ces huit Tribus, & de diftribuer enfuite tous ces peuples de l'Italie dont elles étoient compofées, dans les trente-cinq anciennes Tribus. Il fe flattoit par leur grand nombre de fe rendre maître de toutes les déliberations publiques. Les anciens citoyens éclairez par le Senat, n'eurent pas de peine à s'appercevoir que fi on mêloit parmi eux les nouveaux, des étrangers qui venoient d'être admis par grace au rang des Citoyens, ruineroient infenfiblement le credit des auteurs même du bienfait, Ces confiderations les déterminerent à s'oppofer à la publication de la Loi. Le Tribun de fon côté foutenu de ces nouveaux citoyens qu'il avoit fait venir exprés à Rome, vouloit la faire recevoir par la force. Les deux partis en vinrent aux mains, il y eut dans ce tumulte un grand nombre de citoyens tuez de part & d'autre ; la nuit qui furvint, diffipa l'affemblée, fans qu'il y eût rien d'arrêté. - Les Confuls pour reculer le temps d'une nouvelle convocation, ordonnerent fous differens

ptétextes, des fêtes folemnelles, pendant lefquelles il étoit défendu de vacquer à aucune affaire. Sulpitius fans avoir égard à ces fêtes, convoqua une nouvelle affemblée. Il s'y rendit à la tête de fix cens hommes de fon parti qui avoient des armes fous leur robe: efpece de fatellites dont il fe faifoit ac compagner par tout, & qu'il appelloit l'Anti-Senat. Il fit fommer les deux Confuls de fe rendre à l'affemblée, & d'y révoquer fur le champ, les vacances qu'ils avoient ordonnées afin que le peuple pût donner fes fuffrages au fujet de l'abrogation des huit dernieres Tribus, qu'il avoit propofée dans la derniere affemblée.

Ce difcours excita un grand túmulte entre les anciens & les nouveaux citoyens. Les partifans du Tribun mirent l'épée à la main, & chargerent la multitude; le peuple s'enfuit, & le fils de Q. Pompeius Plut. in qui étoit gendre de Sylla, fut tué Sylla. cn voulant fecourir fon pere. Pompeïus fe cacha dans la foule, Sylla pourfuivi par fes ennemis, fe jetta dans la maison même de Ma

Eius dont il trouva la porte ouver te. Marius quoique naturellement cruel & vindicatif, ne voulut point faire tuer un homme à qui fa maifon venoit de fervir d'azile: il lui fauva la vie. Mais il fut obligé pour la conferver, de revenir fur la place, & de, déclarer qu'il revoquoir Finftitution des fêtes. Il fe retira enfuite de cette affemblée, & ne trouvant plus pour lui de fûreté dans Rome où le parti contraire prévaloit, il en fortit fur le champ, & fe rendit en diligence à la tête des troupes qu'il avoit comman dées pendant la guerre Sociale, & qui devoient marcher fous fes ordres en Orient contre Mithridate.

Les fêtes étant revoquées, & les deux Confuls en fuite, Sulpitius maître de Rome fit recevoir fans peine la Loi qui avoit été caufe du tumulte : & par la même Loi, il ôta à Sylla le commandement de Farmée qui devoit marcher en Afte contre Mithridate, dont il fit depar le peu

Idem App.cerner la commiffion ibid.

ple à Marius.

Ce General envoya auffi-tôt des Officiers de fon parti pour en pren

dre le commandement, en attendant qu'il y fût arrivé. Mais Sylla les avoit prévenus, comme nous l'avons dit; il avoit mis tous fes foldats dans fes interêts, par l'efperance de les enrichir des dépouilles de l'Orient, en forte qu'aulieu de recevoir les ordres de Marius, ils affommerent fes Officiers, & ils conjurerent Sylla de les mener con- Plut. is tre les ennemis qu'il avoit à Ro-Sylla. me, avant même que de paffer en Afie. Marius irrité de la mort de' fes Officiers, ufa de reprefailles,: fit tuer plufieurs amis de Sylla, & piller leurs maifons: ce qui obligea les autres de fortir de la Ville avec précipitation, & de chercher un azile dans le camp de Sylla. Ces maffacres déterminerent ce dernier à marcher droit à Rome. Il étoit à la tête de fix Legions dont les foldats animez de fon efprit, ne refpiroient que la vengeance & le pillage. Mais plufieurs Officiers ne pouvant fe refoudre à tourner leurs armes contre leur patrie, quitterent le service, en forte qu'on ne voyoit fur le chemin de Rome que gens qui fuyoient de la ville au

camp, pour échapper à la cruauté de Marius, & d'autres qui paffoient du camp dans Rome dans Rome pour n'être pas obligez de prendre parti dans cette guerre civile. Cependant Sylla avançoit toûjours, & il fut rencontré fur le chemin par Q. Pompeius fon Collegue au Confulat,> qui fe joignit à lui.

Marius & Sulpitius qui n'avoient point d'armée à lui oppofer, interpoferent l'autorité des Magif-: trats, & lui envoyerent Brutus & Servilius tous deux Préteurs &. leurs partifans, qui défendirent à Sylla avec hauteur, de continuer fa marche. Les foldats irritez de la fierté avec laquelle ces deux Préteurs avoient parlé à leur Ge-: neral, rompirent les faifceaux & les haches que les Liteurs portoient devant ces Magiftrats. Ils fe jetterent fur eux. déchirerent leurs robes de pourpre ; & ils les auroient tuez, fi Sylla ne s'y fût. oppofé.

Le defordre dans lequel ces deux Magiftrats rentrerent dans Rome, fit comprendre qu'on avoit perdu tout refpect pour les Loix, & que