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plus belliqueufes nations du monde, n'afpiroit qu'à goûter un peu de repos dans le fein de fa patrie.

Curion qui fentit tout l'artifice de ce discours, & qui vit bien que Pompée n'avoit parlé fi affirmativement des fentimens de Cefar, que pour lui faire nommer un fucceffeur, répo: dit que ce n'étoit pas affez qu'il promît de quitter lui-même fes gouvernemens, s'il n'effectuoit fes promeffes fur le champ. Qu'ils étoient l'un & l'autre trop puiffans, & qu'il étoit de l'interêt de la Republique, qu'ils entraffent en même temps dans une condition privée. Il conclut en difant qu'il étoit d'avis, s'ils ne quittoient pas en même tems l'un & l'autre le commandement des armées, de les dé clarer tous deux ennemis de la Republique.

Curion n'infistoit si vivement fur cette abdication réciproque, que pour cacher l'inclination fecrette qui l'attachoit aux interêts deCefar, & parce qu'il étoit bien inftruit que Pompée ne fe réfoudroit jamais à fe dépouiller de fes gouvernemens. Et quand même il auroit pris ce

parti, & que Cefar à fon exemple auroit été obligé de quitter le commandement de fon armée, Curion n'ignoroit pas par combien de liaifonsCefar avoit attaché à fa fortune. fes foldats & fes Officiers, & qu'il ne lui feroit pas difficile, de rappeller fous fes enfeignes des troupes qui étoient fecretement à fa folde & à fes gages.

Ce Tribun n'ayant pû faire passer fon avis, congedia le Senat fuivant le pouvoir que lui donnoit fa * C. Clau- Charge. Les Confuls * le raffembledius Mar- rent peu de jours après. Marcellus cellus. L. premier Conful & partifan déclaré Cornelius de Pompée, prit un détour pour le An de Ro- maintenir dans fes gouvernemens.

Lentulus.

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Il fit opiner feparement fur ce qui regardoit Pompée & Cefar, & 'demanda d'abord fi les Senateurs trouvoient à propos que Pompée renonçât à l'autorité dont on l'avoit revêtu la plûpart fe déclarerent pour la négative. Il prit enfuite les voix au fujet de Cefar, & il leur demanda s'ils étoient d'avis de lui donner un fucceffeur, & ils en convinrent tous. Mais Curion, quoiqu'il ne fût plus alors Tribun,

ayant demandé fi le Senat ne trouvoit pas encore plus à propos qu'ils quittaffent tous deux le commande. ment des armées, après qu'on eût recueilli les voix, il s'en trouva trois cent foixante-dix pour l'affirmative, contre vingt-deux feulement, qui perfifterent opiniâtrement à ce que Pompée feul retînt le commandement de ses troupes.

Marcellus honteux & irrité de voir fon parti réduit à un fi petit nombre, s'écria avec emportement: Hé-bien ayez Cefar pour maître, puifque vous le voulez. Sur quoi quelqu'un de fes amis ayant ajoûté pour intimider le Senat, que Cefar avoit paffé les Alpes, qu'il marchoit à la tête de fon armée entiere droit à Rome, & Curion ayant fait voir le ridicule de cette nouvelle, le Conful outré de ne pouvoir faire revenir le Senat à fon avis, fortit brufquement en difant que puifqu'on l'empêchoit de pourvoir au falut de la Republique, il y apporteroit les remedes qu'il trouveroit convenables, fuivant le pouvoir que fa Charge lui donnoit. Il fe rendit de-là avec Lentulus fon Col

pre

legue, dans une maison hors de la ville où étoit Pompée, & lui fentant une épée : Nous vous ordonnons, lui dit-il, mon Collegue & moi, de marcher contre Cefar, & de combattre pour la défense de la Patrie. Pompée déclara qu'il leur obéiroit, & il ajouta avec une feinte moderation: Si cependant, leur dit-il, on ne trouve point quelque expedient plus

beureux.

Cefar inftruit de ce qui fe paffoit à Rome, pour mettre toujours de fon côté les apparences de la juftice, écrivit plufieurs fois au Senat avec beaucoup de moderation, & comme pour rechercher la paix. Il demandoit ou qu'on lui continuât fon

gouvernement comme on avoit fait à Pompée, ou qu'il lui fùt permis fans être dans Rome, de pourfuivre le Confulat. Il renouvella enfuite les propofitions de Curion, & demanda que Pompée & lui quit taffent en même tems leurs gouver nemens & le commandement des armées. Mais les Senateurs dont le grand nombre favorifoit Pompée, ayant rejetté toutes ces propofitions, Cefar fe réduisit à demander

le gouvernement de l'illyrie avec deux Legions: ce qu'il n'auroit jamais propofé, s'il eut crû qu'on en fût convenu. Mais il n'ignoroit pas que le parti oppofé vouloit le defarmer entierement; en effet, on ne voulut entendre à aucune de fes propofitions. Marcellus premier Conful tout dévoué à Pompée, & naturellement fier & hautain, difoit qu'il étoit honteux à la Republique de traiter avec un de fes fujets qui avoit les armes à la main. Et Lentulus fon Collegue accablé de dettes; & qui ne pouvoit fe foutenir que dans les troubles de l'Etat n'étoit pas fâché d'une guerre civile, où il pouvoit fe faire valoir & acquerir de grands biens fi fon parti prévaloit.

Cefar qui avoit bien prevû le fuccès de cette negociation, paffa les Alpes à la tête de la troifiéme Legion, & s'arrêta à Ravenne. Il envoya auffi-tôt Fabius un de fes Lieutenans pour rendre de fa part des Lettres au Senat. Il y parloit au commencement en termes magnifiques de fes exploits,& il prioit qu'on eût égard à fes fervices.Il protettoit

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