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J'y porte au lieu de toi, ces Héros dont la gloire,
Semble épuifer la fable & confondre l'hiftoire;
Et m'en faifant un voile entre la tienne & moi,
J'affure mes regards pour aller jufqu'à toi.

Ainfi dé ta fplendeur mon idée enrichie,
En applique à leur front la clarté réfléchie,

Et forme tous leurs traits fur le moindre des tiens.
Quand je veux faire honneur aux fiécles anciens.
Sur mon Théatre ainfi tes vertus ébauchées
Sément ton grand portrait par piéces détachées : ·
Les plus fages des Rois, comme les plus vail-
!lans,

Y reçoivent de toi leurs plus dignes brillans.
J'emprunte pour en faire une pompeuse image
Un peu de ta conduite, un peu de ton courage:
Et j'étudie en toi ce grand art de régner,
Qu'à leur poftérité je leur fais enfeigner.

C'est tout ce que des ans me peut fouffrir la gla-

ce;

Mais j'ai d'autres moi-même à fervir en ma plá

ce.

* Deux fils dans ton Armée,& dont l'unique emploi

Eft d'y porter du fang à répandre pour toi.

Tous deux ils tâcheront, dans l'ardeur de te plai-

re,

D'aller plus loin pour toi que le nom de leur père :

* Dans l'édition in-4°. ce Vers & le fuivant font ainfi tournés.

Des fils qui de leur fang cherchent à t'acheter
Ces fuccès, qu'à l'envi d'autres vont exalter.

Tous deux impatiens de le mieux fignaler
Ils brûleront d'agir quand je tremble à parler,
Et ce feu qui fans ceffe eux & moi nous consume
Suppléra par l'épée au défaut de ma plume.
Pardonne, grand Vainqueur, à cet emporte-

ment,

Le fang prend, malgré nous, quelquefois fon mo

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D'un pére pour fes fils l'amour eft légitime,

Et j'ai droit pour les miens de garder quelque efti

me,

Après qu'en leur faveur toi-même as bien voulu
M'affurer que l'abord ne t'en a point déplu.

Le plus jeune a trop tôt reçu d'heureuses marque's

D'avoir fuivi les pas du plus grand des Monar

ques:

Mais s'il a peu fervi, fi le feu des moufquets
Arrêta dès Douay fes plus ardens fouhaits;
Il fait gloire du lieu que perça leur tempête,
Ceux qu'elle atteint au pied ne cachent pas leur tê

te:

Sur eux à ta fortune ils laiffent tout pouvoir,

Ils s'offrent tous entiers aux hazards du devoir.
De nouveau je m'emporte. Encore un coup par
donne:

Ce doux égarement que le fang me redonne;
Sa flatteufe surprise aifément nous féduit.
La pente eft naturelle, avec joie on la fuit :-

Ay

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Elle fait une aimable & prompte violence,
Dont pour me garantir je n'ai que le filence.
Grand Roi, qui vois affez combien j'en fuis con-

fus,

Souffre que je t'admire, & ne te parle plus.

POËM E *

SUR LES VICTOIRES

DU RO I.

AU LECTEUR.

Uelque favorable accueil que Sa Majesté ait daigné faire à cet ouvrage, & quelques applaudiffemens que la Cour lui ait prodigués, je n'en dois pas faire grande vanité, puifque je n'en fuis que le Traducteur. Mais dans une fi belle occafion de faire éclater la gloire du Roi, je n'ai point confidéré la mienne: mon zéle eft plus fort que mon ambition, & pourvû que je puiffe fatisfaire, en quelque forte, aux devoirs d'un Sujet fidéle & paffionné, il m'importe peu du refte. Le Public m'aura du moins l'obligation d'avoir déterré ce tréfor, qui fans moi feroit demeuré enfeveli fous la pouffiére d'un Col--lége; & j'ai été bien-aise de pouvoir donner par-là quelque marque de reconnoiffance aux foins que les PP. Jefuites ont pris d'inftruirema jeuneffe & celles de mes enfans, & à l'amitié particuliére dont m'honore l'Auteur de Imprimé en 1667, & en 1669, in-13,

ce Panégyrique (a). Je ne l'ai pas traduit fr fidélement, que je ne me fois enhardi plus d'une fois à étendre ou reffèrrer fes penfees: comme les graces des deux langues font différentes, j'ai crû à propos de prendre cette liberté, afin que ce qui étoit excellent en Latin ne devint pas infupportable en François. Vous en jugerez, & ne ferez pas fâché que j'y aye: fait joindre quelques autres Piéces (b) que· vous avez déja vûës fur le même fujet. L'a-mour naturel que nous avons tous pour les productions de notre efprit, m'a fait efperer qu'elles fe pourroient ainfi conferver l'une par l'autre, ou périr un peu plus tard..

(a) Le Pére de la Rue.

(b) On les a rangées suivant la date de l'année où elles s at paril.

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