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AN

1112: province. Il avouë que l'investiture en soi n'eft pas une herefie, mais il dit que l'herefie confifte à foutenir qu'elle eft permise.

epist. 114.

&

Ives de Chartres écrivit de même à Henri abbé de faint Jean d'Angeli, qui lui avoit demandé fon avis fur les inveftitures. J'approuve, dit-il, & je confirme autant qu'il eft en moi le jugement des papes Gregoire & Urbain; quelque nom qui convienne proprement à cette ufurpation, je juge fchifmatique l'opinion de ceux qui la veulent foûtenir. Ce que je ne dis pas contre le pape, qui m'a écrit, qu'il a été contraint de faire ce qu'il a fait, & qu'il est toûjours dans les mêmes fentimens. J'estime donc qu'il faut l'avertir par des lettres familieres & charitables, de fe juger lui-même & de fe retracter. S'il le fait nous en rendrons graces à Dieu, & toute l'église s'en réjoüira avec nous: fi la maladie eft incurable, ce n'est pas à nous de le juger; puifque l'évangile nous ordonne d'obéir à ceux qui font affis dans la chaire, fans faire des confpirations factieufes pour les en chaffer. Que s'ils commandent quelque chofe contre l'évangile, nous ne devons point leur obéir, fuivant l'exemple de faint Paul, qui refifta en face à faint Pierre fon fuperieur. Car quand les jugemens humains font à bout, il faut implorer la mifericorde de Dieu pour ceux qui fe font féparez de l'unité de l'églife.

Ives avoit écrit dans le même fens à Brunon archevêque de Tréves, à qui il difoit: Nous voions la divifion du roïaume & du facerdoce, qui font les principaux appuis de l'églife de Dieu; & nous devons tous travailler à les réunir, foit en retranchant les membres corrompus, foit en emploïant des remedes plus doux. Car dans un fi grand peril, il ne faut pas s'en tenir à la feule rigueur, il faut ufer de

condefcendance, & faire comme dans la tempête, où l'on jette une partie des marchandifes pour fauvet le refte C'eft ainfi que la charité fe rend foible avec les foibles, & le fait tout à tous, & les particuliers ne doivent pas blâmer la conduite des pasteurs, fi fans préjudice de la foi & des mœurs ils font ou fouffrent quelque chofe d'imparfait pour conferver la vie de leurs ouailles.

Geofroi abbé de Vendôme n'étoit pas fi moderé; & voici comme il écrivit au pape Pafcal fur ce fujet: Celui qui étant affis fur la chaire des faints apôtres, s'eft privé de leur bien-heureux fort, agiffant autrement qu'eux, doit caffer ce qu'il a fait & le corriger en pleurant, comme un autre Pierre. Si la crainte de la mort l'a fait broncher, ce n'eft point une ex

la

cufe
pour avoir fait ce qu'il pouvoit éviter en
acquerant l'immortalité. S'il dit que ce n'est
pas la crainte de fa mort, mais de la mort de
fes enfans: c'est encore une mauvaise excuse,
puifque loin de les fauver il a mis un obstacle à
leur falut. Car il n'y a point d'exemples des
faints, qui nous autorifent à differer une mort
utile au prochain, & qui nous feroit aufli-tôt
entrer dans la vie éternelle. Si faint Paul évita
mort pour un tems, il ne blessa point la foi
& n'abandonna pas la verité. Ce n'eft donc point
par un confeil de juftice ou de mifericorde,
mais par une fuggeftion du demon que l'on a
fouftrait à la mort des hommes, qui étant
mortels ne peuvent l'éviter long-tems; & qui
pouvoient entrer auffi-tôt dans la vie éternelle
avec utilité pour toute l'églife. Quand même
ils auroient été affez lâches pour fe retiter de
la porte du paradis en renonçant à la verité :
c'étoit à vous de les foûtenir par vos exhor-
tations & vôtre exemple, en mourant le

Gy

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AN. 1112.

XVI.

à Rome.

Cha

IV. c. 46.

premier pour la bonne caufe. Et comme cette
faute eft inexcufable, il faut la corriger fans
delai de peur que l'églife qui femble prête
à rendre le dernier foupir, ne périfle entiere-
ment. Il foûtient que l'inveftiture est une he-
refie fuivant la tradition des peres, & que
celui qui l'autorife eft heretique. Or, ajoûte-
t-il, on peut tolerer le pafteur s'il eft de
mauvaifes mœurs, mais non s'il èrre dans la

foi. En ce cas le moindre des fideles a droit
de s'élever contre lui: fût-ce un pecheur pu-
blic; fut-ce une perfonne infâme.

Cependant Alexis empereur de CP. aïant Ambaflade appris ce qui s'étoit paffé entre le pape & de l'empe- l'empereur Henri, envoïa à Rome une amreur Alexis ambaffade de perfonnes confiderables, pour témoigner qu'il étoit fenfiblement afflige de la prife du pape, & des mauvais traitemens qu'il avoit foufferts. I loüoit & remercioit les Romains d'avoir réfifté à Henri; & ajoûtoit, que s'il les trouvoit auffi bien difpofez qu'on lui avoit mandé, il iroit à Rome luimême ou fon fils Jean, recevoir la couronne de la main du pape comme les anciens empereurs. Les Romains lui manderent par fes ambaffadeurs, qu'ils étoient prêts à le recevoir; & au mois de Mai de la même année III 2. ils choifirent environ fix cens hommes qu'ils envoïerent à l'empereur pour le conduire. On ne fait à quel deffein Alexis fit cette démarche, & on n'en voit aucune fuite.

Rom. Sa

lern. ap.

Peregr

La mort de Boëmond arrivée l'année précedente, avoit délivré l'empereur Alexis d'un redoutable ennemi. Il mourut en Poüille, comme il fe préparoit à retourner en Orient, & &ap. Ba fut enterré à Canoffe dans l'églife de faint To... Sabin, où l'on voit fon épitaphe en vers laGuill. Tyr tins du tems. Comme fon fils Boëmond étoit lib.x1.c.6.

encore enfant, Tancrede lui fucceda dans la AN. 1112. principauté d'Antioche: mais il ne la poffeda . 18. qu'un an & mourut en 1112.

XVII.

Eglife de Jerufalem.

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La même année mourut Gibelin patriarche de Jerufalem; & il eut pour fucceffeur l'archidiacre Arnoul furnommé Male-couronne, qui afpiroit depuis fi long-tems à ce fiege. Il maria fa niéce à Eustache Grener feigneur de Sidon & de Céfarée, & lui donna le meilleur domaine de son église, favoir Jerico & fes dependances. Sa vie ne fut pas moins fcandaleuse dans fon pontificat qu'auparavant; mais pour en diminuer le reproche, il introduifit des chanoines réguliers dans l'églife de Jerufalem Conon évêque de Preneste y étoit alors en qualité chr. Ab. de legat du faint fiege, & aiant appris com- vf. amo ment le roi Henri avoit pris le pape à Rome, & le défordre qu'il y avoit fait: il prononça contre lui une fentence d'excommunication par le confeil de l'églife de Jerufalem, & la renouvella enfuite en diverfes provinces.

11.6.

Ce fut par le confeil du patriarche Arnoul G. Tyr. xi, que le roi Baudouin époufa Adelaïde comteffe . 21. de Sicile, quoiqu'il eût épousé à Edefle une femme legitime qui vivoit encore.

Adelaide

veuve de Roger, frere de Robert Guifchard, étoit une princeffe riche & puiffante; & Baudouin rechercha fon alliance, pour remedier à fon indigence qui étoit extrême. Il lui envoia en 1112. des ambaladeurs, qui lui perfuaderent ce mariage, lui diffimulant que Baudouin fût marié, & lui promettant la fucceffion du roiaume de Jerufalem pour le fils qu'elle auroit de lui, ou en cas qu'elle n'en eût point d'enfans pour celui qu'elle avoit déja; favoir Roger II. Comte de Sicile. La comteffe arriva en Paleftine en 1113. apportant avec elle des richeffes immenfes, & le roż

AN. 1112.

Baudouin l'époufa, comme s'il eût été libre: Cependant Bernard patriarche d'Antioche, renouvella fes plaintes auprès du pape, de la conceffion qu'il avoit faite à l'églife de JeruPafc. epift. falem; & le pape déclara qu'il n'avoit pré

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XVIII.

Gaudri évêque de Laon maf

facré.

Guib. Novig. 1.de

vita c. s.

V. Cang. gloff. Coinmunia

tendu attribuer au patriarche de Jerusalem

que les églifes dont les limites avoient été confondues par la longue domination des barbares; mais qu'à l'égard de celles dont les bornes étoient demeurées certaines, il falloit s'en tenir à l'ancienne poffeffion. Le pape écrivit de même au roi Baudouin, lui ordonnant d'empêcher que fous prétexe de la conceffion faite en fa faveur, le patriarche de Jerufalem n'ufurpât la jurifdiction fur les églifes, qui fous les Turcs & les Sarafins avoient incontestablement relevé du patriarche d'Antioche.

On

Gaudri évêque de Laon s'étoit rendu odieux; principalement par l'affaffinat de Gerard de Creci, un des premiers feigneurs de la ville, que Roricon frere de l'évêque tua dans l'églife cathédrale comme il faifoit fa priere. Il est vrai que l'évêque étoit cependant à Rome: mais on fut perfuadé qu'il y étoit allé exprès, pour détourner de lui le foupçon de ce meurtre, après l'avoir commandé. Une caufe encore plus grande de haine, fut qu'après avoir juré la Commune de la ville, il s'efforça de l'abolir appelloit Communes les nouvellesfocictez, que formoient entre eux les habitans des villes par la conceffion de leurs feigneurs, pour le défendre contre les violences des nobles, & fe rendre juftice entre cux. Ceux qui juroient ces focietez fe nommoient proprement bourgeois, & ils élifoient de leur corps des officiers pour les gouverner fous les noms des maires, jurez, échevins, ou autres femblables; & c'eft l'origine des corps de ville. Or comme les habi

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