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Et ce feu qui s'échappe & brille à tous momens
Semble prêter * au Ciel de nouveaux ornemens :
Mais enfin le coup tombe, & ce moment horrible?
A force de tarder devenu plus terrible,
Etale aux yeux furpris des hommes écrafés,
Une plaine fumante, & des rochers brifés.
Telle on voit le Flamand préfumer ta venue,
Grand Roi, pour fuir ta foudre il cherche à fuir ta ë
vûë;

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Et de tes juftes loix ignorant la douceur,
Il abandonne aux tiens des murs fans défenfeur.

La Baffée, Armentiére, auffi-tôt font défertes,.
Charleroi qui t'attend, mais à portes ouvertes,
A Forts démantelés, à travaux démolis,

Sur le nom de fon R oi laiffe arborer tes Lys.
C'est-là le prompt effet de la frayeur commune,
C'est ce que font fans toi ton nom & ta fortune.
Heureux tous nos Flamands, fi l'exemple fuivi
Eût par-tout à tes droits fait juftice à l'envi!!
Furne n'auroit point vû fes portes enfoncées,
Bergue n'auroit point vâ fes mura illes forcées;
Et Tournai de tout temps tout François dans le

cœur

T'eût reçu comme Maître & non comme vainqueur.
Les Mufes à Donay n'auroient point pris les armes
Pour coûter à fon peuple & du fang & des larmes:
Courtray fans en verfer eût changé de destin;
Ce refuge orgueilleux de l'Espagnol mutin,

* Dans la premiére édition, il y a, aux Cieuxy,

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Aloft, n'eût point fourni de matiere à ta gloire,
Oudenarde jamais n'eût pleuré ta victoire.

Que dirai-je de l'Ille, où tant & tant de Tours,
De Forts, de Bastions, n'ont tenu que dix jours?
Ces murs fi rechantés dont la noble ruine
De tant de Nations flatte encor l'origine,

Ces ramparts que la Gréce & tant de Dieux ligués
En deux luftres à peine ont pû voir subjugués,
Eurent moins de défenfe, & l'Art en leur ftru&ture
Avoit moins fecouru l'effort de la nature;

Et ton bras en dix jours a plus fait à nos yeux.
Que la fable en dix ans n'a fait faire à fes Dieux.
Ainfi par des fuccès que nous n'ofions attendre:
Ton Etat voit fa borne au milieu de la Flandre;
Et la Flandre qui craint de plus grands change-

mens

Voit fes Fleuves captifs divifer fes Flamands.

C'eft-là ton pur ouvrage, & ce qu'en vain ta France
Elle-même a tenté fous une autre puissance ;
Ce que fembloit le Ciel défendre à nos fouhaits,
Ce qu'on n'a jamais vâ, qu'on ne verra jamais;
Ge que tout l'avenir à peine voudra croire...
Mais de quel front ofai-je ébaucher tant de gloire
Moi, dont le style foible & le Vers mal suivi

Ne fçauroient même atteindre à ceux qui t'ont fervi?

Souffre-moi toutefois de tâcher à portraire D'un Roi tout merveilleux l'incomparable frère Sa libéralité pareille à fa valeur,

A l'efpoir du combat ce qu'il fent de chaleur;

Ce que lui fait ofer l'inexorable envie
D'affronter les périls au mépris de fa vie,
Lorfque de fa grandeur il peut fe démêler,
autour de lui tant d'yeux, pour y vo-

Et trompe

ler.

Les tristes champs de Bruge en rendront témoigna ge

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Ce fut-là que pour fuite il n'eut que fon courage.
Il fuyoit tous les fiens pour courir fur tes pas,
Marcin, & ta déroute eût fignalé fon bras
Si le deftin jaloux qui l'avoit arrêtée-
Pour en croître l'affront ne l'eût précipitée.
Et fur ton nom fameux déployé fa rigueur-
Jufques à t'envier un fi noble vainqueur.
Enguien le fuit de près, & n'eft pas moins avide
De ces occafions où l'honneur fert de guide.
L'Efcaut épouvanté voit fes premiers efforts
Le couronner de gloire au travers de cent morts
Donner fur l'embufcade, en pouffer la retraite,
Triompher des périls où fa valeur le jette,

Et montrer dans un cœur auffi haut que fon rang
De l'illuftre Condé le véritable fang.

Saint Paul de qui l'ardeur prévient ce qu'on ef pére,

De fon côté Dunois & Condé

par

fa mére, 'A l'un & l'autre nom répond fi dignement,

Que des plus vaillans même il eft l'étonnement.” Des armes qu'il arrache aux mains qui le combat

tent

Il commence un trophée où fes vertus éclatent,

Et pour forcer la Flandre à prendre un joug plus doux

Les pals les plus ferrés font paffage à fes coups.
Mais où va m'emporter un zéle téméraire,
A quoi m'expose-t'il, & que prétens-je faire,
Lorfque tant de grands noms tant d'illuftres ex-

ploits

Tant de Héros enfin s'offrent tous à la fois? Magnanimes guerriers, dont les hautes merveilles Lafferoient tout l'effort des plus fçavantes veilles, Bien que votre valeur étonne l'Univers

Qu'elle mette vos noms au-deffus de mes Vers, Vos miracles pourtant ne font point des miracles; L'exemple de Louis vous leve tous obstacles: Marchez dellas fes pas, fixez fur lui vos yeux, Vous n'avez qu'à le voir, qu'à le fuivre en tous

lieux,

Qu'à laiffer faire en vous l'ardeur qu'il vous infpire,

Pour vous faire admirer plus qu'on ne vous admire. Cette ardeur qui des Chefs paffe aux moindres foldats,

Anime tous les cœurs, fáit agir tous les bras; Tout eft beau, tout eft doux fous de fi grands aufpices,

La peine a fes plaifirs, la mort a fes délices,
Et de tant de travaux qu'il aime à
partager,
On n'en voit que la gloire, & non pas le danger.
Il n'eft pas de ces Rois qui loin du bruit des armes
Sous des lambris dorés donnent ordre aux allarmes,

Et traçant en repos d'ambitieux projets
Prodiguent à couvert le fang de leurs Sujets.
Il veut de fa main propre enfler fa renommée,
Voir de fes propres yeux l'état de fon Armée,
Se fait à tout fon Camp reconnoître à la voix
Vifite la Tranchée, y fait fuivre fes loix:
S'il faut des affiégés repouffer les forties,
S'il faut livrer affaut aux places investies,
Il montre à voir la mort, à la braver de près,
A méprifer par-tout la grêle des moufquets,
Et lui même effuyant leur plus noire tempête
Par fes propres périls achete fa conquête.

Tel le grand faint Louis, la tige des Bourbons,
Lui-même du Soudan forçoit les bataillons,
Tel fon ayeul Philippe acquit le nom d'Augufte
Dans les fameux hazards d'une guerre auffi jufte,
Avec le même front, avec la même ardeur
Il terraffa d'Othon la fuperbe grandeur,
Couvrit devant fes yeux la Flandres de ruïne,
Et du fang Allemand fit ruiffeler Bovines.

Tel enfin grand Monarque, aux campagnes d'Yvry, Tel en mille autres lieux l'invincible Henry De la Ligue obftinée enfonçant les cohortes Te conquit de fa main le fceptre que tu portes. Vous, fes premiers Sujets, qu'attache à son côté La fplendeur de la race ou de la dignité, Vous dignes Commandants, vous dextres aguerries,

Troupes aux champs de Mars dès le berceau nour

ries,

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