ne laiffoient de leur tems aucune herefie fans la combattre de tout leur pouvoir, & la refuter par leurs difcours & par leurs écrits. Il voulut combattre de même cette fecte, qui occupoit alors près de la moitié du monde connu. Il exhorta premierement faint Bernard à écrire fur ce fujet, comme celui qui en étoit le plus capable; & enfin voïant que perfonne ne le faifoit, il l'entreprit lui-même & l'executa en cinq livres, qui ne fe trouvent plus. Ce n'est pas qu'il efperât grande utilité de ce travail pour la converfion des Mahometans: mais il croioit qu'il feroit utile du moins aux Chrétiens pour leur faire connoître l'abfurdité de cette fete, & preferver de la feduction ceux qui s'y trouvoient expofez. A a j AN. 1143. I. Mort d'In nocent. Celeftin II pape. VII. Chr. c. 27. LIVRE SOIXANTE-NEUVIE'ME. E pape Innocent avoit depuis long-tems excommunié les Tiburtins, & tenoit leur ville affiegée; enfin il les contraignit à fe rendre à des conditions raifonnables. Mais les Romains n'en furent pas contens, fe fouvenant d'avoir été battus l'année précédente en une fortie que firent les affiegez. Ils vouloient donc que le pape ne pardonnat aux Tiburtins, qu'à condition d'abattre leurs murailles & de fortir tous de la province; & irritez de ce qu'il les avoit traitez plus humainement, ils firent fedition, s'affemblerent au Capitole, rétablirent le fenat aboli depuis long-tems, prétendant renouveller ainfi l'ancienne dignité de Rome; & recommencerent la guerre contre les Tiburtins. Le pape s'oppofa autant qu'il put à leur deffein, emploïant les menaces & les prefens: car il prévoïoit que l'églife pourroit perdre un jour par-là l'autorité temporelle fur Rome, qu'elle avoit reçuë de Conftantin, & toûjours confervée depuis, comme on le croïoit alors. Mais le peuple étant le plus fort, & le pape ne pouvant s'en rendre le maître, il tomba malade & mourut le vingt-quatriéme de Septembre 1143. après treize ans & fept mois de pontificat, pendant lefquels il ordonna à diverfes fois dix-huit diacres, vingt prêtres, & foixante & douze Paperb.Co évêques. Il fut enterré à faint Jean de Latran, d'ou fes os furent depuis transferez par Pierre évêque d'Albane fon frere, à l'églife de fainte Marie de-là le Tibre, qu'il avoit commencé de rebâtir, & dans l'abfide de laquelle on voit encore en mofaïque, l'Image d'Innocent II. avec celle du pape Callifte I. dont cette église portoit autrefois le nom; du pape Jule dont elle prit auffi le nom aprés qu'il l'eut reparée; du pape S. Corneille & du prêtre faint Calepode, qui y étoient enterrez. On rapporte un ferment qu'Innocent II. faifoit prêter aux avocats, par lequel il paroît qu'il y avoit alors à Rome des juges & des avocats gagez par le pape, à la charge d'epercer leurs fonctions gratuitement. Le S. fiege ne vaqua qu'un jour; & le dimanche vingt-fix Septembre, 1143. on élut pape Gui de Castel, Toscan de nation, prêtre cardinal du titre de S. Marc, qui fut nommé Celeftin II. mais il ne tint le S. fiege que cinq mois. La même année, mais fix mois auparavant, mourut l'empereur Jean Comnene. Aïant effaïé en vain de reprendre Antioche fur les La tins, il paffa l'hyver en Cilicie, où chaffant un fanglier, il fe bleffa à la main d'une fleche cmpoisonnée ; & le mal negligé d'abord devint mortel , parce que l'empereur ne voulut point fe faire couper le bras. Se voïant à l'extremnité, il defigna pour fon fucceffeur Manuel le plus jeune des deux fils qui lui reftoient, mais le plus capable de regner. Il communia le jour de Pâques quatrième d'Avril, & mourut le huitiéme du même mois, aïant regné vingt-quatre ans, fept mois & quinze jours. On le nommoit en grec Calo ioannes, c'est-à-dire le beau Jean. Plufieurs années avant la mort aïant remporté une victoire fur les Perfes, il entra en triomphe à Conftantinople. Les rues étoient tapiflées, le char orné de clous d'argent & de pierres mediocrement précieufes, étoit tiré par quatre chevaux blancs: mais l'empereur n'y monta pas, il y fit mettre un tableau de la Vierge, à laquelle il attribuoit fa victoire, & marchoit devant à pied, portant une croix. A a iiij Jus Graco les évêques font morts, emportent tout ce qui me dans l'évêché, ou dans les autres lieux dépendans de l'églife, ni lui, ni fes officiers : fous peine aux gouverneurs de païer à l'église lezée douze livres de monoïe & d'encourir nôtre indignation; & pour leurs officiers fix livres d'amende & punition corporelle. Que fi c'est un clerc qui ait pris quelque chofe à l'églife, il fera dépofé comme facrilege. Cette défenfe d'entrer dans les églifes & leurs dépendances, pour en enlever quelque chose après la mort de l'évêque, s'étend aux juges, aux receveurs, aux ducs, aux ftrateges, & à toutes les autres perfonnes publiques. Mais s'ils pretendent que l'églife doive quelque chofe au public, ils feront appeller les clercs; & fi la dette eft liquide, ils la feront païer fur les revenus de l'églife. Ce fera au nouvel évêque à soû, tenir les droits de fon fiege. On voit par-là que l'abus de piller les églifes vacantes regnoit en Orient comme en Occident. Le nouvel empereur Manuel Comnene étant arrivé à Conftantinople, commença par remplir le fiege patriarcal vacant par la mort de Leon Stypiote, qui l'avoit tenu huit ans & huit mois. Manuel mit à fa place Michel Oxite, ainfi nommé du monaftere dont il fut tiré. Son furnom étoit Courcoüas; & il étoit ignorant des fien ces profanes, mais bien inftruit de la doctrine AN. 1143. de l'églife, & recommandable par les mœurs & par l'aufterité de fa vie. Il ne tint le fiege de C. P. que deux ans & huit mois. Ce fut donc lui qui couronna Manuel; & ce prince regna trente-huit ans. Le jour de fon couronnement il mit cent livres d'or fur l'autel, & tous les ans il en envoïa deux cens au clergé, Dès la premiere année de fon pontificat le vendredi vingtiéme d'Août indiction fixième, qui étoit l'an 1143. le patriarche Michel tint un concile dans le palais Thomaïte, où affifterent douze métropolitains, & quelques grands officiers de l'empereur. Bafile métropolitain de Tyane en Cappadoce, denonça deux prétendus évêques de fa province : favoir Clement de Safime & Leonce de Balbiffe, comme étant de la fecte des Bogomiles. Et premierement il montra qu'ils n'étoient point évêques : aïant été ordonnez par le métropolitain feul, fans qu'il fût affifté d'autres évêques, comme les canons l'ordonnent, ce qu'ils confefferent eux-mêmes. Sur quoi le concile fit un decret par lequel il declara leur ordination nulle, & ne les reconnut plus que pour fimples moines. III. Jugemene contre des Kogomiles. Leo Allai. deconfb. 11. 1. P. 67 6710 Enfuite & le même jour, le métropolitain .67. Bafile produifit un clerc de fon églife nommé Leon, qui rapporta un écrit figné par les clercs, les magiftrats & les habitans de Tyanc, contenant plufieurs chefs d'accufation contre les deux moines Clement & Leonce, favoir : Ils enseignent aux maris de s'abftenir de la compagnic de leurs femmes legitimes. Ils ordonnent l'abftinence de la chair, du lait, du poiffon, & du vin pendant trois ans, aprés lefquels ils en permettent l'ufage. Ils difent, qu'aucun feculier ne fe peut fauver, quelque vertu qu'il pratique, s'il ne fe fait moine; & que l'on peut engager A ay |