fens trop combien il lui manque, & combien de découvertes il reste à faire en Cristallographie, pour préfumer avoir en cette fcience tout vu, tout décrit, tout approfondi.

Je fais feulement qu'il nous refte peu de formes nouvelles à découvrir dans les genres du Gypfe, du Spath Calcaire, du Spath pefant ou féléniteux, du Spath fufible, de la Zéolite, du Cristal de roche, du Grenat & du Mica; mais, indépendamment des nouveaux genres qui font encore à découvrir, les Gemmes, les Schorls & les Feld-Spaths, promettent une abondante récolte à ceux qui feront à portée d'en faire l'objet de leurs recherches. On en peut dire autant des CRISTAUX MÉTALLIQUES, & fur-tout des CRISTAUX SALINS, dont nous ne connoiffons peutêtre pas la centieme partie, fans compter ceux qui jufqu'à préfent n'ont été décrits, que d'une manière vague & très-imparfaite.

Mais quand je dis qu'il nous refte peu

de formes nouvelles à découvrir dans les fept à huit premiers genres de pierres que je viens de citer, j'entends de ces formes qui font à facettes planes déterminées, & nullement celles qui font un produit de la Criftallifation confufe ou de l'indéterminée. Ces dernières formes varient prefque à l'infini, puisqu'elles dépendent d'une multitude de causes fecondaires ou perturbatrices qui viennent déranger plus ou moins la difpofition primordiale & régulière des molécules cristallines entr'elles.

En un mot, la forme régulière & diftinctive d'une substance quelconque étant une fois connue, la mesure de fes principaux angles étant affignée, je dis qu'il est facile d'y rapporter les variétés intermé diaires, & même celles qui font encore à découvrir dans l'intérieur de la terre. Je fuppofe, par exemple, qu'il exifte beaucoup d'autres variétés de Feld-Spath que celles que j'ai décrites & repréfentées dans. mes planches; je foutiens que ces variétés, que je n'ai point vues, offriront des an

gles droits, ainfi que des angles de 65°; de 115°, de 130° ou de 150 degrés : il y aura peut-être quelques nouveaux angles à ajouter à ceux que nous connoissons déja dans ce genre de pierre (5); mais je fuis certain que ces nouveaux angles ne s'y rencontreront jamais fans quelquesuns de ceux que je viens de citer, & qu'on pourra par ce moyen connoître en quoi la variété nouvelle diffère de celles déja décrites.

On s'appercevra facilement, en lifant mon Ouvrage, que j'ai moins cherché à rendre raison des procédés de la Nature dans la métamorphofe d'une forme primitive en plufieurs autres fecondaires ou fubordonnées, qu'à faire appercevoir les nuances & les rapports plus ou moins fenfibles qui

(5) Voyez-en la preuve dans les nouvelles variétés de feld - fpath que j'ai reçues de Roanne en Forez, depuis l'impreffion de mon fecond volume & des figures de la troifieme Planche. Elles font décrites à la fuite de l'explication des figures de cette même Planche, dans le quatrième Tome.

lient cette forme primitive à fes dérivés. Ainfi j'avance & je démontre, par la concordance des angles, qu'une telle forme est l'inverse d'une autre, qu'un tel cristal eft du nombre de ceux que j'appelle MACLES, c'est-à-dire qu'il eft produit par l'inverfion en fens contraire de l'une des moitiés de ce même cristal; mais je ne dis pas, ou du moins que très-rarement, de quelle façon je préfume que la Nature s'y prend pour produire ces inverfions. Je dis auffi qu'un tel cristal est tronqué dans fes angles folides ou dans fes bords, quoique je fache trèsbien la Nature ne commence point que par faire un cristal entier, pour le tronquer ensuite plus ou moins (6) dans l'une ou

(6) Des Novateurs en Criftallographie, qu'on peut avec raison nommer Cristalloclaftes (brise-cristaux), s'imaginent avoir fait une grande découverte en nous annonçant qu'il n'y a point de troncatures, que la Na→ ture ne tronque point, &c. Mais après l'explication trèsprécise, donnée par le docteur Démeste (vol. I. de fes Lettres, p. 338), du fens dans lequel on doit prendre ces expreffions tronquer, troncatures, &c. il est aifé de voir qu'il n'eft içi queftion que d'une difpute de mots.

l'autre de fes parties; j'exprime feulement par ce mot, l'apparence fous laquelle ce criftal s'offre à nos yeux, & j'emploie une expreffion très-connue, pour défigner une opération de la Nature qui eft encore pour nous le mystère le plus impénétrable.

Je n'ignore pas, qu'à l'imitation du célèbre Bergman, quelques phyficiens s'occupent actuellement parmi nous à démontrer par des figures & des calculs géométriques, le mécanisme de la conftruction particulière à quelques criftaux qui se laiffent divifer facilement à l'aide d'un inftrument tranchant : leurs tentatives méritent certainement d'être encouragées; mais je crois qu'avant de chercher à pénétrer le travail fecret de la Nature dans l'arrangement très-varié des molécules d'une fubftance cristalline quelconque, il faudroit. commencer par connoître & par étudier toutes les variétés de formes dont une même espèce eft fufceptible, autrement on s'expofe à donner des théories qui, quoique applicables à certaines variétés,