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grace étoit certaine, elle verfà des larmes en
abondance, & tout d'un coup elle paffa de fon AN.1536.
chagrin & de fes larmes à de grands éclats de
rire: ce qu'on attribua à des vapeurs aufquelles
elle étoit fujette. Elle demanda avec inftance
qu'on lui permît de voir le roi encore une fois
ou même de paroître en fa présence; mais loin
de le lui accorder, on fit coucher dans fa cham-
bre la dame de Boulen, femme de fon oncle,
avec laquelle elle étoit brouillée, afin de la faire
parler & de tirer d'elle quelque aveu qui pût être
rapporté au roi,

toire auffi

Le duc de Nortfolk, & quelques autres con- LVIII. feillers d'état allerent trouver la reine, & l'exa- Elle fubit minerent fur les faits qu'on lui imputoit: mais interroga elle nia pofitivement d'avoir été infidéle au roi, bien que ses & tout ce qu'elle avoüa se reduifit à quelques complices. paroles un peu trop libres, qu'elle avoit pû dire à ceux qui étoient accufez, & à quelques airsauffi trop familiers. Enfuite on interrogea les complices; Norris jura qu'il croïoit la reine innocente, & perfifta dans fon affirmation jus qu'à fa mort. Smeton dit qu'il l'avoit connu trois fois, mais il ne lui fut pas confronté. Milord Rocheford protefta qu'il n'avoit jamais commis aucun crime avec fa fœur. Cependant on condamna le milord à avoir la tête coupée, & fon corps mis en quartiers pour être expofé à la vûë du peuple. La reine fut auffi condamnée à être brûlée vive ou decapitée, felon qu'il plairoir au roi. Deux jours avant fon fupplice on lui fit confeffer qu'il y avoit eu un contract de mariage entr'elle & milord Percy, avant qu'elle épousât le roi; fur fa confeffion on prononça une fentence de divorce, qui fut donnée fecrètement. Enfuite on donna l'ordre pour la faire mourir.

Le dix-neuf Mai, elle fut conduite fur un

échaf

LIX.

échaffaut un peu avant midi. Une foule de per. AN.1536. fonnes entre lefquelles étoient les ducs de Suf. Supplice folk & de Richemont, le grand chancelier, le d'Anne de fecretaire Cromwel, le maire de Londres, les Boulen. sherifs & les magiftrats appellez Aldermans, s'y étoient rendus pour affifter à ce spectacle. Sander. de La reine ne voulut accufer perfonne, & ne dit Schifm.lib.rien des caufes de fa condamnation; elle dit pag. 153. Burnet hift. même que le roi l'avoit toûjours traitée avec de la reform.beaucoup de bonté & de douceur : elle pria les affiftans de penser favorablement pour elle & finit en prononçant ces paroles. Je recommande mon ame à JESUS-CHRIST. L'executeur lui coupa auffi-tôt la tête, & fon corps fut jetté dans un méchant coffre d'orme, & on l'enterra dans la chapelle de la tour avant midi. Son frere & ceux qui furent accufez d'avoir été fes complices eurent le même fort trois jours après, c'eft-à-dire, qu'ils eurent la tête tranchée, excepté Smeton qui fut pendu.

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Après qu'Henri VIII, eut ainsi immolé à fa haine ou à fa fureur, celle pour qui il avoit auparavant excité de fi grands troubles dans fon roïaume, il époufa dès le lendemain Jeanne de Seymour, fans fe mettre en peine des jugemens que le public pourroit former fur une conduite fi extraordinaire. La princeffe Marie La princef-fille de la reine Catherine s'accommodant au fe Marie fetems, chercha à rentrer dans les bonnes graces avec le roi.du roi, & les lui demanda par une lettre trèsBurnet hift. foumife. Henri profitant des fentimens qu'elle de la reform. exprimoit dans fa lettre, fans s'inquieter s'ils v.3.p.283-étoient dans fon cœur, lui fit figner trois arti284.

LX.

reconcilie

cles, qu'elle avoit refufez jufqu'alors. 1°. L'invalidité du mariage de Catherine fa mere. 2o. Le renoncement à l'autorité du pape. 3 La primatie du roi comme chef de l'églife Anglicane.

Cette

Cette démarche de la princeffe Marie, & l'obftination de Henri à être reconnu chef de AN.1536. l'église, firent perdre au pape Paul III. Pesperance qu'il avoit conçûe de faire révoquer tout ce qui avoit été fait en Angleterre au préjudi ce de fon autorité. Mais il connut bien-tôt que rien n'étoit capable de faire deffaifir ce prince du pouvoir qu'il avoit acquis fur le clergé; & l'ufurpation qu'il venoit de faire de la plupart des monafteres, le prouvoit affez. En effet le parlement qui s'affembla le fixiéme de Février de cette année, acheva l'ouvrage commencé, en aboliffant tout ce qui pouvoit avoir quelque rapport à la puiffance du pape, afin de ne pas laiffer le moindre prétexte de reconnoître fon autorité. Mais le roi avoit encore un autre but, qui étoit de fe rendre maître des monafteres, & de profiter de leurs biens. Il representa donc au parlement que le grand nombre de couvens dans fon roïaume, étoit à charge à l'état, & le pria fortement de vouloir remedier à ce mal par les moïens qu'on jugeroit les plus convenables. Sur cette remontrance le parlement fit un LXL acte par lequel il fupprima tous les petits mo- Supprefnafteres dont le revenu étoit au-deffous de deux petits coucens livres sterling, c'est-à-dire, huit cens cin- vents en quante écus par an. Les raifons qu'on allegua Angleterpour juftifier cette fuppreffion, furent que comme il y avoit peu de religieux dans la meilleu- de Lareform, re partie de ces maisons, ils faifoient plus ai-liv.3.p.262. fément des cabales; que d'ailleurs comme ils étoient pauvres, ils tâchoient de s'enrichir par plufieurs voies illicites; qu'ils fortoient trop fouvent de leurs monafteres, & qu'ils n'y obfervoient plus la difcipline. Par une autre loi qui fuivit, le parlement donna au roi tous ces couvens au nombre de trois cens foixante & A&t. publ. feize avec les églises, les terres, & les biens Angl. tom. qui 14. p. 575•

fion des

re.

Burnet hift.

AN.is36.qui en dépendoient, & outre cela toutes les 'maifons qui avoient été fupprimées depuis un an. La couronne acquit par-là un revenu de trente deux mille livres fterling, & plus de cent mille livres de capital en argenterie, en meubles, en ornemens d'églifes & autres choses. Pour recueillir ces revenus on érigea une nouvelle cour de juftice, fous le nom de cour des augmentations des revenus du roi, laquelle avoit un fceau particulier, & devoit être compofée d'un chancelier, d'un treforier, d'un procureur, de dix auditeurs, de dix-fept receveurs, d'un fecretaire, d'un huiffier, & d'un fergent. Cette cour pouvoit difpofer abfolument au profit du roi de toutes les terres des couvens fupprimez, hormis de celles des monafteres que ce prince voudroit conferver: mais l'on comprit ailément qu'il n'avoit pas deffein d'en demeurer là, & qu'il tendoit à fe faire donner les revenus de toutes les abbayes de fon

LXII.

roïaume.

L'affemblée du clergé s'étant tenue dans le Le clergé mois d'Avril, on y propofa de donner au peud'Angleterre donne ple la bible en Anglois. Gardiner & tous ceux au peuple la de fon parti s'oppoferent à cette propofition, bible en par cette raison, que l'ufage trop commun de Anglois. l'écriture avoit donné naiffance à toutes les he de la reform, refies, & à toutes les opinions extravagantes, liv.3.p.263.qui d'Allemagne s'étoient introduites en Angle

Burnet hift.

terre, depuis qu'on y avoit publié la version de Tindal; ils ajoûtoient encore que donner la bible au peuple dans l'état où on le voïoit, étoit lui tendre un piege très-dangereux; que pour ne le point expofer à ce malheur, & cependant l'inftruire, il falloit lui donner en langue vulgaire une courte expofition des dogmes les plus neceffaires, & les plus utiles de la foi Chrétienne, & qu'enfin cette courte expofition

lui fourniffant tout ce qu'on devoit fçavoir, on le tiendroit toûjours par-là foumis au roi & AN.1536, à l'églife pour les matieres de foi. Mais le fentiment de Cranmer l'emporta, & l'on convint qu'on prieroit le roi de commettre à des perfonnes fçavantes le foin de faire une nouvelle verfion de la bible. Ce qui fut executé. On ne fçait pas qui furent ceux à qui cette verfion fut commife.

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Henrici

Dans le même tems le roi caffa le parlement LXIII. dont les féances avoient commencé fix ans au- Tenue du paravant, cependant il se raffeinbla le huitié- parlement me de Juin fuivant. Comme ce changement fa fuccef pour regler fubit pouvoit furprendre, le chancelier dit fion. dans la premiere féance que quand le roi avoit caffé le parlement le quatorziéme d'Avril Milord. précedent, il n'avoit pas compté en affembler Herbert fi-tôt un autre mais que deux raifons Pyhit. regni engageoient, la premiere que fe fentant accable d'infirmités, & confiderant qu'il étoit mor tel, il vouloit qu'on reglât la fucceffion, pour prevenir les defordres qui arriveroient, s'il mouroit fans enfans mâles : la feconde qu'il defiroit qu'on revoquât une loi faite dans le dernier parlement pour regler la fucceffion en faveur des enfans d'Anne de Roulen. Cepen. dant le chancelier dreffa un projet de loi fur ce fujet, & ce projet aïant été goûté, les peines qu'on avoit eues d'abord à s'accorder, fe diffiperent, & la loi fut faite & acceptée. Elle revoquoit d'abord celle qui avoit été faite en faveur d'Anne de Boulen, & confirmoit les deux. fentences de divorce données pour Henri, Pune contre Catherine, l'autre contre Anne. Elle declaroit auffi illegitimes les enfans de ces deux lits, & les excluoit pour jamais de la fuccef fion > confirmant pareillement la condamnation d'Anne de Boulen & de fes complices. Elle Tome XXVIII.

D

aflu

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