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ture (24), on demande fi la figure des molécules intégrantes ou fimilaires des corps eft déterminée par l'un de leurs principes chimiques conftituans, exclufivement à tout autre; ou fi plufieurs de ces principes conftituans concourent, par leur figure particulière, à la production de la figure moyenne qui réfulte néceffairement de leur combinaison?

Cette queftion, qui ne peut être réfolue que par les faits, me paroît mériter d'autant mieux d'être approfondie, que des Minéralogiftes célè bres, tels que Wallerius (25) & Cronstedt (26), ont prétendu qu'il falloit faire une diftin&tion entre ce qui caufoit la figure d'un fel, & ce qui caufoit

(24) Il n'eft rien dans la Nature, dit très-bien M. Gri"gnon, qui ne fe caractérise par une forme effentielle » individuelle, fur laquelle le hafard n'a aucun empire. Cha"que être a une figure déterminée, caractéristique, qui, de concert avec la qualité de la fubftance, & auffi invariable » qu'elle, détermine fa propriété. La figure procède de l'effence de la fubftance; & de la figure jointe à l'effence procède la propriété de cette fubftance. Elles ont reçu l'existence dans le même instant; car la MATIÈRE NE PEUT EXISTER SANS FORME, & la matière douée d'une forme, a eu dès le premier inftant une propriété. « Mémoires de Phyfique & de Métallurgie, pag. 69.

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(25) Obfervations fur les Criftaux & les Pierres précieuses, dans la première édition de fa Minéralogie, vol. I, p. 228 de la traduction françoife.

(26) Obfervations fur les Sels, dans fon Effai d'un fyftême de Minéralogie, S. XI & CXLIII.

la criftallisation (27), celle-ci, fuivant eux, étant produite par l'acide, qu'ils affurent être fans figure,

(27) Voici le paffage de Wallerius, qui paroît en avoir reconnu lui-même le peu d'exactitude, puisqu'il l'a retranché de l'édition latine de fa nouvelle Minéralogie. » Nous répon"drons, dit-il, en peu de mots à la question, fi les cristaux »& les pierres précieuses font redevables de leur figure à "quelques fels, avec les cristaux defquels ils ont le plus de "reffemblance. Il faut, avant toutes choses, faire une diftinc. »tion entre ce qui est la cause de la cristallisation, & ce qui eft » la caufe de la figure des cristaux. On a toujours confondu ces "deux objets; & comme le fel (par ce mot fel, Wallerius » entend l'acide, ainfi qu'on le verra dans la fuite de cette re»marque) eft fans contredit la caufe de la cristallisation, fans "entrer dans de plus grandes recherches, on a prétendu que le »sel étoit aufli la caufe de la figure des criftaux & des pierres "précieuses."

(Je répondrai d'abord à Wallerius, que le fel ou l'acide n'eft pas plus la caufe de la cristallisation, que la base alkaline, terreufe ou phlogistique avec laquelle il fe combine. L'un & l'autre principe concourent également à la cristallisation. La bafe fans acide, & l'acide fans une bafe quelconque, ne produiroient jamais un feul criftal. En fecond lieu, fi le fel ou l'acide eft, comme l'affure Wallerius, la caufe de la cristalliJation, dès-lors il n'exifte aucune fubftance cristallifée qui foit fans acide ou fans fel; car fans cela, fa forme cristalline feroit un effet fans caufe, puifqu'elle ne dépend pas feulement de la base, ainsi que nous le verrons plus bas. Wallerius pourfuit ainfi :)

>>1°. Il ne paroît nullement douteux que les criftaux de roche » & les cristaux de fel ne foient formés par la combinaison d'une fubftance terreftre & d'une fubftance métallique; un acide ne "pouvant former des criftaux avant d'être uni à une base, foit "terreufe, foit métallique. « Ibid.

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(l'avoue qu'il ne m'eft pas poffible de concevoir la combi

tandis que la figure eft déterminée par la base qui fature cet acide. Si cette opinion étoit fondée, il

naifon d'une fubftance terreftre avec une fubftance métallique, fans le concours d'un acide quelconque. On aura beau entaffer des fubftances terreftres & métalliques, elles ne fe combineront jamais, fi elles n'ont été préalablement diffoutes par un menftrue acide, ou faisant les fonctions d'acide, tels qu'en certains cas l'arfenic, le mercure, &c.)

» La Chimie nous apprend, dit Wallerius, que tous les fels » & leurs cristaux font produits par différentes combinaisons de "l'acide vitriolique ou fulfureux, quoique cet acide n'ait point » de figure par lui-même. « Ibid.

(La figure de l'acide vitriolique n'eft point perceptible à nos fens, non plus que celle du phlogistique; cependant la figure octaèdre rhomboïdale du foufre, qui résulte de la combinaifon de ces deux principes, doit nous faire préfumer que l'un & l'autre de ces principes ont une figure particulière dont cet octaèdre eft le résultat. Wallerius paroft supposer ici que les acides nitreux & marin ne font que des modifications de l'acide vitriolique, comme il le dit expreffément à la page 319. „Le sel acide, dit-il, ne peut qu'être unique dans fon espèce, » & entièrement le même; ainfi l'acide qui fe trouve dans le "fel commun, le vitriol & le nitre, eft de la même nature, &c. « Voyez auffi l'obfervation 5o de la page 311 du même volume. Il ne dit rien de l'acide du phosphore, qui étoit alors peu connu.)

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2o. Pour prouver d'une façon plus convaincante, ajoute › Wallerius, que les criftaux de fel ou de roche dépendent d'une » fubftance terreftre & métallique, il fuffit de donner ici l'exemple de l'esprit de nitre. Si on unit cet efprit avec un alkali végétal pur, il fe forme un fel d'une figure prismatique hexagone, "qu'on appelle nitre ou falpêtre. Si on unit le même esprit de » nitre avec du fel marin ou avec un alkali minéral, il se forme "un fel cubique, dont la figure eft femblable à celle du fel marin. "Ne feroit-ce point la terre ou bafe alkaline qui produit les

me femble qu'en changeant d'acide, la base reftant la même, la figure du fel neutre ne devroit pas

» variétés que nous remarquons dans les criftaux de ces fels? « Ibid.

(La figure du nitre dit improprement cubique, n'est point femblable à celle du fel marin, puifque celle-ci est un cube parfaitement rectangulaire (Pl. II, fig. 1-4), tandis que l'autre eft un parallelipipède rhomboïdal (Pl. IV, fig. 1). Mais de ce que la forme du fel change avec sa nature, lorfqu'à un même acide on joint une base différente, il ne s'enfuit pas que la bafe feule foit la caufe de ce changement de forme, comme Wallerius voudroit l'infinuer; & qu'ainfi la forme refte la même lorfqu'on joint à une même base un acide différent. En effet, les formes du tartre vitriolé (Pl. VI, fig. 1-14), du nitre (PL.III, fig. 43-50), & du fel fébrifuge (Pl. II, fig. 1), ne font pas femblables, non plus que celles du fel de Glauber (Pl. III, fig. 33-42), du nitre dit improprement cubique (Pl. IV, fig. 1) & du fel marin (PL. II, fig. 1), quoique les premières foient le résultat du même alkali fize végétal, joint à trois différens acides, & que les fecondes foient le résultat du même alkali fire minéral, joint à chacun de ces mêmes acides. Il eft donc évident que la forme des criftaux n'eft produite, ni par la base feule, ni par l'acide feul, mais par le concours de l'un & de l'autre. Si la base seule donnoit la forme, les différens acides, en la faturant, n'y apporteroient aucun changement. Si cette forme étoit, au contraire, le produit de l'acide feul, il n'y auroit pas une auffi grande diverfité de formes dans les fels vitrioliques, par exemple, où le même acide eft faturé par différentes bafes; d'où l'on peut hardiment conclure que fi la forme cachée de l'acide eft modifiée par la base avec laquelle il fe combine, celle de la base l'eft auffi de fon côté par l'acide qui la fature.)

Wallerius, après avoir dit que dans les cristaux réfultans de la diffolution de l'argent & du fer par l'eau-forte, cet acide demeuroit tel qu'il étoit auparavant, ajoute: » Ce qui prouve encore

changer; auffi Wallerius affure-t-il qu'elle ne change pas; mais il est aisé de s'affurer du con

traire.

"mieux que ce ne font point les fels (les acides) qui pro» duisent la variété que nous remarquons dans les cristaux » mais qu'elle vient des métaux, c'est qu'un feu! & même métal " diffous dans différens acides, conferve toujours dans fes crif» taux la figure qu'il a adoptée, & n'en change point pour prendre " celle des fels. C'eft ainfi que le cuivre, foit qu'on le faffe dif"foudre dans l'acide nitreux, dans l'acide vitriolique ou dans "l'acide du vinaigre, produit toujours conftamment des cris», taux parallelipipèdes. De même, continue-t-il, fi on fait "diffoudre du plomb dans du vinaigre ou dans de Pesprit de "nitre, on obtiendra des criftaux polygones de la même figure. "La même chofe arrive à tous les autres métaux qui font "folubles dans différens acides, & qui peuvent s'y criftalli"fer. « Ibid.

(Quoiqu'il foit vrai de dire que la plupart des folutions métalliques par les acides, affectent, lorfqu'elles criftallifent, le parallélipipède obliquangle ou rhomboïdal, on fe tromperoit beaucoup fi l'on croyoit que ce parallélipipède eft le même dans tous ces criftaux, & qu'il s'y préfente avec la même inclinaison dans fes faces, & la même direction dans fes troncatures. Il fuffit, pour fe convaincre du contraire, de comparer les cristaux de Vénus avec ceux du nitre de cuivre & du vitriol bleu. Les parallelipipèdes rhomboïdaux du fel de faturne ne reffemblent point non plus aux précédens, ni à ceux du vitriol martial, ni même aux octaèdres aluminiformes plus ou moins complets du nitre de plomb.)

» 3°. On voit dans la Nature, dit encore Wallerius, que les » métaux mêmes affectent une figure déterminée; & l'on ne " peut alléguer aucune raifon de croire que le fel doive plus y contribuer qu'à la génération d'autres métaux qui n'affectent point de figure. » (J'avoue que ceux-ci me font inconnus.) » Le plomb, par exemple, a pour l'ordinaire une figure cubi

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