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le venons de dire; mais de pareils engagemens n'étoient pas pour arrêter un homme ambitieux : & comme d'ailleurs il voyoit à la tête de ce parti, Pompée, Metellus, Craf fus, & même Catulus fon Collegue qui le furpaffoient en credit & en confideration, il crut qu'il ac querroit un plus grand nombre de partisans s'il paffoit dans le parti de Marius dont la plupart des chefs avoient peri dans la guerre civile, & qui ne fubfiftoit plus, que par l'ancienne animofité du peuple contre la Nobleffe.

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Ce fut pour relever ce dernier parti qu'il propofa d'abolir une partie des Loix de Sylla. Catulus fon Collegue au Confulat, s'y oppofa avec beaucoup de fermeté. Les deux partis fe déclarerent pour l'un ou l'autre Conful. Lepidus pour fortifier le fien, & pour mettre les peuples d'Italie dans fes interêts, leur fit dire qu'il étoit dans le def fein de les rétablir dans les trentecinq anciennes Tribus, & de leur faire rendre les terres dont le Dictateur les avoit privez pour en faire la récompenfe de fes foldats. Cette

déclaration ne manqua pas de groffir confiderablement le nombre de fes partifans. Rome se voyoit à la veille de fervir encore de theâtre à une nouvelle guerre civile; mais le Senat interpofa fon autorité, & tira parole avec ferment des deux Confuls, que pendant leur Confulat ils ne prendroient point les armes l'un contre l'autre.

Plutar in

Lepidus en fortant de Charge, fe App.l. r. crut dégagé de fon ferment. On lui C. 25. avoit décerné à l'iffuë du Confulat, pomp. le gouvernement de la Gaule CisAlpine : il y leva aussi-tôt une armée, & il fit entrer dans fon parti Brutus & Perpenna, tous deux Prétoriens, qui avoient à leurs ordres l'un & l'autre un corps de troupes confiderable & qui campoient près de Modene. Lepidus fortifié de ce secours, & ne voïant aucune armée enItalie qu'on pût lui oppofer, marcha droit à Rome, dans l'efperance de devenir un autre Sylla, s'il pouvoit fe rendre maître de la ville. Le Sénat averti de fa marche & de fes deffeins, fe mit en état de lui en défendre l'entrée. On eut bien-tôt enrôlé les Legions. Catulus qui en eut le commande

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ment, campa hors des portes de la ville. Lepidus pour groffir fon parti, fit femer des billets dans Rome, dans lefquels il invitoit le peuple & les partifans de Marius de le venir joindre. Mais comme on n'étoit pas prévenu en faveur de fon habileté & de fon courage, & que d'ailleurs le peuple ne pouvoit fouffrir qu'on parlât d'incorporer les peuples d'Italie dans les anciennes Tribus, perfonne ne branla en fa faveur. Cependant comme il étoit trop avancé pour reculer, on en vint bien-tôt aux mains; & Catulus à la tête des Legions & de tout ce qu'il y avoir de Nobleffe dans Rome, le chargea fi brufque ment, qu'après une legere réfiftance, il tailla en pieces une partie de fon armée, & obligea le refte à App. 1. 1. prendre la fuite. Lepidus defesperé de ce mauvais fuccès, après avoir erré quelque temps, inconnu & caché en differens endroits de l'Italie, paffa enfin dant l'Ifle de Sardaigne où il avoit quelques partifans. Perpenna un de fes Officiers, l'y vint joindre avec les débris de fon armée. Plufieurs partifans de

c. 25.

Marius fe rendirent auprès de lui. Il fit de nouvelles levées : fon parti groffit infenfiblement; & il fe vit bien-tôt une nouvelle armée. Son deffein étoit de porter la guerre en Sicile où il avoit des intelligences fecretes. Mais on apprit quelque temps après, qu'il étoit mort de chagrin, ayant intercepté une Lettre qui ne lui permettoit pas de douter de l'infidelité de fa femme. Sa mort diffipa fon parti. Brutus n'avoit pas eu un fort plus heureux. Ce Capitaine n'ayant pû paffer en Sicile & joindre Lepidus, s'étoit jetté dans Modene avec quelques troupes qu'il commandoit, moins à la verité pour continuer la guerre, que pour avoir le temps de capituler, & de faire fa condition meilleure. En effet, Pompée ayant eu ordre de l'y af fieger, il ne parut pas plutôt devant la place, que Brutus lui en fit ouvrir les portes, & il ne demanda pour toute condition que de pouvoir fe retirer en fûreté dans une petite bourgade fituée fur les rives du Pô. Pompée en convint: il écrivit même au Senat, que la

prompte foumiffion deBrutus avoit mis fin à la guerre. Cependant au préjudice du traité & de sa parole, peu de jours après il l'envoya poignarder dans cette bourgade qu'il avoit choisie pour retraite ; foit qu'il eût découvert qu'il entretenoit encore de fecrettes intelliPlut. ibid. gences avec Lepidus, foit que ce jeune General élevé dans la cruelle politique de Sylla, ne crût pas qu'on dut laiffer vivre aucun Chef du parti ennemi. Perpenna, après la mort de ces deux Chefs, raffembla les débris de leurs troupes ; & fe trouvant à la tête de cinquantetrois cohortes, il les conduifit en Efpagne. Son deffein étoit de s'y cantonner, & d'y faire la guerre en fon nom, & fans dependre d'aucun Chef, à l'exemple de Sertorius Capitaine d'une grande réputation, qui foutenoit encore le parti de Marius dans la Lufitanie.

Sylla avoit fait déferer le gouvernement de ces grandes Provinces à Metellus un de fesLieutenans. Le Senat craignant qu'il ne pût refifter à ces deux Chefs, s'ils joiPlut. ibid. gnoient leurs forces, envoya à fon

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