reproche de couper les phrases: le ftyle du P. Cour beville dans les traductions de Gracian qu'il a données au Public, eft périodique; mais cela n'en eft pas mieux.

On doit en traduifant un Auteur le copier autant qu'il eft poffible: on doit non feulement rendre ses pensées, mais encore tâcher d'imiter fon ftyle; on doit à la vérité le copier d'une maniére qui embelliffe, par exemple en ne faifant trouver que de la force où l'Auteur avoit mis de la dureté; de la douceur & du naturel, où il y avoit de la foibleffe & de la négligence. Pour en revenir à Gracian, tout le monde fait que fon ftyle eft concis, ferré, & coupé. On doit ici remarquer la dificulté du Journaliste qui me reproche une paraphrase, & qui me reproche enfuite un ftyle coupé : ce n'eft pas avec cette rigueur dificultueufe que le Journaliste a rendu compte au public des traductions du P. Courbeville, qui ne font point exemptes de défauts: l'on a même reproché à ce Pere d'être plutôt le Paraphrafte que le Traducteur de Gracian. Mais le Journaliste eft Jéfuite, le P. Courbeville l'eft auffi l'état confond quelquefois les perfonnes, & le plus fouvent on ignore fes défauts.

1;

Le Journaliste raporte une phrafe Efpagnole que je parois avoir traduit dans un fens diamétralement opofé à celui de Gracian. Voici cette phrafe telle que la raporte le Journaliste : Depufo prefto el arnès, el prudente de los Filipos de España, au lieu que dans

l'impreffion que j'ai qui eft de Barce lone, il y a difpufo: le premier veut dire que Philippe quitta de bonne heure le cafque & la cuiraffe, & l'autre qu'il les prit de bonne heure. Voilà l'explication d'une des treize pages que ren◄ ferme la critique du Journaliste.

Le Journaliste me reprend avec raifon d'avoir fait fainte Héléne époufe de Conftantin. La faute eft groffiére; je m'en étois déja aperçu: elle eft d'autant moins excufable, que l'inadvertance qui me l'a fait faire, avoit été précédée d'une autre inadvertance, favoir que c'eft une adition de texte. Un retranchement de texte remarque le Journaliste, fuit de près cette adition. Il est vrai qu'il y a dans l'Efpagnol, la revolte de Gazelli & des Mammelus, Mammelus, &c. & je n'ai mis que la revolte des Mammelus, &c. Dans l'impreffion de Gracian que j'ai, au lieu de Gazelli eft Gacele; ce mot fe trouve fi défiguré, qu'à moins d'avoir préfente à l'efprit l'histoire de Soliman, il est très-dificile de le reconnoitre. D'ailleurs la fupreffion du mot de Gazelli eft peu importante: elle ne diminue rien de la penfée de Gracian: fa revolte étoit fi intimement unië à celle des Mammelus, qu'exprimer l'une, c'eft rapeller le fouvenir de l'autre dans l'idée de ceux qui favent l'histoire du régne de Soliman. Le Journaliste auroit pu me reprocher d'avoir fuprimé une phrase entiére de Gracian dont voici la traduction littérale: Henri IV. de France envia telle fois la valeur des Espagnols. C'est une phrafe que j'ai paffée volontairement, n'ayant fu lui donner un fens raisonable.

On reconnoit que le Journaliste a fait une étude particuliére de la langue Efpagnole. Il me reprend avec jufte raifon d'avoir traduit le mot de Bombarda par Bombe: c'est un Canon.

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