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refolut d'ôter l'abbaïe à Oderife, & y envoïa AN. 1126 auffi-tôt Gregoire évêque de Terracine, qui en avoit été moine; mandant à Oderife de venir à Rome fe défendre fur les cas qui lui étoient impofés. Oderife refufa d'y aller, fi le pape ne lui fendoit les bonnes graces, difant qu'il étoit prevenu à fon defavantage, & le pape après l'avoir appellé trois fois, prononça contre lui fentence de dépofition la cinquiéme femaine de carême en 1126.difant, que quand il ne feroit point coupable d'autre crime, fa contumace & fon orguëil fuffifoient pour le condamner. Oderife fut affez mal confeillé pour méprifer cette fen tence; & le jour des Rameaux il s'affit dans la chaire, la croffe à la main, & fit toutes les fonctions d'abbé. Le pape encore plus irrité, l'excommunia le jour de Pâques avec tous les fauteurs & tous ceux qui lui obéiroient: ce qui produifit une grande divifion entre les moines & le peuple de la ville de faint Germain, dépendante de l'abbaie. Ils en vinrent aux armes, & les citoïens s'étant rendus les plus forts, contraignirent les moines à chaffer Oderife & élire un autre abbé.

V

ment.

Ils élurent Nicolas, doïen du mont-Caffin: mais quelques-uns des anciens envoïerent secretement au pape des lettres, où ils déclaroient qu'il avoit été élu par fédition, & irreguliereCependant le pape avant que de favoir l'élection de Nicolas, envoïa au mont-Caffin Gregoire cardinal du titre des apôtres avec ordre de faire élire abbé Seignoret, prevôt du monaftere de Capoue; & promettant en ce cas fa protection au mont-Caffin. Quand le car-" dinal eut affemblé les moines, & leur cut expofé les ordres du pape, il s'éleva entre cux un grand murmure, & ils foûtinrent que l'élection de leur abbé ne devoit dépendre que

89.

AN. 1126.

Sup. liv. XLI. n. 33.

d'eux; & qu'il étoit indigne & honteux pour
eux de voir foûmis à des cardinaux ce mo-
naftere, qui avoit toûjours été libre. Le
cardinal aïant fait faire filence, leur dit: Sa-
chez que je ne fuis pas venu ici pour l'inte-
rêt du pape, ou de l'églife Romaine. Elle n'a
pas befoin de vôtre fecours, ni de vos loüian-
ges, aiant été fondée par le Fils de Dieu,
qui lui a donné l'empire du ciel & de la ter-
re. Ce monaftere a été fondé
par faint Be-
noît, qui avoit été inftruit à Rome; & par
faint Maur & faint Placide, citojens Romains;
après avoir été détruit par les Lombards, il fut:
rétabli par les papes Gregoire & Zacarie, & en-
core par le pape Agapit, après avoir été brûlé
par les Sarrafins. Ainfi l'églife Romaine a des
titres particuliers pour fe dire mere & maîtref-
fe de ce monaftere. Les moines appaifez par ce
difcours, reprefenterent au cardinal les fàcheu-
fes circonftances du tems, & promirent quand
il feroit plus favorable, qu'ils executeroient la
volonté du papc.

Mais quand Oderife cut appris l'élection de
Nicolas, à laquelle il ne s'attendoit pas, il
fe faifit du château de Bantra ; & aiant ra-
maffé des troupes de côté & d'autre, il rui-
noit par le fer & par le feu, les châteaux qui
c. 90. reconnoiffoient Nicolas. Celui-ci pour fe foû-
tenir, appella à fon fecours Robert prince
de Capoue, & fe fit apporter du mont-Caffin
un autel d'or orné de pierreries, des calices
d'or, des encenfoirs, & d'autre argenterie
en grande quantité: qui étoient les offrandes
des papes & des princes; ce qui lui attira la
haine implacable des moines; & il continua
ainfi à faire la guerre. Au contraire Oderife
defefperant de fléchir autrement le
pape, vine
à Rome fe jetter à fes pieds, & renonça en

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tre fes mains à l'abbaïe du mont-Caffin. Le pape AN. 1127. Honorius voulant finir ces defordres, dépofa Nicolas de l'abbaie, & excommunia tous fes adherans puis il écrivit aux moines, que s'ils vouloient lui remettre la difpofition du monaftere, il iroit lui-même, & travailleroit à le reformer, tant pour le fpirituel, que pour le temporel. Les moines irritez contre Nicolas, lui fermerent les portes quand il voulut venir au monaftere, & envoierent au pape l'affurer de leur entiere foumiffion.

C. 94.

Il envoïa au mont-Caffin le cardinal Matthieu évêque d'Albane, qui aïant affemblé le chapitre, fit élire Seignoret, quoi qu'abfent: car comme il venoit de Capoue pour l'élection, il fut arrêté en chemin par un feigneur du parti de Nicolas. Il fut élû le douzième de Juillet 127. & enfuite aiant été delivré, il vint au mont-Caffin, & fut installé dans la chaire de c. 95.' S. Benoît. Nicolas lui ceda & abandonna les for

tereffes qu'il tenoit ; & le pape étant venu au mont-Caffin, y donna à Seignoret la benediction abbatiale. Ce qui étoit fans exemple, car la coûtume étoit de l'aller recevoir à Rome. Le pape vouloit qu'il lui prêtât ferment; mais les moines s'y oppoferent, difant que jamais leurs abbez ne l'avoient fait. Le pape dit, que l'abbé du mont-Caffin pouvoit bien faire ce que faifoient prefque tous les évêques & les autres abbez. C'eft, repliquerent les moines, qu'ils font fouvent tombez dans l'herefie, & ont eu des fentimens contraires à l'églife Romaine. Le pape en demeura là; & ainfi finic l'affaire du montCaffin, dont Seignoret fut abbé pendant neuf ans & demi.

Guillaume duc de Pouille & de Calabre > étant mort fans enfans la même année 1127. le vingt-huitiéme de Juillet, Roger comte de

LII.

Guerre da pape en Poliile.

AN. 1117.

Baron. an.

1127. ex

chr. Rom.

Sicile fon oncle, qu'il avoit inftitué heritier vint à Salerne, où il fut reconnu pour feigneur, & facré comme prince par Alfane évêque de Capoue, puis il vint à Rege, où il fut reconnu Salern. duc de Pouille, & retourna en Sicile ; & déflors chr Be evil prit le titre de duc. Il envoïa une ambassade au pape Honorius, avec des prefens, le priant de lui accorder ce titre avec l'étendart; & lui promettant, s'il le faifoit, la ville de Troïe & celle de Montefofco près de Benevent. Le pape refufa les offres,prétendant que Roger avoit dû commencer par recevoir de lui l'inveftiture; de quoi Roger indigné, fit ravager par les feigneurs fes vaffaux, le territoire de Benevent. Pour s'y oppofer, le pape vint à Capoue la même année le trentiéme de Decembre, où il facra le prince Robert, & harangua ceux qui s'étoient affemblez pour cette folemnité, leur reprefentant les maux que le comte Roger avoit faits à la ville de Benevent: proteftant de ne jamais écouter fes promeffes, mais de lui refifter jufques à la mort; & demandant pour cet effet le fecours des affiftans. Ils le promirent tous fondant en larmes, le nouveau prince Robert tout le premier; le pape promit à tous ceux qui aïant reçu la penitence, mourroient dans cette expedition, la remiffion de tous leurs pechez; & la moitié de l'indulgence à ceux qui n'y mourroient pas. Ce qui les encouragea merveilleu fement à cette guerre.

pape

mar

L'année fuivante le duc Roger entra dans la Pouille avec une grande armée; & le cha de fon côté pour l'en chaffer, avec Robert prince de Capoue, & plufieurs autres feigneurs du pais mais Roger habile guerrier ne leur livra point bataille, & fe tint avec fon armée dans des lieux où ils ne pouvoient l'attaquer: jufques à ce qu'ennuiez de tenir la campagne

pagne & manquant de fubfiftance, ils fe diffi- AM. 427 perent & retournerent chacun chez eux. Le pape fe voiant abandonné revint à Benevent: le duc le fuivit auffi-tôt

& lui aiant envoié des députez, il fit fa paix, lui rendit hommage lige, & reçut de lui par l'étendart l'inveftiture du duché de Pouille. Ce traité fut fait le jour de l'octave de l'Affomption vingt-deuxième

d'Août 128.

coup

LIII. Charles le bon comte

de Flandres.

Sup liv. 1 *.

37.

L'année precedente Charles le bon comte de Flandres fut tué par fes propres fujets, & regardé comme martyr de la jultice. Ce prince étoit fils de faint Canut roi de Danemarc, tué l'an 1087. & tenu pour martyr : fa mere étoit Adele fille de Robert le Frifon comte de Flandres. Charles allá dans fa jeuneffe à la terre fainvita ap. te, & y fervit contre les infideles avec beau- Boll. 2. de valeur. Etant devenu comte, & aiant Mart. tom. affermi fa puiffance, il rendit un grand refpect” 6. p. 164• aux prelats & à tous les ecclefiaftiques, jufques à recevoir volontiers leurs corrections; & il déchargea les églifes des impofitions établies par fes predecefleurs, Quand il rendoit justice, il expedioit toûjours les caufes des ecclefiaftiques les premieres, pour les renvoier plus promtement à leurs fonctions. Dans une fterilité qui dura l'année 1125. & la fuivante, il eut un foin particulier des pauvres : il en nouriffoit cent en chacune de fes terres, & beaucoup plus au lieu où il fe trouvoit : & on remarqua qu'étant à Ipres, il diftribua en un jour jufques à lept mille huit cens pains. Il étoit tellement eftimé des étrangers, qu'on lui offrit le roïaume de Jerufalem pendant la prifon de Baudouin II. & T'empire après la mort de Henri V. mais il refufa l'un & l'autre. Il s'attira la haine des méchans, en reprimant avec force & feverité les meurtres, les violences, & les injuftices. Bertou! Q

Tome XIV.

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