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XIII.

Concile de Vienne.

to.x, conca

Vita ap.

Bol. 1.Apr

écrivit fur ce fujet, nous en avons une à Gui AN. 1112, archevêque de Vienne, & legat du faint fiege, où il l'exhorte à demeurer ferme, en cas que les barbares, c'est-à-dire les Allemans, veuillent ébranler sa conftance, foit par menaces, foit par careffes. Puis il ajoûte: Quant à ce que vous defirez favoir, voici ce qui en est. je déclare nuls & je condamne à jamais les C écrits faits au camp, où j'étois retenu prifonnier, touchant les inveftitures; & je me conforme fur ce fujet à ce qu'ont ordonné les canons des apôtres, les conciles & nos prédeceffeurs, principalement Gregoire & Urbain. L'archevêque de Vienne tint un concile le =feiziéme de Septembre la même année 1112. où se trouverent entre autres évêques, faint Hugues de Grenoble & faint Godefroi d'Amiens: que l'archevêque avoit prié d'y venir pour tenir fa place, parce qu'il n'avoit pas la = parole libre. Ce concile fit un decret en ces termes: Nous jugeons fuivant l'autorité de la fainte églife Romaine, que l'inveftiture des évêchez, des abbaïes & de tous les biens ecclesiastiques reçuë de la main laïque est une herefie. Nous condamnons par la vertu du SaintEfprit, l'écrit ou privilege que le roi Henri a extorqué par violence du pape Pascal, noús le déclarons nul & odieux. Nous excommunions ce roi, qui venant à Rome fous ombre d'une = paix fimulée, après avoir promis au pape par ferment la fureté de fa perfonne, & la renonciation aux inveftitures, après lui avoir baifé les pieds & la bouche, l'a pris en trahison com1 me un autre Judas, dans le faint fiege, devant le corps de faint Pierre, avec les cardinaux, les évêques & plufieurs nobles Romains: l'aïant enlevé dans fon camp, l'a dépouillé des ornemens pontificaux, traité avec mepris & déri

10.9. p.44.

Vita 111. c.7.ap. Sur 8. Nov

AN, 1112.

to x cane P. 785

fion, & extorqué de lui par violence cet écrit déteftable. Nous l'anathematifons & le féparons du fein de l'églife, jufqu'à ce qu'elle reçoive de lui une pleine fatisfaction. Saint Hugues de Grenoble fut le principal auteur de

cette excommunication.

Le concile écrivit enfuite au pape une lettre fynodale qui porte: Nous nous fommes affemblez à Vienne fuivant l'ordre de vôtre Sainteté. Il s'y eft trouvé des députez du roi avec des lettres bullées, où vous témoignez defirer la paix & l'union avec lui, & le roi difoit qu'elles lui avoient été envoïées de vôtre part depuis le concile que vous avez tenu à Rome au carême dernier. Quoique nous en fuffions surpris: toutefois nous fouvenant des lettres que nous avons reçuës de vous, Girard d'Angoulesme & moi touchant la perfeverance dans la juftice: pour éviter la ruine de l'église & de nôtre foi, nous avons procedé canoniquement. Ils rappor tent enfuite fommairement le decret du concile de Vienne, & en demandent la confirmation par des lettres patentes que les évêques fe puiffent envoier l'un à l'autre : puis ils ajoûtent: Et parce que la plupart des feigneurs du païs, & prefque tout le peuple eft de nôtre fentiment fur ce point: enjoignez-leur pour la remiffion de leurs pechez, de nous prêter fecours s'il eft befoin. Nous vous reprefentons encore avec le ref pect convenable; que fi vous confirmez nôtre decret, & vous abftenez déformais de recevoir de се cruel tyran, ou de fes envoïez, des lettres ou des prefens, & même de leur parler: nous ferons, comme nous devons, vos fils & vos fideles ferviteurs. Mais fi vous prenez un autre chemin, ce que nous ne croïons pas : ce fera vous, nous en preferve, qui nous rejetterez de vôtre obéiance. Nonobftant cette menace, le pape

Dieu

confirma les decrets du concile de Vienne par AN. 112. une lettre datée du vingtiéme d'Octobre.

Joceran archevêque de Lion, indiqua la même année un concile à Anfe, pour traiter de la foi & des inveftitures; & y appella Daimbert archevêque de Sens & fes fuffragans: mais ils s'en excuferent par une lettre qu'Ives de Chartres écrivit au nom de toute la province, où il parle ainfi Nos peres n'ont point ordonné que l'évêque du premier fiege pût appeller les évêques à un concile hors de leur province: fi ce n'étoit par ordre du faint fiege, ou qu'une églife particuliere appellât au premier fiege, pour des caufes qu'elle ne pouvoit terminer dans la province. Il apporte fur ce fujet les autoritez des papes, puis il ajoûte:

Quant aux inveftitures dont vous voulez parler en ce concile, vous découvrirez la honte de vôtre pere au lieu de la cacher. Car ce que le pape a fait pour éviter la ruine de fon peuple, il a été contraint par la neceffité, mais fa volonté ne l'a point approuvé. Ce qui paroît en ce que fi-tốt qu'il a été hors du péril comme il l'a écrit à quelques-uns de nous, il a ordonné & défendu ce qu il ordonnoit & défendoit auparavant: quoique dans le peril il ait permis de dreffer quelques écrits déteftables. Ainfi Pierre répara fes trois reniemens par trois confeffions: ainfi le pape Marcellin féduit par les impies, offrit de l'encens devant l'idole? & peu de jours après reçut la couronne du martyre, fans avoir été jugé par fes freres. Dieu a permis ces chutes dans les plus grands hommes, afin que les autres connoiffent leur foiblefle, qu'ils craignent de tomber de même, ou fe relevent promptement.

Que fi le pape n'ufe pas encore contre le roi d'Allemagne de la feverité qu'il merite: nous

XIV.
Lettres

d'Ives de
hartres
fur les in-
veftitures.
ep3¿, 236.,

AN. 1112. croions qu'il differe exprès, fuivant le juge ment de quelques docteurs, qui confeillent de

Parm. c. 2.

s'exposer à de moindres perils, pour en éviter 111. cont. de plus grands. Ives rapporte ici un grand paffage du troifiéme livre de S. Auguftin contre Parmenien, où il dit, que fuivant la faine difcipline de l'églife on ne doit employer l'anathême que contre les particuliers, & quand il n'y a aucun peril de fchifme. Mais quand le coupable eft affez puiffant pour entraîner la multitude, ou quand tout le peuple eft coupable, il ne refte aux gens de bien que de gemir devant Dieu. Car les confeils de féparation sont inutiles & pernicieux. Ives de Chartres continuë: D'ailleurs il ne nous paroît pas utile d'aller à un concile où nous ne pouvons condamner les accufez, parce qu'ils ne font foumis au jugement d'aucun homme. Le Sauveur lui-même nous ordonne d'obéir à ceux qui font en de telles places, quand même ils feroient femblables aux Pharifiens, pourvû qu'ils enfeignent bien, quoiqu'ils fallent mal. Il faut donc couvrir l'opprobre du facerdoce, de peur de nous expofer à la rifée de nos ennemis, & d'affoiblir l'églife en voulant la fortifier. Ainfi nous croions être excufables fi nous nous abftenons de déchirer le pape par nos difcours, & fi nous excufons avec une charité filiale ce qu'il a accordé au roi d'Allemagne. Car le prévaricateur de la loi n'est pas celui qui peche par furprife ou par neceffité: mais celui qui combat la loi de deffein formé, & qui ne veut pas reconnoître fa faute. Nous approuvons même la conduite du pape, fi voïant le peuple menacé de fa ruine, il s'eft exposé au péril pour remedier à de plus grands maux. Il n'eft pas le premier qui a ufé de temperament & d'indulgence felon les occafions.

Enfin quant à ce que quelques-uns appellent

herefie l'inveftiture, l'herefie n'eft que l'erreur AN. 12, dans la foi. La foi & l'erreur procedent du cœur, & cette inveftiture qui excite un fi grand mouvement, n'eft que dans les mains de celui qui -la donne & de celui qui la reçoit. De plus, fi cette inveftiture étoit une herefie, celui qui y a renoncé, ne pourroit plus y revenir fans peché. Or nous voïons en Germanic & en Gaule plufieurs perfonnes refpectables, qui aïant effacé cette tache par quelque fatisfaction & rendu le bâton paftoral, ont reçu de la main du pape l'inveftiture à laquelle ils avoient renoncé. Les papes ne l'auroient pas donnée, s'ils avoient cru qu'elle enfermât une herefie. Quand donc on fe relâche pour un tems, de ce qui n'est point ordonné par la loi éternelle, mais établi ou défendu pour l'honneur & l'utilité de l'églife: ce n'eft pas une prévarication, mais une loitable & falutaire economie.

Que fi quelque laïque eft affez infenfé pour s'imaginer, qu'avec le bâton pastoral il peut donner un facrement ou l'effet d'un facrement: nous le jugeons abfolument heretique, non à cause de l'inveftiture manuelle, mais à cause de cette erreur diabolique. Et fi nous voulons donner aux chofes des noms convenables, nous pouvons dire que cette inveftiture des laiques eft une entreprife & une ufurpation facrilege: que l'on doit abfolument retrancher pour la liberté de l'églife, fi on le peut faire fans préjudice de la paix. Mais quand on ne le peut fans faire fchif me, il faut differer & fe contenter de protefter contre avec difcretion. L'archevêque de Lion Ap. Ivoni répondit à cette lettre : infiftant principalement ep. 237. fur le droit de fa primatie, en vertu duquel il prérend pouvoir convoquer les évêques de toutes les provinces Lionoifes: fans qu'ils aient fujet de fe plaindre qu'on les tire hors de leur

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