du fer ou de l'acier. Le plomb, le plus mou des métaux, n'en eft pas le plus léger. La progreffion de la dureté n'eft donc point en rapport avec celle de la denfité; mais ces deux qualités, de même que la forme criftalline, étant un produit immédiat de la combinaison, doivent exifter dans criftallifé dès l'inftant même de fa combinaifon, quels que foient d'ailleurs le climat qu'il habite & la température de ce climat.

le corps

Conftance de la forme dans les Criftaux.

Mais fi la dureté & la pefanteur spécifiques font des caractères conftans dans les criftaux, la forme polyèdre qu'affectent ces mêmes cristaux n'eft pas moins conftante dans chaque efpèce (44). Il eft vrai que ces figures font plus ou moins parfaites, plus ou moins régulières, felon les circonstances. qui ont favorifé ou dérangé le rapprochement des molécules intégrantes, & fuivant le plus ou le

(44) Salomon paroît avoir annoncé cette vérité dans ce paffage du Livre de la Sageffe: Omnia in menfurâ & pondere & numero difpofuifti. Cap. XI, . 21. Le favant Père Castel en a fait l'application fuivante : » L'univers, dit-il, n'eft qu'un nom"bre de corps proportionnés avec mesure, & qui fe tiennent » dans une espèce d'équilibre felon les lois de la pesanteur. Ainfi "le monde, pris dans toutes fes dimenfions, dans tous fes afpecs » & dans toutes fes parties, eft l'objet unique & complet des Mathématiques, « Math. univerf. 1726, in-4°.

moins

moins d'homogénéité du fluide qui les tenoit en diffolution.

Il y a tout lieu de croire que c'eft aux variétés qui fe rencontrent dans la cristallisation d'un même fel, qu'il faut attribuer le peu de progrès que l'on a fait jufqu'ici dans la connoiffance des formes propres & effentielles à chaque espèce de fel. On a cru, & des Savans illuftres l'ont répété, que des formes fi variables étoient peu dignes d'attention & n'influoient en rien fur la nature de ces fels (45):

(45) M. Bergman, dans fa Differtation de terrâ gemmarum, emploie à peu près les mêmes raifonnemens que ceux de Wallerius (voyez ci-deffus, note 27), pour prouver que dans les fels la figure n'est déterminée ni par un acide, ni par la base qui y eft jointe. " Qui falinis, dit-il, gemmas adnumerant corpori»bas, figuram potissimum refpiciunt, fed non confiderant deter>>minatas formas nullo modo à falinâ indole pendere, quamvis »præ aliis, materiæ aquâ folubiles, cryftallis fuperbiant, etenim & » metallicæ, & phlogisticæ, & terreftres tales, eafque non raro megregias, præbent, & generatim cryftallifandi facultas omni cor»pori folido competere videtur, modo adeò fubtiliter fuerint divifæ, „fufpenfæque particulæ, five humidâ, five ficcâ hoc fiat viâ, ut, » dum iterùm concrefcunt, mutuâ attra&ione fitum fymmetricum ambire queant. In ipfis falibus figuræ fpecies nec ab acido, nec "a bafi eidem adunata determinatur, &c. «Opufc. vol. II, p. 73. Voyez auffi fa Differtation de figuris crystallor. ibid. p. 16 & fuiv.

Le célèbre Cronstedt nie pareillement que les fels aient quelque influence fur la forme des criftaux pierreux; & il affure, ainfi que M. Bergman, » que les terres peuvent fe cristallifer "fans le fecours des fels, & qu'il fuffit qu'il y ait des corps mé»talliques qui cristallisent par la fufion, pour démontrer que la "forme des cristaux n'est point toujours dépendante de celle des fels. « Auffi, dit-il en parlant du fpath calcaire: » Les figures Tome I.

E

on n'a pas diftingué avec affez de foin les formes primitives des cristaux, de celles qui n'en étoient'

», des cristaux dans ce genre font bien plus variées que dans "tout autre, fans qu'on fache en donner une raifon. On n'ofe » la chercher dans les fels, où jamais perfonne ne pourra prouver " leur préfence (l'acide du spath calcaire, dont on ne se doutoit "pas du tems de Cronstedt, eft aujourd'hui bien connu); & "au contraire on eft très-porté à s'imaginer que beaucoup de » corps minéraux ont dû prendre, par accident, une figure an"guleufe à leur furface. Au refte, ajoute Cronstedt, l'exace » obfervation de ces figures fert davantage à fatisfaire la curiofité, » qu'à procurer de l'utilité. « Effai d'une nouvelle Minéralogie, traduite du Suédois, p. 26 & 27.

Lehmann répète à peu près la même chose. » Il faut avouer, "dit-il, que ces recherches géométriques ne font point d'une "grande utilité dans la Minéralogie & la Métallurgie, attendu » qu'elles ne peuvent conduire à aucuns principes dans l'hiftoire "naturelle des corps fouterrains. « Traité de la formation des métaux, p. 148 de la trad. franç. J'efpère que la prévention inspirée par d'auffi graves autorités, contre l'étude des formes criftallines, ceffera par la lecture de ce Traité. Il eft fâcheux que des Chimiftes auffi verfés dans leur art que le font ceux que je viens de citer, aient prononcé auffi légèrement fur une matière qu'ils devoient par état connoître mieux que toute autre, & qu'ils aient ainfi retardé les progrès d'une science qu'ils étoient faits pour approfondir. S'il en faut croire M. Monnet, mon fyftême fur les criftaux » a été fortement combattu par " M. l'abbé Rozier, dans un de fes Journaux de Phyfique, pour » le mois de mars 1772; & cette critique folide, ajoute-t-il, ne contribua pas peu à faire apprécier cet ouvrage, & à prémunir l'esprit des demi-favans, qui, n'ayant pas affez de connoiffance en Minéralogie, pourroient' par-là être induits en erreur aifément. Nouveau Syftême de Minéralogie, 1779, p. 36-40. J'ignore fi mon ouvrage a induit en erreur quelque demifavant; mais je fais bien que les vrais favans ont été peu fatisfaits de ce qui concerne les criftaux dans la Minéralogie de M. Monnet.

que des dérivés ou de très-légères modifications. Ainfi, quoique dans nos laboratoires les criftaux de fel marin se préfentent fouvent fous la forme de pyramides quadrangulaires creufes & renversées, la figure cubique n'en eft pas moins la forme primitive & effentielle de ce fel, puisque ces pyramides font toutes formées par la réunion de plufieurs prifmes quadrangulaires, qui font eux-mêmes compofés de cubes appliqués fucceffivement fur les côtés d'un premier cube (46).

(46) Voyez le Mémoire de M. Rouelle l'aîné fur le fel marin & fa criftallifation, dans les Mémoires de l'Académie royale des Sciences, année 1745; Homberg, fur la figure pyramidale du fel marin, Hiftoire de l'Académie royale des Sciences, année 1702, p. 18; Junkerus confpectus chimia, & le Dictionnaire de Chimie de M. Macquer, au mot Criftallifation. M. Rouelle a démontré, dans le Mémoire que je viens de citer, que les criftaux de fel marin ne prennent une forme cubique que dans l'évaporation infenfible, parce qu'alors les criftaux ne nagent point à la furface du fluide qui les tient en diffolution, mais s'y précipitent à mesure qu'ils fe forment, enforte que les premières unions falines ou le criftal primitif étant cubique, les molécules nouvelles qui s'y uniffent étant également cubiques, il doit toujours réfutter de ces unions des criftaux cubiques plus ou moins réguliers. M. de Haller dit auffi, dans fa Defcription des falines du gouvernement d'Aelen, p. 85, que la folution de fel évaporée lentement fe criftallife en cubes, & que celle qui eft évaporée par le moyen du feu, forme des pyramides creuses. M. de Haller, à l'endroit cité, donne la defcription de ces criftaux ; il y démontre que plus on évapore la faumure avec violence, & en employant le feu, plus elle perd de fon acide. Or, le fel commun fe formant en cubes forf

De même, quoique la forme effentielle & primitive des cristaux d'alun foit l'octaèdre à plans triangulaires équilatéraux, on a fouvent pris des fegmens ou des portions plus ou moins avancées de cet octaèdre pour autant de formes particulières qui n'avoient rien de commun entre elles. Il eft vrai que l'alun faturé de fa terre criftallife en cubes; mais cette forme étant un résultat manifefte de la différente proportion de fes principes conftituans, on n'en peut rien conclure contre la conftance de celle qu'il affe&te dans fon état ordinaire, c'est-à-dire, lorfqu'il eft avec excès d'acide.

Une autre particularité qui, malgré la conftance de la forme dans chaque espèce, empêche fouvent de s'y arrêter, ce font les troncatures ou facettes multipliées qui dérivent d'une forme primitive quelconque, & qui la mafquent plus ou moins.

En effet, toutes les fois que les angles d'un polyèdre font tronqués, le nombre de fes faces augmente & fa figure change. Or, on doit confidérer, dans les polyèdres ou criftaux, deux fortes d'angles, qui font, 1°. les angles folides, formés par la rencontre ou l'incidence de trois,

qu'il n'a fouffert que peu de chaleur, & en pyramides lorsqu'il a éprouvé un grand degré de chaleur, il paroîtroit, dit M. de Born, que ces derniers criftaux fe montrent dans le fel où une moindre quantité d'acide marin eft réunie avec fa base alkaline.