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féjour de Calvin dans les états ne le mit mal AN.15 36. lui-même avec le pape de qui il relevoit, obligea cet heretique de s'en retourner inceffamment dans fon païs, & lui fit craindre de le déferer à l'inquifition s'il ne partoit prompte

CVII.

in vita Calvini.

ment.

neve,

Calvin chaffé de Ferrare vint en France pour Calvin s'ar- y mettre ordre à fes affaires on ne dit pas rêtca Gene- dans quelle ville il s'arrêta, fi ce fut à Paris ve & s'y établit avec ou à Noyon; mais le féjour qu'il y fit ne fut Farel. pas long; & la même année il prit le chemin Theod. Bexe de Strasbourg par la Savoïe, & s'arrêta à Geoù Farel & Viret avoient commencé à établir la religion proteftante. Farel qui fçavoit la reputation que Calvin s'étoit acquife parmi les proteftans de France, fit tant qu'il lui perfuada de s'établir à Geneve, pour l'affister dans le gouvernement de l'églife prétendue qu'il y avoit fondée, & partager entr'eux les emplois du miniftere. Sur le refus que Calvin faifoit de fe rendre, fous prétexte qu'il avoit quelques études à faire qui l'occuperoient affez, Farel lui dit le prétexte que vous m'alleguez eft frivole, & je vous annonce au nom de Dieu tout-puiffant, que fi vous refufez de travailler avec nous, vous attirerez fur vous la malediction du Seigneur, parce que vous préferez vos interêts à ceux de JESUS-CHRIST. Calvin accepta donc la commiffion de predicateur, & de profeffeur en theologie, que le magiftrat & le confiftoire de Geneve lui adrefferent du confentement du peuple, & il commença d'entrer en exercice au mois d'Août de cette année 1536.

CVILI.

Pierre de la Baume évêque de Geneve conL'évêque noiffant enfin la faute qu'il avoit commise en de Geneve quittant fa ville, fit plufieurs tentatives pour ver l'empe- y rentrer, mais le parti des heretiques groffif

vient trou

reur.

fant

fant tous les jours, elles furent inutiles: la reputation de Calvin attiroit chaque jour à Geneve de nouvelles familles, pour remplir la place des bourgeois qu'on en 'chaffoit, ou qui S'en banniffoient volontairement. On dit que Pierre de la Baume étant allé trouver l'empereur Charles V. lorfque ce prince traverfa le Piemont pour porter fes armes en France, voulut lui perfuader qu'il n'acquereroit pas. moins de gloire à dompter les Genevois, qu'il s'en étoit acquis dans fon expedition d'Afrique, & que Charles lui répondit qu'il le rétabliroit dans Geneve, après qu'il fe feroit rendu maî tre de la France. Le prelat voulant repartir à cette excufe, l'empereur l'arrêta, en lui difant: ma maison a perdu la Suiffe qui lui appartenoit, & je n'en dis rien; & vous faites bien du bruit pour avoir perdu Geneve qui n'étoit pas à vous; ce qui obligea l'évêque de fe

retirer.

AN.1536.

CIX.

reprend

Vertot hift.

L'églife de Malthe étoit toûjours fans pafteur depuis que Clement VII. & Charles V. Charles V. avoient nommé chacun de leur côté un fujet l'affaire de pour remplir ce fiege. Ghinucci nommé par le l'évêché de pape n'y refidoit pas. Bofio ou Bofius choifi Malthe. par l'empereur ne pouvoit y aller n'aïant point de Malthe de bulles. Il y avoit trois ans que cette affaire t. 3.4. 10.. duroit fans fe terminer. Enfin l'empereur char- 119. gea fon ambaffadeur à Rome d'agir conjointement avec celui de Malthe, & avec Bofius, afin d'obtenir les bulles qu'on demandoit en faveur de ce dernier. Ces miniftres ne manquerent pas d'emploïer toutes leurs follicitations pour réuffir; & le pape ne paroiffoit pas éloigné de favorifer les droits & les interêts de Pempereur; mais il tiroit l'affaire en longueur par des réponses ambigues & équivoques, fur lefquelles on ne pouvoit faire aucun fond. Bo

F 3

fius

AN.1536.

CX.

Il écrit lui

rape.

fius voïant les délais du pape alla trouver l'empereur à Naples, où il s'étoit arrêté à fon retour d'Afrique, & l'informa de l'état de fon affaire, & du refus que faifoit la cour de Rome de lui expedier des bulles. Ce rapport chagrina Charles V. qui ne pouvoit fupporter qu'on Tui refusât une chose qui lui étoit dûë de droit. Ce qui lui fit prendre la refolution d'écrire lui-même à Paul III. en termes extrémement même au forts & preffans. Il lui mande qu'au milieu des fêtes & des triomphes dont le peuple honore fes victoires, il a reffenti un vrai chagrin en voïant Bofius à Naples, & apprenant de lui le refus qu'on fait à Rome de lui expedier fes bulles pour l'évêché de Malthe; qu'il ne s'étoit déterminé à ce choix qu'après les follicitations & les inftances continuelles qu'on lui avoit fait de la part de Clement VII, dont il lui envoïe la lettre en faveur de Bofius, afin qu'il juge du procedé de fon prédeceffeur, qui après des recommandations fi preffantes, avoit nommé Ghinucci. L'empereur ajoûte qu'il avoit crû qu'auffi-tôt qu'il fe feroit vû élevé sur le fiege de faint Pierre, il n'auroit pas differé à réparer l'affront qu'il avoit reçû, & à rendre juftice à Bofius; qu'il apprend toutefois que Ghinucci continue à faire valoir les injuftes prétentions, en vertu d'une nomination mal conçue, & contre toutes les formes; au mépris de fa perfonne imperiale, du grand maître & de fon ordre; qu'il fe trouve obligé de recourir à lui, pour le fupplier de finir inceffamment cette affaire, en donnant ordre que les bulles foient expediées en faveur du chevalier qu'il a nommé. Il finit par ces paroles : je ne veux pas, faint pere, vous reprefenter que Charles V. empereur des Romains mérite cette grace de vôtre bonté paternelle, de peur qu'il

ne

He femble que je mandie ces glorieufes faveurs, AN.15 36. que vôtre fainteté fçait fi bien difpenfer par pure inclination, mais feulement je la fupplie d'être perfuadée que je fouffrirai difficilement, qu'on me dépouille de ces droits qui m'appartiennent avec raison & avec tant de juftice.

CXI.

Plaintes

Cette lettre fut envoïée par un courrier exprès à l'ambaffadeur de l'empereur à Rome, avec ordre de la rendre en main propre au pa- empereur que fait faire pe; outre cela on enjoignit à ce miniftre de au cardinal faire en forte de s'aboucher avec le cardinal Ghinucci. Ghinucci en quelque endroit hors de chez lui, & de lui faire entendre que l'empereur avoit fort défapprouvé, qu'il fe für fait nommer à l'évêché de Malthe, & qu'il fe portât comme concurrent du chevalier Thomas Bofius nom. mé auparavant par ce prince en vertu de fes droits legitimes. Qu'on avoit bien voulu l'excufer pendant la vie de Clement VII. dans la perfuafion que ce pape qui s'étoit déclaré ennemi de l'empereur, l'avoit forcé à accepter cette nomination; mais que Charles V. voïant que fous le nouveau pontificat de Paul III. il continuoit fes prétentions illegitimes, & fe fervoit de mille artifices pour exclure Bofius, ce prince étoit obligé de lui faire fçavoir, que fi fes oppofitions, qui ne pouvoient que l'irriter, empêchoient l'installation de Bofius à l'évêché de Malthe, il devoit s'affurer que ni lui, ni aucun de fes parens ou de fes amis, ne poffederoit cette dignité pendant la vie de l'empereur, & de fes fucceffeurs à la couronne de Sicile, quelques moïens qu'ils puffent emploïer pour y parvenir. Ces plaintes ne firent pas beaucoup d'impreffion fur l'efprit de Ghinucci, qui déclara qu'il vouloit fe mettre en poffeffion de l'évêché à quelque prix que ce fur. Le bruit courut même qu'on avoit donné orF 4

dre

dre d'expedier des bulles pour lui, & l'ambafAN.1536.fadeur de Charles à Rome crut devoir en avertir ce prince.

CXII.

L'empe

Sur cet avis l'empereur écrivit auffi-tôt au reur en é- grand maître de Malthe pour lui enjoindre expreffément tant à lui qu'à tout fon chapitre, grand-maî- qu'en cas qu'on leur prefentât des bulles du

crit au

we.

parle an

pape, pour prendre poffeffion de l'évêché de Malthe au nom du cardinal Ghinucci, qu'on lui envoïât ces bulles, & qu'on ordonnât à celui qui en feroit le porteur, de fortir de cette ifle dans trois jours; & qu'en cas que la cour de Rome fût indignée de cette conduite, & voulût éclater; l'ordre devoit lui laiffer le foin de l'appaifer, en fe fervant des moïens qui conviendroient à fon honneur & à celui de la religion.

CXIII. Cette fermeté de l'empereur intrigua beauLe pape en coup le pape, qui fentant bien qu'il ne pour cardinal roit rien gagner fur ce prince, prit le parti de Ghinucci, reprefenter à Ghinucci, que ne voulant pas fe & tâche de brouiller avec l'empereur, en foutenant contre le gagner les raifons legitimes qu'il alleguoit, l'entrepri

fe de fon prédeceffeur dans laquelle on connoiffoit ailément qu'il y avoit plus de paffion que de zele, il le prioit de faire reflexion qu'il n'y auroit aucune prudence à refufer à un fi grand prince une juftice qu'il demandoit comme une grace, dans un tems auquel il venoit de procurer de fi grands avantages à l'églife en reduifant les infidéles. Ghinucci entra dans les vûës du pape voïant qu'il ne pouvoit faire autrement, & il fut conclu que ce cardinal écriroit une lettre très-refpectueuse à l'empereur, pour lui déclarer que connoiffant le défir qu'il avoit qu'on fatisfit le chevalier Bofius, il re mettoit l'affaire à la décision de fa majesté, la priant feulement d'ufer envers lui de sa bonté,

&

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