Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[ocr errors]

X.

à Rome.

Le féjour qu'il fit dans cette grande ville fut accompagné de beaucoup de liberalitez & d'a- AN.1536. tions très-genereufes. Car outre trois cens chaî- Liberalitez nes d'or, & fept cens medailles du même me- de l'empetal, qu'il distribua aux prélats & aux principaux eur étant habitans, les cardinaux reçurent auffi plufieurs curiofitez très-preticufes qu'il avoit apportées d'Afrique. Il n'y eut point d'églife à qui il ne fit des prefens très-considerables, foit en or, ou en argent, ou en omnemens facrez. Il mit en Bofius de dépôt l'argent neceffaire pour marier vingt-qua- Victorel. in Cefena apud tre pauvres filles, dont douze devoient avoir net ad Ciatrois cens écus chacune, & les douze autres.com. deux cens ; & il chargea cinq gentilshommes & autant de dames, de les choifir par fort parmi cent qu'on nommeroit d'abord, & qui fe deftinoient au mariage. Il fit diftribuer de trèsgrandes aumônes dans chaque quartier pendant tout le tems qu'il fejourna à Rome, excepté le premier & le dernier jour. Il annoblit plufieurs familles, & accorda aux marchands plufieurs droits & privileges confiderables, afin de pouvoir trafiquer plus avantageufement avec les fu jets de fes états.

XI.

Dans les conferences particulieres qu'il eut Sujet des avec le pape, on parla très-fecretement des af conferenfaires d'Italie, & tous deux confulterent enfem- ces entre ble fur les moïens de pacifier l'Allemagne. Paul le pape & III. difoit qu'il n'en reftoit plus d'autre que la l'empereur. guerre. Mais l'empereur qui avoit des affaires en Italie, dont il ne pouvoit fe debarraffer, qu'en cedant le duché de Milan qui faifoit le principal objet de fes penfées, alleguoit que la guerre contre les Proteftans n'étoit pas de faifon, pendant qu'on avoit à défendre Milan contre les François. Le pape qui n'avoit d'autre but que de faire tomber ce duché entre les mains de quelque Italien, & qui propofoit la guerre A S

d'Al

d'Allemagne, autant pour détourner l'empereur ANS 36. de l'entreprise de Milan, que pour opprimer les Lutheriens, comme il le difoit affez publiquement, repliqua à l'empereur, qu'en le joignant avec les Venitiens, il lui feroit aifé de faire défifter le roi de France, foit par les armes ou par la negociation. Mais Charles ayant penetré l'intention du pape, feignit adroitement de le croire, & de confentir à la guerre d'Allemagne, difant toutefois, que pour n'avoir pas tout le monde fur les bras, il falloit en juftifier auparavant la caufe, & montrer par la convocation d'un concile, que l'on avoit tenté tous les autres moïens. Le pape n'étoit pas fâché qu'aïant à le convoquer, ce fut dans un tems auquel l'Italie alloit avoir la guerre avec les François, qui avoient déja occupé la Savoye & le Piémont, parce que ce lui feroit un prétexte honnête pour environner le concile de gens armez, fous couleur de le défendre. Mais il le vouloit fous de telles conditions que le faint fiege n'en fouffrît rien.

XII.

déliberent

Il s'agiffoit donc du lieu où l'on convoqueLe pape & roit ce concile ; & le pape informé par fon l'empereur nonce Verger, que les Proteftans de la ligue enfemble de Smalkalde, avoient refolu entr'eux de ne fur le lieu vouloir absolument le concile que dans une ville du concile. de l'empire, n'eut pas de peine à témoigner à Pallav. hift. l'empereur qu'il ne fouhaitoit rien tant que de sonc. Trid. fe conformer entierement à fes defirs, fur un lib. 3. cap. article de fi grande importance, connoiffant bien que cette ardeur qu'il avoit pour la convocation d'un concile, ne procedoit que d'un grand zéle pour les interêts de Dieu, qu'ainfi il se voyoit obligé de lui faire connoître combien il étoit porté à lui donner toutes fortes de fatisfactions.

19. n.2.

XIII.

Le pape néanmoins bien-loin de nommer une Ils con- ville d'Allemagne, choifit celle de Mantoüe en

viennent

Italie,

Italie, donnant à entendre à l'empereur qu'il AN 15 36. n'y avoit point de lieu plus commode que ce- de la ville lui-là pour toutes les provinces de l'Europe qui de Manavoient interêt d'y affifter; enfuite il affigna le toue. tems de la convocation de ce concile au mois Sleidan. in de Juin de l'année suivante 1537. L'empereur comment. I. qui efperoit que le concile lui ferviroit à deux 10. p. 318. chofes, l'une à tenir le pape en bride s'il lui prenoit envie de se réunir avec la France, l'autre à reduire toute l'Allemagne à fou obéïflance, accepta volontiers la ville de Mantoüe pour le lieu du concile, & ne fit point de difficulté fur les conditions, parce qu'il lui fuffifoit qu'il y eût un concile, & qu'il lui feroit aifé de changer tout ce qui ne lui plairoit pas, & de faire confentir la plus grande partie de l'Allemagne, à la tenue & aux conditions du même concile. L'empereur étant fur le point de partir de Rome, y fut vifité par deux envoïez' de France Velli, & l'évêque de Mâcon qui étoient à Rome. Ces deux envoïez aïant appris que le pape formoit un obftacle à l'inveftiture du duché de Milan en faveur du duc d'Orleans, parce que Catherine de Medicis fa femme deviendroit par-là en poffeffion de ce duché, ce que le pape ne vouloit pas, allerent le trouver pour tâcher de lui faire changer de fentiment. Mais XIV. le pape qui n'aimoit pas la famille de Leon X. L'empereur amufe & de Clement VII. & qui ne vouloir pas ce- les ambafpendant paroître trop oppofé à ce qu'on lui fadeurs de demandoit, répondit qu'autant qu'il avoit pû France. connoître les deffeins de Charles V. ce prince Du Bellay ne lui avoit pas paru difpofé à donner le Mi. liv.5. lanez au duc d'Orleans, & qu'il falloit s'at tendre à une rupture, fi le roi ne vouloit point d'accommodement là-deffus. Velli & fon collegue qui fentoient affez ce que ce discours vouloit dire, ne laifferent pas d'aller trouver l'empe,

[blocks in formation]

reur,

AN.1536. le fuivre tous deux chez le pape, où il les in qui leur répondit, qu'ils n'avoient qu'à ftruiroit de fes intentions, & en même-tems il fit dire aux ambassadeurs de Venise qui étoient dans l'antichambre, de s'y trouver.

tre le Roi

Il entra auffi-tôt après dans la chambre du confiftoire, où le pape avoit affemblé ce jour là les cardinaux, les ambafladeurs, & tous les principaux prélats de Rome, les grands & les plus confiderables officiers de la cour imperiale: XV. car le pape croïant que le deffein de Charles Charles V. V. qui avoit demandé cette affemblée, étoit de parle con faire en public des remercimens des honneurs de France qu'il avoit reçûs à Rome, avoit donné les ordres neceffaires pour la rendre la plus nomconfiftoire, breuse qu'il feroit poffible. Le confiftoire, à la Pallavicin. referve de quatre cardinaux qui demeurerent ut fuprà avec le pape, alla recevoir l'empereur jufqu'à 3. Cap. 19. fon appartement, & l'aïant conduit au lieu Du Bellay Ordinaire, le pape averti de fa venuë defcendit liv.5.pag. pour le recevor: l'empereur après l'avoir fa 22.4.&fiv.lué, lui dit qu'il avoit à parler d'affaires d'une

en plein

8.

XVI.

extrême importance devant tout le facré college, & même publiquement, & qu'ainfi il demandoit qu'on ne fit fortir perfonne. Auffi-tôt les cardinaux s'approcherent de même que les ambaffadeurs de France, ceux de Venife derriere eux, & un peu au-delà plufieurs autres am baffadeurs, & un grand nombre de perfonnes de qualité de la cour de l'empereur, & de celle du fouverain pontife. Enfuite l'empereur fe Jeva de fon fiege, & le bonnet à la main commença un difcours en Efpagnol dans lequel il répandit toute fa bile contre les François.

[ocr errors]

Il dit d'abord que deux chofes l'avoient obliDifcours de gé de venir à Rome, l'une pour rendre les rell'empereur pects au pape, & le fupplier de vouloir affeemen plein confiftoire, bler un concile general; ce que sa sainteté lui

Mem. hift.

avoit accordé, en nommant le lieux, & fui AN.151.6. marquant le tems de fa convocation. L'autre Daniel bift: pour faire entendre au fouverain pontife, le de France. defir qu'il avoit toûjours eu pour le bien ge- tom. 5. in 4.. neral de toute la Chrétienté, d'entretenir une pag. 664.bonne amitié & fincere correfpondance avec le Belar. in roi François I. qu'il avoit tâché par toutes for comment.. ibid. ut futes de moïens d'engager ce prince, à le fe- pra. conder dans les deux deffeins que Dieu lui avoit infpirez, d'étouffer l'herefie & d'arrêter & politiq.de les progrez des Turcs, & qu'il l'avoit toûjours la maison trouvé contraire à l'un & à l'autre, qu'il ne d'Autriche lui reftoit plus d'autre voie pour le reduire à la raifon, que de fe plaindre de lui devant la plus augufte affemblée de la Chrétienté. Il en- Raynald. tra enfuite dans le recit de fes plaintes, & rap-21,ad hunc porta tour ce qui s'étoit paffé depuis les traitez ann. n.6. faits entre l'empereur Maximilien fon aïeul

& Louis XII. pour l'union des deux maisons.
Il dit que le roi lui avoit enlevé Claude de
France; qu'il lui avoit manqué de parole en
faveur de Renée qui lui étoit promise; qu'il
l'avoit engagé dans une ligue contre l'Angle-
terre pour l'abandonner enfuite; qu'il avoit
emploïé toutes fortes de moïens pour troubler
fon élection à l'empire; que la France lui avoit
fufcité Robert de la Marck & le duc de Guel-
dres pour ennemis, & qu'elle avoit fomenté les
guerres civiles d'Efpagne. Que le roi lui avoit
declaré la guerre dont il avoit été punis par

la
perte de la liberté, & que pour fortir de
prifon il lui avoit juré d'obferver exactement
fe traité de Madrid, quoiqu'il Peut violé en
tout auffi-tôt qu'il s'étoit vû en liberté. Qu'aïant
ensuite terminé leurs différends par le traité de
Cambray, le roi de France ne l'avoit pas long-
tems obfervé, qu'il avoit attaqué vigoureufe
ment le duc de Savoïe beau-frere de fa ma-
jesté

tom..s. p.

2.56.& suiv.

annal. tom.

« AnteriorContinuar »