de S. Jacques un Tableau d'Autel; dans le temps des Révolutions & de la destruction des Eglifes, 1366. ce Tableau fut épargné, mais gâté par l'ignorance d'un Barbouilleur, qui le choifit pour écrire en lettres d'or les Tables de la Loi de Moïfe. Malgré cet accident, le Tableau a été nettoyé avec précaution ; & par le fecret d'enlever le mordant de la couleur d'or on l'a réchappé. Le temps de la mort de Hugues eft ignoré, ainfi que le lieu de fa fépulture.

ALBERT

VAN OU WATER.

| Lbert van Ouwater né en la Ville d'Harlem,

Ville, du temps même des van Eyck, ou peu après: Il peignit dans la principale Eglife, à côté du grand Autel, un Tableau pour la Chapelle des Pelerins, reprefentant Saint Pierre & Saint Paul; Les figures font grandes comme nature; il avoit tracé au-deffous de ce Tableau un Payfage où l'on voyoit des Pélerins, les uns fe livrant au repos & les autres faifant un repas champêtre; le tout étoit bien traité, tant pour le deffein que pour la couleur: Les extrémités font très-finies & les draperies affez bien rendues, le Paysage fur-tout paffoit pour le meilleur du tems; & felon le rapport des Peintres anciens, ceux d'Harlem ont été les premiers Payfagiftes de bon goût, Albert a peint

encore

1366.

encore la réfurrection du Lazare: Van Mander en a vu une copie ébauchée & a jugé que la figure étoit bien deffinée pour le temps, quoique nue; le fond étoit d'une belle architecture, & les Apôtres & les femmes d'une belle expreffion. Hemskerck a fouvent été voir & admirer ce Tableau avec son fils, fon Eleve, sans pouvoir s'en raffafier. Les Efpagnols en enleverent furtivement l'original, ainfi que d'autres morceaux auffi précieux, lorsqu'ils eurent pris la Ville d'Harlem.

GUERARD

DE SAINT JEAN,

A!

ELEVE D'OUWATER,

L BE R T d'Ouwater joint à la gloire d'avoir excellé dans fon Art, celle d'avoir fait un Eleve du plus grand mérite: Il fut nommé Guerard d'Harlem, parce qu'il nâquit en cette Ville, ou Guerard de S. Jean, parce qu'il demeuroit dans un Couvent de ce nom, fans avoir été de cet Ordre : Il étoit né Peintre & quoiqu'il n'ait vécu que 28 ans, il a égalé fon Maître & il l'a même furpaffé dans l'ordonnance de fes fujets, dans le Deffein & dans l'expreffion : Il fit dans l'Eglife de S. Jean, au grand Autel, un Tableau dont le fujet eft notre Seigneur crucifié. Il avoit peint une Defcente de Croix fur un des volets, & fur l'autre un fujet différent. Il n'échappa à la fureur du Soldat, dans l'affaut de la Ville d'Harlem, que

les

les volets de ce Tableau, qui font chez le Commandant, dans le nouveau Bâtiment : Celui qui 1366. représente la defcente de Croix, est d'une grande beauté; tout y eft furprenant pour les expreffions; la douleur y eft peinte fur les phyfionomies des Marie & des Apôtres, avec beaucoup d'art & de vérité. Les Artistes du temps regardoient cet Ouvrage comme le plus beau Tableau du fiécle. L'Auteur fçavoit bien la perfpective: Il avoit peint l'Eglife d'Harlem de façon à tromper l'œil par l'effet; auffi Albert Durer, qui fut à Harlem pour voir ces Ouvrages, dit tout haut qu'il falloit être favorisé de la nature pour en venir à ce point de perfection.

DIRK

(THIERRI) D’HARLEM.

H

ARLEM donna encore le jour à Dirk: Il fut contemporain de Guerard; quelques-uns 1440. difent qu'il vécut avant lui. Il étoit habile Peintre pour ce temps. Quoiqu'Albert Durer foit plus moderne que lui, la maniere de Thierri eft auffi finie que celle de ce Peintre : Elle est beaucoup moins féche & moins tranchée (a), fi nous en croyons

van

(a) Tranchée. Le deffaut des anciens Peintres étoit d'approcher fubitement les clairs contre les ombres : Les couleurs de chair coupoient féchement fur les fonds, fans mêler moëlleusement les bords: Ce deffaut rend leurs Ouvrages plats & fans rondeur,

HANS

(JEAN) HEMMELINCK.

Carle

Arle van Mander, dans fon Hiftoire des Peintres, page 127, dit que des les premiers temps de la Peinture à l'huile, la Ville de Bruges donna le jour à Hans Memmelinck, &c.

Cet Ecrivain fe trompe, Jean Hemmelinck eft le véritable nom de cet Artiste, qui nâquit dans la petite Ville de Damme, à une lieue de Bruges. Il eft probable qu'il a vécu du temps des Freres van Eyck, ou peu après, puifque nous avons de fes Ouvrages avant 1479.

On ne fçait rien de fes premieres années & on ignore fon Maître; on dit qu'il s'enrolla par libertinage en qualité de fimple Soldat, & que fe voyant réduit à la derniere mifere dans l'Hôpital de S. Jean de Bruges, comme s'il n'eût pas eu plus de reffource que le dernier de fes Camarades, il ouvrit les yeux fur le dérangement de fa conduite,

Heft rare qu'un homme de génie refte long-temps dans le défordre. Dès qu'il fut convalescent, il 1450. peignit quelques petits Tableaux pour se récréer & pour fe procurer un peu d'argent. Il n'en falloit pas davantage pour le faire connoître : Quelques Freres de cet Hôpital, furpris de la beauté des Ouvrages du malheureux Peintre, publierent la découverte qu'ils venoient de faire, & Hemmelinck fut bientôt reconnu pour le plus habile de fon fiécle. On obtint fon Congé, & il fit un Tableau pour l'Hôpital, en reconnoiffance des foins que l'on avoit eus de lui pendant fa maladie. Ce Tableau a deux volets: Il a peint au milieu la Naiffance de notre Seigneur & les Bergers en adoration : Une architecture ruinée & de fort bon goût, reprefente l'étable de Betheléem; on apperçoit par quelques ouvertures du bâtiment, des montagnes & des lointains à perte de vue: A travers une fenêtre on voit le Portrait du Peintre, representé avec la robe des Malades: Sur un des volets il a peint des Anges qui adorent l'Enfant Jefus dans la créche, & fur l'autre volet la Prefentation au Temple. On lit fur la bordure, en gros caracteres, ÕPUS JOHANNIS HEMMELINCK, M. CCCC. LXXIX. avec fa marque ordinaire.

Ce Tableau fixa Hemmelinck à Bruges, & c'est dans ce temps qu'il peignit la Chaffe ou Reliquaire qui fe conferve dans le même Hôpital de S. Jean, avec plufieurs compartiments, dans lesquels il a rendu la vie & le martyre de Sainte Ürfule & des onze mille Vierges.

Dans le même Hôpital on voit encore un Tableau de ce Peintre : Il a deux volets, à l'ancien

ufage,