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Ils font de jour en jour nouvelle peine à croire, Ils vont de marche en marche au-delà des projets, Laffent, la Renommée, épouvantent l'Hiftoire, Préviennent l'efpérance, & paflent les souhaits.

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Pourfuis, digne Monarque, & rends-lui tous les Temples,

Fais lui d'heureux Sujets de ceux qu'il t'a foumis; Et comme il met ta gloire au-deffus des exemples Mets la fienne au-deffus de tous les ennemis.

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Mille autres à l'envi peindront ce grand courage, Ce grand art de régner qui te fuit en tout lieu, Je leur en laiffe entre eux difputer l'avantage, Et ne veux qu'admirer en toi le don de Dieu.

LES

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L

Es douceurs de la Paix, & la pleine abondance
Dont fes tranquilles foins comblent toute la
France,

Sufpendoient le courroux du plus grand de fes
Rois;

Ce courroux für de vaincre, & vainqueur tant de fois.

Vous l'aviez éprouvé, Flandre, Hainault, Lor

raine,

L'Espagne & fa lenteur n'en refpiroient qu'à peine;
Et ce triomphe heureux fur tant de Nations
Sembloit mettre une borne aux grandes actions.
Mais une fi facile & fi prompte victoire
Pour le Victorieux n'a point affez de gloire :
Amoureux des périls, & du pénible honneur,
Il ne fçauroit goûter ce rapide bonheur :

* Ces Vers furent imprimés à Paris, chez de Luyne & Benard, avec le Latin dù Fere de la Rue, en 1672, in-8°

C

Il ne fçauroit tenir pour illuftres conquêtes
Des murs qui trébuchoient fans écrafer de têtes,
Des Forts avant l'attaque entre ses mains remis,
Ni des Peuples tremblans, pour juftes Ennemis.
Au moindre fouvenir qui peigne à fa vaillance
Chez tant d'autres vainqueurs la fortune en ba
lance,

Les triomphes fanglants & long-temps difputés,
Il voit avec dédain ceux qu'il a remportés.
Sa gloire inconfolable après ces hauts éxemples,
Brûle d'en faire voir d'égaux, ou de plus am-
ples;

Et jaloufe du fang verfé par fes Guerriers

Se reproche le peu que coûtent fes Lauriers. Pardonne, grand Monarque, à ton deftin propice,

Il va de fes faveurs corriger l'injustice;

Et t'offre un ennemi fier, intrépide, heureux,
Puiffant, opiniâtre, & tel que tu le veux.

Sa fureur fe fait craindre aux deux bouts de la Ter

re,

Au Levant, au Couchant elle a porté la guerre:
L'une & l'autre Java, la Chine, & le Japon
Frémiffent à sa vûë, & tremblent à fon Nom.
C'est ce jaloux ingrat, cet infolent Batave,
Qui te doit ce qu'il eft, & hautement te brave;
Il te déchire, il arme, il brigue contre toi,
Comme s'il n'afpiroit qu'à te faire la Loi.

Ne le regarde point dans fa baffe origine,
Confiné par mépris aux bords de la Marine :

S'il n'y fit autrefois la guerre qu'aux poiffons,
S'il n'y connut le fer que par fes hameçons;
Sa fierté maintenant au-deffus de la rouë
Méconnoît fes Ayeux qui rampoient dans la bouë.
C'eft un Peuple ennobli par cent fameux exploits,
Qui ne veut adorer, ni vivre qu'à fon choix;
Un Peuple qui ne fouffre Autels ni Diadémes,
Qui veut borner les Rois, & les régler eux-mê-

mes:

Un Peuple enflé d'orgueil & gorgé de butin,
Que fon bras a rendu maître de fon destin;
Pirate univerfel, & pour gloire nouvelle,
Affocié d'Espagne, & non plus fon Rebelke.

Sur ce digne ennemi venge le Ciel, & toi, Venge l'honneur du Sceptre & les droits de la Foi. Tant d'illuftres fureurs, tant d'attentats célébres L'ont fait affez gémir chez lui dans les ténébres; Romps les fers qu'elle y traîne, & rends-lui le plein jour,

Régne, & fais y régner le vrai culte à fon tour.

Ce grand Prince m'écoute, & fon ardeur guer

riére

Le jette avidement dans cette afpre carrière;
La juge avantageufe à montrer ce qu'il est,
Et plus la courfe eft rude, & plus elle lui plaît.
Il s'oppofe déja des troupes formidables,

Des Oftendes, trois ans à tout autre imprénables,
Des Fleuves teints de fang, des champs fémés da

corps,

Cent périls éclatans, & mille affreufes morts.

Car enfin, d'un tel Peuple, à lui rendre justice,
Après une fi longue & fi dure Milice;
Après un fiécle entier perdu pour le dompter,
Quelle plus foible image ofe fe préfenter?
Des orageux reflus d'une Mer écumeufe ;

N

Des trois canaux du Rhin, de l'Iffel, de la Meufe,
De ce climat jadis fi fatal aux Romains,

Et qui défie encor tous les efforts humains:
De ces flots fufpendus, où l'Art foûtient des rives
Pour noyer les vainqueurs dans les plaines capti-

ves;

De cent bouches par-tout fi prêtes à tonner,
Qui peut fe former l'ombre, & ne pas s'étonner?
Si ce Peuple au fécours attire l'Allemagne,

S'il joint le Mein au Tage, & l'Empire à l'Espagne;
S'il fait au Dannemarck craindre pour fes deux
Mers;

Si contre nous enfin, il ligue l'Univers,,

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Que fera-ĉe? Mon Roi n'en conçoit point d'alar

mes,

Plus l'orage groffit, plus il y voit de charmes :
Son ardeur s'en redouble au lieu de s'arrêter,
Il veut tout reconnoîtrre, & tout exécuter,
Et préfentant le front à toute la tempête,
Agir également du bras & de la tête.

La même ardeur de gloire emporte fes Sujets,
Chacun veut avoir part à fes nobles projets ;
Chacun s'arme, & la France en guerriers fi fécon
de,

Jamais fous fes Drapeaux ne rangea tant de monde.

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