& de mort des habitans de la France; j'ai de fortes raisons pour croire que leur vie commune ou moyenne en général, est plus longue que celle que donne cet ordre, si ce n'est pour les enfans qui naissent dans les grandes Villes, dont la vie moyenne est beaucoup plus courte que celle qu'on trouve par l'ordre de M. Kerseboom; celle des enfans des villages & campagnes est beaucoup plus grande, mais différente felon les différens endroits. Pour déterminer la vie moyenne des enfans en général, il faudroit premierement la connoître pour chaque Province ou contrée séparément. Il seroit à fouhaiter que quelqu'un fût chargé de faire cette recherche, ou bien qu'il se trouvât des gens dans chaque Ville & Paroisse de campagne, qui voulussent prendre la peine d'examiner la vie commune des enfans qui y naissent. Voici comment on pourroit s'y prendre. Il y a peu de meres qui ne scachent l'âge de tous leurs enfans morts & vivans. Il faudroit donc qu'on demandat à chaque mere l'âge qu'ont chacun de leurs enfans vivans, & à quel âge font morts les autres si elles en ont de morts. Et afin d'abreger l'on marquera les enfans vivans par une ligne droite, & ceux qui font morts par une croix, avec l'âge au bout, ainsi qu'on le voit à l'exemple suivant, désignant les garçons par un G, & les Filles par une F. Ayant écrit les enfans de chaque mere comme ci-dessus, on écrira vis-à-vis chaque enfant vivant, la vie moyenne qu'il a encore à vivre, prise dans l'ordre de M. Kerseboom; * ainsi dans l'exemple ci-dessus, les deux premiers font morts l'un à l'âge de 6 ans & 3 mois, & l'autre à l'âge de 4 ans & 6 mois : le troisieme enfant vit, il a 34 ans & 2 mois ; & il peut raisonnablement espérer de vivre encore 28 ans & 10 mois, comme on peut le voir par la Table XIII. & ainsi des autres enfans. * Ces vies moyennes péchant plutôt en moins qu'en plus, feront que celles qu'on trouvera, pécheront aussi plutôt en moins qu'en plus, mais en approchant plus du vrai: & comme celles de M. Kerseboom ne sont sûrement pas bien éloignées du vrai en général, on pourra regarder celles qu'on trouvera comme vraies. Ayant fait l'addition de chaque colonne, on voit que ces neuf enfans, tant les 4 morts que less vivans, ont déja vécu entre eux 145 ans & 11 mois ; & que les cinq vivans peuvent espérer de vivre encore entre eux 164 ans : ajoutant les deux sommes ensemble, on a 309 ans & II mois pour le nombre des années que ces 9 enfans auront vécu entre eux à la mort du dernier; divisant ces 309 ans & 11 mois par le nombre des enfans (10 fi on compte la fausse couche, & 9 fi on ne la compte pas) on trouvera que les enfans de cette mere auront vécu, les uns portant les autres, 31 ans, fi on y comprend la faufse couche, & 34 ans 5 mois, fi on ne la compte pas. Il ne faudroit pas ainsi chercher la vie moyenne des enfans de chaque mere en particulier; tout au plus faudroit-il la chercher pour tous les enfans d'un même Village ou d'une mê-me Paroisse, lorsque le nombre en est un peu grand. Ceux qui voudront prendre cette peine, doivent observer: 1o. De faire le plus grand recueil d'enfans qu'on pourra. 2o. De ne prendre que des meres hors d'âges d'avoir des enfans, & dont les derniers vivans ayent au moins 7 ou 8 ans. 3o. De ne prendre aucun enfant de celles qui ne se souviendront pas des âges de tous. 4°. Les enfans qui auront disparu, soit pour s'être engagés ou autrement, & dont on ne sçait s'ils font morts ou vivans, on peut les prendre comme vivans à l'âge qu'ils avoient lorsqu'ils ont disparu. 5°. Il ne faut faire aucun choix ni de Riches, ni de pauvres, non plus que des meres plus ou moins fécondes. Au défaut des meres, les peres, freres ou fœurs, peuvent souvent donner les âges qu'on demande. Les Curés des Campagnes font ceux qui pourroient faire ces recherches le plus aisément, soit par le loisir dont ils jouissent communément, soit qu'ils peuvent être aidés par les Regîtres de Baptêmes & de morts, soit enfin parce que parmi eux il s'en trouve souvent de très-intelligens. En observant tout ce que je viens de dire, j'ai fait un Recueil de plus de 3700 enfans nés à Paris: & j'ai trouvé que leur vie moyenne n'est que de 21 ans & 4 mois, en y comprenant les fausses couches, & de 23 ans & 6 mois si on ne les compte pas; c'est vraisemblablement, de toutela France l'endroit où la vie moyenne est la plus courte. J'ai des observations suffisantes pour assurer que la vie moyenne des enfans qui naissent du côté de Laon, est de plus de 37 ans, & qu'elle eft de plus de 41 ans pour les enfans qui naissent dans les Cevenes & Bas Languedoc. Si quelqu'un étoit chargé de faire cette recherche dans toutes les différentes Provinces du Royaume, outre qu'on sçauroit dans quel endroit on vit le plus long-tems, on en pourroit peut-être encore conclure que l'air y est plus pur, ou les fruits meilleurs, ou la terre moins remplie de vapeurs malignes. J'ai remarqué, & on pourra le remarquer comme moi lorsqu'on voudra y faire attention, qu'à Paris les enfans des gens riches ou aisés, y meurent moins en général que ceux du bas peuple : les premiers prennent les Nourrices dans Paris, ou dans les Villages voisins, & font tous les jours à portée de voir leurs enfans, & les soins que la Nourrice en prend; au lieu que le bas peuple qui n'a pas le moyen de payer cher ne peut prendre que des Nourrices éloignées, les peres |