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AVERTISSEMENT

CE

DE

L'ÉDITE U R.

*

E dixième & dernier Volume de la Collection complète des Œuvres de M. FLÉCHIER, renferme d'abord les Lettres déjà connues de ce Prélat, au nom-. bre de quatre-cents vingt-deux, enfuite un Recueil de trente - sept autres Lettres nouvellement recouvrées, & copiées d'après les originaux de l'illustre Auteur, & enfin l'Extrait de la Relation des Grands Jours d'Auvergne, tenus à Clermont-Ferrand, en 1665; Extrait précédé d'un mémoire fur les Grands jours, pour fervir d'introduction & d'éclairciffement à cet écrit d'un genre fingulier dont nous avons recouvré deux copies, transcrites toutes les deux trèsincorrectement, quoiqu'elles foient d'une main que M. l'Evêque de Nîmes paroît avoir employée habituellement à mettre au net fes ouvrages. Il convient de dire ici quelques mots de ces différentes Pièces, afin de répondre au défir des Lecteurs, & de continuer à leur rendre compte des vues qui nous ont dirigés dans les foins que nous nous fommes donnés pour rendre cette Édition véritablement complète.

LETTRES anciennes & déjà imprimées..

» 1o. Outre les ouvrages oratoires de FLÉCHIER » dit l'Auteur des Éloges lus dans les Séances publi

* Les trois dernières, avec la Lettre Paftorale, ont été recou vrées par l'Imprimeur.

» ques de l'Académie Françoise (1), nous avons de >> lui un recueil de Lettres, où le luxe de l'efprit se >> montre encore plus que dans fes Pièces d'éloquen» ce, parce que l'efprit y eft encore moins à fa place; >> une négligence aimable est le mérite du style épisto» laire, & FLÉCHIER ne se permettoit pas plus d'être » négligé dans une Lettre que dans une Oraifon funè>> bre; mais s'il eft rarement fimple, même en écri>> vant à fes amis, il eft au moins toujours noble avec » les Grands, toujours honnête avec fes égaux & fes » inférieurs, toujours plein de zèle pour l'Eglife & » pour l'Etat, en un mot, toujours citoyen & tou» jours Evêque, mérite fi précieux dans de pareilles >> Lettres, qu'il le difpenfe d'en avoir un autre. >>

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Quoique ce jugement paroiffe un peu févère, nous ne faifons pas difficulté de l'adopter; en effet, il faudroit être bien fortement prévenu, foit en faveur de tout ce qui eft forti de la plume élégante & féconde de M. FLÉCHIER, foit contre les opinions de l'ingénieux Auteur des Eloges, pour ne pas reconnoître dans le morceau que nous venons de citer, la précifion & la jufteffe du Philosophe, jointe au tact sûr & à la fagacité de l'homme de goût. Nous obferverons cependant, que ce n'eft pas, à proprement parler, le luxe de l'efprit, mais plutôt la fymétrie du ftyle c'est-à-dire une attention pénible, ou du moins trop marquée, à mettre de l'arrangement dans les mots & dans les phrases, qui ne permet pas d'accorder à M. FLÉCHIER cette heureuse facilité, cet abandon de l'efprit, cette douce effufion du fentiment, en un mot, ce ton fimple, naïf, délicat & fin tout ensemble qui conftitue le mérite effentiel du genre épistolaire ; mérite rare, dont il n'exifte qu'un feul modèle dans toute la Littérature ancienne & moderne. Il eft inutile de le nommer, ce modèle unique, tout le monde le connoît, & les Nations les plus jaloufes de nos ri(1) Page 109 & fuivante.

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cheffes littéraires, conviennent que c'eft chez nous qu'on le trouve.

Mais un recueil de Lettres peut être instructif, intéreffant, varié même, & agréable, quoique celui qui les a écrites n'ait pas poffédé tous les talens de l'inimitable Sévigné. Tel eft le recueil des Lettres anciennes & nouvelles de M. FLÉCHIER, raffemblées dans ce Volume. Si l'on n'y remarque pas, comme dans tout ce qu'a laiffé couler de fa plume une femme qui n'eut jamais d'égale, & cette légéreté, & ces grâces ingénues, & ces heureufes faillies, & ces allufions fines, ces traits vifs & brillans, & enfin cet art de donner du corps aux plus petites chofes, & d'y répandre un intérêt qui nous affecte encore après plus d'un fiècle, elles ne laiffent pas de plaire & d'attacher par une politeffe exquife, par une attention continuelle à ne dire que des chofes obligeantes, fans bleffer la fincérité & la vérité, par le foin plus précieux encore de faifir toutes les occasions d'infinuer quelque principe de morale & quelque réflexion qui tourne à l'avantage de la vertu ; & enfin par un ton de raison, de franchise & de probité, dont l'effet prefque inévitable est d'inspirer de l'eftime pour un homme dont l'ame étoit fi honnête & fi vraie jufqu'à faire regretter de n'avoir pu être fon ami, & défirer d'en trouver un qui lui ressemble.

S'il eft vrai que dans une Collection de ce genre, la variété devienne un mérite, parce qu'elle augmente l'attrait naturel de la curiofité, on peut affurer que ce dernier Volume des Œuvres complètes de M. FLÉCHIER ne fera pas le moins intéreffant. Parmi le grand nombre de Lettres qui en forment la plus confidérable partie, les fujets font prefque auffi différens les uns des autres, que les perfonnes à qui elles s'adreffent, & les circonstances qui les ont occafionées. Les unes moins importantes par leur objet, ne font que de fimples complimens, & ne contiennent rien de plus que

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l'expreffion de ce tribut de refpect, de félicitations, de bienveillance réciproque, & de fentimens divers que les citoyens fe doivent les uns aux autres dans les divers événemens de la vie, fuivant la nature & la diverfité des rapports qu'ils ont entre eux. Dans les autres , le Prélat prend le ton d'une aimable familiarité, pour s'entretenir avec ceux qu'il honoroit de fa confiance & de fon amitié. Il leur parle de fes projets, de fes affaires, de fes occupations, de fes études; il épanche fon cœur, il dévoile fes plus intimes fentimens & le fecret de fes pensées fur tout ce qui l'intéreffe, comme fur tout ce qui les touche eux-mêmes. Toutes les Lettres de cette claffe portent l'empreinte d'une ame fenfible & vraie, d'un caractère plein de candeur, & d'un cœur généreux. Il en eft d'autres où il s'attache à difcuter différens points de Doctrine, de Morale, & de Difcipline eccléfiaftique, pour répondre aux queftions qu'on lui avoit propofées. La clarté, la précision & la solidité sont les qualités qui diftinguent ces espèces de petits traités, où les vrais principes de chaque matière font développés en peu de mots, mais avec une prudence & une application.. des règles qui ne laiffent rien à défirer. Pour juftifier cette observation & en fournir la preuve, nous nous contentons de citer, entre plufieurs autres, les Lettres LXIII & LXVIII. Enfin quelques-unes ont pour objet les troubles excités dans tout le Languedoc, & principalement dans le Vivarais & les Cevennes, par les Fanatiques à qui les Puiffances ennemies de laFrance avoient mis les armes à la main vers la fin du fiècle dernier, & que des prétendus Prophètes, infpirés par un efprit de vertige, excitoient à la révolte. Il y peint d'une manière infiniment touchante la frénéfie & la cruauté de ces furieux; il y raconte leurs excès & leur barbarie; il y déplore leur aveuglement. C'eft dans ces Lettres qu'on voit l'ame compatisfante & charitable de ce bon Evêque fe déployer toute entière.

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