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Ier: le nom feul des Loix Agraïres fouleva tous ceux qui poffedoient les terres de conquêtes : & les Grands de Rome accoutumez à cet empire qu'ils exerçoient fur les peuples foumis à la République, ne purent pardonner à Drufus, de vouloir leur donner pour concitoyens des gens qu'ils regardoient comme leurs fujets. Des interêts auffi oppofez firent naître des conteftations continuelles dans toutes les affemblées ; & comme tout s'y décidoit alors moins par les regles de l'équité que par la force & la puiffance de chaque parti, une foule de Latins étoient accourus à Rome pour foutenir leut foutenir leut protecteur, mais il ne put échapper à la fureur de fes ennemis. Preffé d'une multitude de peuple qui entouroir fon Tribunal qu'il avoit fait placer dans fa maifon & dans une gallerie obfcure, il fut bleffé au côté d'un coup de couteau que le meurtrier laiffa dans la playe, & dont il mourut. Il ne fut pas poffible de démêler l'auteur du meurtre, parcequ'il fe perdit dans la foule: mais. App. 1. 2. Quintius Varius Tribun du peu

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ple, s'en rendit fufpect, par une Loi qu'il propofa depuis la mort de Drufus. Cette Loi déclaroit criminels & ennemis de l'Etat tous ceux qui renouvelleroient la propoftion d'accorder le privilege de citoyens aux étrangers & aux peuples d'Italie fujets de la Républi que.

An de Ro

me 663

La mort de Drufus affaffiné dans fon Tribunal pour avoir voulu App. 1. 1. procurer à ces peuples le droit de Velleius l. Bourgeoifie, fit naître la guerre 2. Plin. l. qu'on appella Sociale ou des al- 2. 1. 83-liez. Ces peuples outrez de se voir exclus de leurs prétentions par la mort de leur protecteur, refolurent d'en obtenir l'effet les armes à la main. Les villes principales. s'envoyerent d'abord des députations fecrettes pour fe communiquer leur reffentiment commun.. Elles fignerent enfuite une ligue,. & fe donnerent réciproquement des ôtages. Chaque canton fit pro-vifion d'armes & de chevaux ; on enrôla des foldats; on en nommat les chefs. T. Afranius, P. Ventidius M. Egnatius; & Verius Carto, tous Capiraines de réputation,

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devoient commander differens corps. Mais avant que de faire aucun acte d'hoftilité, ils envoyerent des députez à Rome pour demander de la part de tous les peuples d'Italie alliez ou dépendans de la République, d'être reçus au nombre des Citoyens Romains.

Le Senat également inftruit de leurs prétentions & de leurs forces, refufa avec hauteur d'entendre leurs députez; & on leur fit dire qu'ils n'auroient point d'audience jufqu'à ce que ceux qui les avoient envoyez euffent renoncé à la confédération qu'ils venoient de figner: & on les congedia avec cette réponse.

Les alliez au retour de leurs Ambaffadeurs, prirent en même temps les armes de tous côtez. On vit tout d'un coup au milieu de l'Italie une armée de cent mille hommes tous conjurez contre Rome: & ce qui rendoit ces troupes redoutables, c'est qu'elles étoient commandées par d'excellens chefs. & qui avoient été élevez dans les armées & dans la difcipline des Romains.

Le Senat arma de fon côté avec une extrême diligence, & mit fur pied un plus grand nombre de Legions qu'à l'ordinaire. Sextus Ju- An de Rolius Cefar, & P. Rutilius Lupus me 663 tous deux Confuls cette année, marcherent en campagne, & commanderent chacun une armée. On leur donna pour Lieutenans C. Marius. Cn. Pompeius, Cornelius Sylla & Licinius Craffus qui palfoient pour les plus grands Capitaines de la République, & dont la plupart avoient commandé des armées en qualité de Confuls & de Generaux. Mais l'amour de la patrie faifoit que ceux même qui avoient commandé en chefs une année, ne dédaignoient point de fervir la fuivante dans la même armêe en qualité de Lieutenans. On donna à ceux-ci le titre de ProConfùls: & quoique toujours foumis aux ordres des deux Confuls, ils commandoient feparément, à caufe des differens endroits où l'on fut obligé de faire la guerre.

Jamais la République n'avoit eu tant d'armées differentes en même temps dans l'Italie. De peur

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de furprise on mit des gardes aux portes de Rome, pendant une guerre, dans laquelle les foldats des deux partis étoient habillez de la même maniere, parloient la même langue, & fe connoiffoient les uns les autres; en forte qu'il étoit dif ficile de diftinguer le citoyen de l'ennemi. Il y eur des combats fanglans, des batailles, & des prifes de villes. La fortune paffa plus. d'une fois dans l'un & l'autre par ti, qui s'affoiblirent réciproquement, fans rien relâcher de leur animofité & de leur fureur. Enfin le Senat s'appercevant que la République ne remportoit pas même de victoires qui ne lui fuffent funeftes, & qu'en faifant perir des alliez, elle perdoit autant de foldats qui compofoient auparavant fes armées; ce Corps fi fage fe relâcha de fa premiere fermeté mais il ne ceda que peu à peu, pour conferver toûjours la dignité du nom Romain, & même pour jetter de la divifion entre les alfiez. On n'accorda d'abord ce droit & ce privilege de Citoyens, qui: fifoit le fujet de la guerre, qu'aux

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