AN.IS 45. Vaudois. cution avec beaucoup de rigueur; il écrivit en cour que les Vaudois des montagnes étoient D'Oppede des gens qui au lieu d'implorer la clemence du premier roi, avoient pris les armes pour s'opposer à ses prefident ordres, qu'ils avoient affemblé feize mille homrecommen- mes pour furprendre la ville de Marseille, qu'au ce la perfecution des mépris de tous les délais que la cour avoit eu la bonté de leur accorder, ils continuoient leurs De Thom. faccagemens dans le plat-païs, qu'ils brifoient hift. l. 6. & brûloient les images, autels & crucifix, avant Boucher.hift. de Provence que les officiers du roi euffent usé d'aucune ri. gueur contre eux. Qu'en un mot, ils tenoient toute la province en échec depuis long-tems, & faifoient beaucoup plus de ravages que les voleurs de grands chemins; & dans le même-tems Louis Courtin huiffier de la cour, fut envoïé pour aller demander au nom du procureur general, que l'arrêt rendu par contumace contre ces habitans, fut executé. liv. 10. l'execution de France, LXVII. Le roi irrité de ces nouvelles, & de plus Le roi or- animé par le cardinal de Tournon grand endonne nemi de la nouvelle reforme, fit expedier de de l'arrêt nouvelles lettres patentes datées du mois de rendu con- Janvier 1545. par lefquelles il ordonnoit au tr'eux parlement d'Aix d'executer l'arrêt de 15 40. fans Duplex hift. aucun retardement, & fit écrire au comman vie de Henri dant de la province de faire des levées de gens 11, en l'année de guerre, d'affembler le ban & arriere-ban & 1548. p. les gens de fes ordonnances, s'il en étoit be 497. foin, pour faire rendre obéiffance au roi & à De Thou ut la juftice, & pour purger le païs de ces heretiques. Quoique le Baron d'Oppede tint ces or dres fort fecrets jufqu'à ce qu'il eut prit tou tes les mesures neceffaires pour l'execution, les Vaudois foupçonnant que tout cet armement se faifoit contre eux, implorerent l'affistance des princes Proteftans d'Allemagne & des cantons Suiffes, qui députerent au roi pour le fupplier d'ufer 1 d'ufer de fa clemence envers ces malheureux. que Mais toute la réponse qu'ils en eurent, fut AN.1545. Il affembla le parlement le douziéme & le LXVIII. treiziéme d'Avril, & fit faire lecture des lettres, D'Oppede lit au parpatentes du roi, par lesquelles il étoit ordonné lementles ter. de mettre à execution l'arrêt donné contre ceux ordres du X 3 feu AN.1545 fuite LXIX. tans de Merindol feu de toutes parts autour d'eux, prirent fa avec leurs femmes & leurs enfans, & fe fauverent dans les bois & les montagnes. C'étoit un fpectacle digne de compaffion de voir marcher precipitamment à travers les campagnes, les vieillards avec les enfans, & les femmes qui en portoient de petits, les uns dans des berceaux, les autres entre leurs bras ou fur leur fein, & le foldat égorger cruellement tout ce qu'il rencontroit. Le premier logement de l'armée fut à faint Les habi- Falefe, d'où les habitans fe preparoient auffi à chercher leur falut dans la fuite, parce qu'ils fe fauvent. fçavoient que le vicelegat qui étoit évêque de Cruauté Čavaillon, avoit ordonné à fes gens de n'éd'Oppede. Sleidan. ut pargner perfonne; le lendemain quelques-uns fup. l. 16. p. s'échapperent à la faveur des bois. Après un $35. long & fâcheux chemin, étant arrivez dans un endroit où ils en trouverent beaucoup d'autres qui avoient pris les devans, ils n'y firent pas un long séjour, fur la nouvelle que le prefident en étoit proche; ils partirent dans le moment même, & laifferent les femmes & les enfans dans la perfuafion que les ennemis les épargneroient. En même tems on entendit des gemiffemens & des cris que les échos des montagnes rendoient plus effroïables. Ces malheureux aïant marché toute la nuit, gagnerent le fommer du mont Leberon, d'où voïant la campagne toute en feu, ils prirent le chemin de Muf. D'Oppede divifa fes troupes en deux corps, il envoïa l'un pour les fuivre, & l'autre alla à Merindol, où le prefident ne trouva qu'un jeune homme nommé Maurice le Blanc, fur lequel il déchargea toute la fureur, il le fit attacher à un olivier, & tuer à coups d'arquebuze; enfuite il fit rafer & brûler le village. On fit main-baffe fur ce qui fe trouva dans dans le voisinage fans aucune diftinction, plus de trois mille perfonnes avoient déja été égor gées en differens endroits le refte perit de Faim dans les bois, excepté un petit nombre, qui fe fauva en Suiffe & à Geneve. AN.1545. LXX. On maffa res. De Merindol, le prefident s'en alla à Cabrieres, où il n'étoit refté que foixante hom- cre cruellemes & trente femmes, qui d'abord fermerent ment ceux les portes; mais voïant arriver le canon, ils fe de Cabrierendirent la vie fauve. Et quoique le feigneur Sleidan. ut du lieu & le baron de la Garde l'euffent pro-fuprà. mis, ils furent tous faits prifonniers & mafla- De Thou in crez, même ceux qui s'étoient cachez dans lebiftor. château, ou qui, pour être plus en sûreté, s'étoient retirez dans l'églife. Tous fans refpect ni d'âge, ni de fexe, ni de lieu, ni de foi donnée furent étranglez dans une prairie voifine. Les femmes furent menées par ordre du prefident dans une grange pleine de paille, on y mit enfuite le feu ; & lorfqu'elles fe prefentoient à la fenêtre pour le jetter en bas, on les repouffoit avec des fourches, ou on les recevoit fur les pointes des hallebardes. Ceux qui fe fauverent dans les montagnes ne furent pas plus heureux, la faim & les bêtes farouches les devorerent, parce qu'on leur coupa tous les chemins, on les affiegea comme des lions dans un fort, on défendit fur peine de la vie de leur donner aucuns alimens. Ces miferables dé. puterent vers d'Oppede pour obtenir de lui la permiffion d'abandonner leurs biens, & de se retirer la vie fauve dans les pais étrangers. Le baron de la Garde quoiqu'auffi cruel que l'autre, paroiffoit flechi; mais le prefident lui répondit brufquement qu'il les vouloit tous. prendre, fans qu'aucun échappât, & les envoïer habiter aux enfers. Huit cens perfonnes perirent dans cette action. LXXI. On alla enfuite à la Cofte, dont le feigneur AN.1545 avoit promis aux habitans qu'il ne leur feroit On traite fait aucun dommage, pourvû qu'ils portaffent de même leurs armes dans le château, & qu'ils abatisceux de la fent les murailles de la ville en quatre enCofte. la De Thon st droits. Ces bonnes gens trop crédules, firent fup.1.6. ce qui leur étoit ordonné; mais à l'arrivée du Steidan. at prefident, les fauxbourgs furent brûlez fup.. 16. p. ville fut prife, & les habitans taillez en pie$36. ces, fans qu'il en restât un seul. Les femmes & les filles, qui pour se dérober à la premiere furie du foldat, s'étoient retirées dans un jardin proche le château, furent toutes violées, & fi cruellement traitées, que plufieurs moururent de faim, ou de trifteffe, ou des tourmens qu'on leur fit fouffrir. Ceux qui étoient cachez dans Muffi aïant été enfin découverts, éprouverent le même fort que les autres, & ceux qui erroient dans les forêts & fur les montagnes defertes, cherchoient plûtôt la mort que la vie dans leur retraite, aïant perdu leurs biens, leurs femmes & leurs enfans. Il y eut vingt-deux bourgs ou villages faccagez & brûlez. Enfuite on deputa par l'or dre du prefident, des commiffaires pour faire procès au refte de ces malheureux qui avoient évité la mort > dont plufieurs furent envoïez aux galeres, d'autres condamnez à de groffes amendes, & un petit nombre absous, entr'autres les fujets du feigneur du Cental, qui abjurerent publiquement leurs erreurs. LXXII. roi pour le Après un maffacre fi cruel, le prefident d'OpD'Oppede pede & les commiffaires craignant que la reladépute au tion en étant portée en cour, on n'en eut de n'être point l'horreur, & qu'on ne fit un jour de la peine recherché à ceux qui avoient conduit toute cette affaire, fur cette deputerent au roi le prefident de la Fond, pour De Thon ut charger de crimes énormes tous ceux qui avoient Jap. 1.6. affaire. été |