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à Antioche ou à Tripoli: car le roi de Jerufa- AN. 1148, lem & tous les princes Latins d'Orient avoient conçu de grandes efperances de l'arrivée des deux roix. Après qu'ils eurent fatisfait à leur devotion en vifitant les faints lieux: on indiqua une cour generale à Acre, pour déliberer de l'entreprise que l'on feroit fur les infideles.

A cette affemblée fe trouverent le roi Conrad, Otton évêque de Frifingue fon frere, Etienne évêque de Mets, Henri évêque de Toul frere du comte de Flandres, Theotin legat du pape près le roi Conrad: des feigneurs Allemans Henri duc d'Auftriche frere du roi, Frederic duc de Suabe son neveu, & plufieurs autres. Les François étoient, le roi Louis, Geofroi évêque de Langres, Arnould évêque, de Lifieux, Gui de Florence cardinal legat du pape. Les feigneurs laïques étoient, Robert comte de Dreux frere du roi, Henri fon gendre fils du comte de Champagne, Thierri comte de Flandres, beau-frere du roi de Jerufalem, & plufieurs autres. Le roi de Jerufalem Baudouin III. étoit auffi à cette affemblée avec la reine Melifende fa mere, le patriarche Foucher, Baudouin archevêque de Cefarée, Robert archevêque de Nazareth, cinq autres évêques Latins de Palestine, Robert maître des chevaliers du Temple, Raimond maître des hofpitaliers, & quelques feigneurs laïques. La refolution que l'on prit à cette affemblée, fut d'affieger Damas, & le rendez-vous fut donné à Tiberiade pour le vingt-cinquième de Mai. Damas fut donc attaqué & preffé fi vivement, que les habitans ne fongeoient plus qu'à fe retirer: quand ils trouverent moïen de gner par argent quelques-uns des Francs, qui trahiffant les autres, leur perfuaderent de décamper & d'attaquer la ville par un autre côté,

ga

Tyr. lib. xvII. c. 1.

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AN. 1148.

C. 9.

XXX.

où les vivres leur manquerent, en forte qu'ils furent obligez à lever le fiege. On difoit auffi qu'il y étoit entré de la jaloufie du comte de Flandres & du prince d'Antioche: dont chacun prétendoit devenir feigneur de Damas par la conquête. Le roi Conrad s'en revint en Allemagne incontinent après: le roi Louis demeura en Syrie le refte de l'année, & fit à Jerusalem la Pâque de l'année fuivante 1149. après quoi il revint en France; & tel fut le malheureux fuccès de la feconde croifade. Depuis ce tems la condition des Latins Orientaux devint manifeftement plus mauvaise: car les infideles voïant peu de fruit des grands efforts de leurs plus puiffaus princes, commencerent à s'en moquer; & à méprifer, après les avoir vûs de près, ceux dont les feuls noms les effraïoient auparavant.

le

La croifade des Saxons contre les païens du Croifade Nord, n'eut guere plus de fuccès. Elle fut auffi des Saxons. entreprife par l'autorité du pape & par l'exhorChronog tation de plufieurs religieux, & elle avoit pour 1148. but de foumettre ces peuples à la religion chrétienne, ou de les détruire entierement. Les chefs de cette croifade étoient Frideric arche

Saxo an.

Saxo. Gramm.

229.

lib. 13. p. Helm. Chr. Sclav. lib.

I c. 63.

vêque de Magdebourg, les évêques d'Alberftat, de Munfter, de Merfbourg, de Brandebourg, d'Havelberg, & de Moravie ou d'Olmus ; & l'abbé de Corvei. Il y avoit auffi plufieurs feigneurs laïques; & l'armée étoit de foixante mille hommes. D'un autre côté s'armerent Al

beron archevêque de Breme, Thietmar évêque de Verden, Henri duc de Saxe, & plufieurs autres feigneurs, avec quarante mille hommes. Le roi de Danemarc avec les évêques du roïaume, affembla auffi fes forces par terre & par mer, qui faifoient une armée d'environ cent mille hommes. Toutes ces troupes atta

querent les Sclaves, pour vanger les meurtres AN. 1148. & les ravages qu'ils avoient faits fur les chrétiens, principalement fur les Danois. On atta

qua

donc les païens en divers endroits, on por ta la terreur par tout, on fit le degât & on brûla plufieurs villes; entr'autres celles de Malchon, avec le temple d'idoles qui en étoit proche. Mais après que cette guerre eut duré trois mois, les ferviteurs des princes Allemans les plus voifins leur reprefenterent, qu'en ruïnant ce païs, ils perdoient les tributs qu'ils avoient accoûtumé d'en tirer: ainfi ils commencerent à faire la guerre foiblement ; & enfin ils firent la paix, à condition que les Sclaves recevroient la religion chrétienne, & relâcheroient les Danois qu'ils tenoient efclaves. Il y en eut plufieurs en effet qui furent baptifez, mais fans être convertis, & ils rendirent les vieillards & les autres esclaves, qui leur étoient inutiles, rctenant les gens de fervice. Ainfi cette grande entreprife produifit peu de fruit: car incontinent après les Sclaves firent pis qu'auparavant : ils ne garderent ni les promefles de leur baptême, ni la paix avec les Danois, fur lefquels ils ne cefferent point de faire des courfes.

le tems

qua

Le pape Eugene tint le concile de Reims dans marqué, & le commença le vingt-deuxiéme de Mars, qui étoit le lundi après le triéme dimanche de carême. Il s'y trouva des évêques de France & d'Allemagne; & Thibaud archevêque de Cantorberi y vint nonobftant la défense du roi Etienne, ce qui le fit recevoir favorablement du pape. Quelques évêques d'EL pagne s'y trouverent: entr'autres les deux archevêques de Tolede & de Tarragone.

c. 66.

XXVI.

Concile de

Reims.

to. x. conce Rob de Ma ad Sigeb

p. 1107.

Eug, ep.

74. 82.

A ce concile fut amené un gentilhomme Breton nommé Eon de l'Etoile, homme prefque otto..Frid fans lettres: qui fe difoit être le fils de Dieu & c. 44. 459

AN. 1148. le juge des vivans & des morts, fur l'allufion groffiere de fon nom avec le mot Eum dans cette conclufion des exorcifmes Per eum qui judicaturus eft;& dans celles des oraisons Per eumdem. Cette imagination, toute abfurde qu'elle étoit, ne laiffa pas de lui fervir à feduire une grande multitude de peuple ignorant des extremitez de la France; c'eft-à-dire de Bretagne & de Gafcogne; on prétendoit même qu'il faifoit plufieurs merveilles par l'operation des démons. Après que quelques feigneurs eurent en vain esfaié de l'arrêter, il fut pris par l'archevêque de Reims avec fes principaux difciples. On le prefenta au Concile, où étant interrogé par pape, il ne répondit que des impertinences, & fut jugé infenfé plûtôt qu'heretique; l'archevêque de Reims qui l'avoit amené, obrint qu'on lui fauva la vie: mais on chargea l'abbé Suger commé regent en France, de l'enfermer ;& il le mit dans une étroite prifon, où ce miferable mourut peu de tems après. Quelques uns de fes difciples furent livrez au bras feculier, & fe laifferent brûler, plûtôt que de renoucer à leur folie.

Martenne

Collect. t. 1. 1.2,2.

c. 2.

2. 10.

Ce concile fit plufieurs canons, la plûpart repetez des conciles precedens, & rapportez diverfement en divers exemplaires. Voici les plus remarquables. Si un clerc reçoit les revenus d'une églife qu'il ne deffert pas, il fera excomnunié jufques à ce qu'il ait reftitué tout ce qu'il en a perçu injuftement; & le prêtre qui aura cependant deffervi cette églife, fera dégradé Défenfe aux prêtres de fe rendre chapelains des feigneurs, finon par permiffion de l'évêque diocéfain & après lui avoir fait ferment d'obéir en tout à fes ordres. Défense à eux de celebrer l'office divin dans les fortereffes, après qu'il a été interdit dans quelque église du mê..

me lieù. Défense d'arrêter les clercs, les mettre c. 4. 5. en prifon ou aux fers, en tirer rançon, ou retenir des ôtages: fous peine d'anathême, & d'interdiction du lieu où ils feront detenus, & de tous les lieux appartenans au feigneur qui les aura pris. On ne celebrera point dans le lieu où fera un ex- c. 7. 8. communié, même en prefence du roi : fous peine aux chapelains de la cour, ou aux prêtres des lieux, de dépofition & de perte de benefice.

to. x. conci

c..2.

Sup. liv. LXV I. Opus 11.

C. 2.

Serm. 77

in Cant, 7.

c.
(.4.

6. 8.

c..

Les évêques & les clercs éviteront dans leurs habits la varieté des couleurs, les découpures & les ornemens fuperflus. Nous avons vû les plaintes de faint Bernard contre cet abus. On déclare nuls les mariages des ecclefiaftiques conftituez dans les ordres facrez, des religieux & religieufes, & on ordonne aux chanoineffes & aux autres religieufes d'obferver la clôture & la vie commune. Défenfe aux laïques de poffeder les dîmes ecclefiaftiques, foit qu'ils les aïent reçuës des évêques, des rois, ou de quelques perfonnes que ce foit. Les avouez des églifes ne prendront rien fur elles, ni par eux, ni par leurs inferieurs, au de-là de leurs anciens droits. On ne mettra point dans les églifes des 6. 10. prêtres mercenaires par commiffion: mais chacune aura fon prêtre particulier, qui ne pourra être deftitué que par le jugement canonique de l'évêque, ou de l'archidiacre; & on lui affignera fa fubfiftance convenable fur les biens de l'églife. Voilà les curez tutelaires. On ordonne aux incendiaires pour penitence, de faire un an le fervice de Dieu à Jerufalem, ou en Espagne, c'eft ainfi que l'on nommoir la croifade. On défend à qui que ce foit, de recevoir, ou proteger les heretiques de Gafcogne & de Provence; c'eft-à-dire les Manichéens: fous peine d'excommunication contre les perfonnes, & d'interdit fur les terres.

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c. 18

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