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de fe faire proclamer Empereur, mais appercevant trop de difficultés dans l'exécution de ce projet, il donna ce titre au Prince Siun.

Genghizkhan n'eut pas plutôt été informé de ces troubles, qu'il réfolut de venir affiéger la capitale des Niu- tché. Tchepe-novian, avec cinq mille cavaliers, fe réunit à fon armée; ils s'approcherent du canal nommé Tfao, & tenterent de paffer le pont. Hou-cha-hou, quoiqu'obligé de se faire traîner fur un char à caufe d'une bleffure qu'il avoit au pied, défit entiérement l'avant-garde des Mogols;mais fa bleffure ne lui permettant pas de s'oppofer le lendemain aux ennemis, il en chargea Kao-ki, auquel il donna cinq mille hommes de troupes choifies. Kao-ki ne fut point affez diligent, & s'attira par-là la difgrace d'Hou-cha-hou qui vouloit le faire mourir. L'Empereur, inftruit du mérite de cet Officier, s'oppofa au deffein d'Hou-cha-hou, & Kao-ki partit avec fes. troupes, & menacé de la part d'Hou-cha-hou d'être mis à mort s'il ne battoit pas les Mogols. Lorfque Kao-ki fut en présence des ennemis, il s'éleva un vent violent du Nord, qui portoit le fable & la pouffiere dans les yeux de fes foldats. Il fut vaincu, & obligé de rentrer dans la capitale. Comme il s'attendoit à la mort, il courut avec fes troupes au palais d'Hou-cha-hou, qu'il inveftit. Celui-ci en voulant fe fauver par-deffus les murailles de fon jardin, tomba, fe caffa une jambe, & fut arrêté par les foldats de Kao-ki qui le tuerent. Kao-ki lui coupa la tête, la remit à la porte du palais de l'Empereur, & alla de ce pas se mettre entre les mains des Officiers pour être condamné à mort, mais l'Empereur lui fit grace par un édit folemnel, & le créa Généraliffime de fes armées.

Genghizkhan, après s'être informé de la fituation & des forces des Niu-tché, réfolut de les attaquer de tous côtés, pour enfuite retomber fur Yen-king leur capitale, que l'on peut regarder comme Pe-king d'aujourd'hui. Les égards qu'il avoit eus pour les Officiers Chinois qu'il avoit fait prifonniers, avoient engagé ceux-ci à prendre parti dans ses troupes, il les mit à la tête des foldats Chinois qui étoient dans fon armée, & divifa toutes les troupes en quatre corps.

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Kietai & Hatai, avec le premier, eurent ordre de camper Apr. J. C. L'an 213. au Nord d'Yen-king. Touchi, Zagatai & Oktai, fils de Genghiz Genghizkhan, allerent ravager les pays qui font au Sud &

khan.

L'an 1214.

au Sud-oueft de Peking, jufqu'au Caramoran; Potcha & Joudgicafar, frere de Genghizkhan, firent la même chose au Nord, vers le Leao-tong jufqu'à la mer ; & Genghizkhan, avec fon fils Toli, marcha vers Ho-kien-fou dans le Pet-cheli, vers Tfi-nan-fou dans le Chantong & vers d'autres places. Les Niu-tché avoient envoyé par-tout de nombreuses garnifons, & des troupes pour garder les paffages des rivieres & les gorges des montagnes. Genghizkhan fit prendre dans les villages & dans les villes qui étoient fans défense, les vieillards, les femmes & les enfans, qu'il fit mettre à la tête de fes armées. Par ce moyen, quand il fe préfenta devant les villes, les Chinois à la vûe de leurs peres, de leurs meres, de leurs femmes & de leurs enfans, refuserent de combattre, dans la crainte de répandre le fang de ceux de qui ils tenoient la vie. La défolation devint générale dans le Pet-cheli, dans le Chantong, dans le Chanfi, & dans la partie du Honan qui eft au Nord du Caramoran. Plus de quatrevingt-dix villes furent pillées ou détruites, les bourgs & les villages réduits en cendres; des milliers de perfonnes inutiles par leur âge ou leurs infirmités, furent maffacrés, & un nombre prodigieux d'enfans de l'un & de l'autre fexe furent conduits en efclavage. L'or, l'argent, les foies & tous les beftiaux furent emportés. Il n'y eut que dix villes qui réfifterent aux Mogols.

Genghizkhan, de retour du Chantong, raffembla en un feul corps toutes les troupes, alla inveftir Yen-king (a), au Nord de laquelle il fe pofta. Tous fes Généraux le folliciterent de leur accorder la permiffion de monter auffi-tôt à l'affaut; mais ce Prince, qui avoit deffein de fe retirer en Tartarie, ne voulut point y confentir. Il envoya un de fes Officiers vers l'Empereur des Niu-tché, pour lui représenter qu'il devoit fe hâter d'appaifer par des préfens confidérables la colere des Mogols, & de faire réflexion qu'il ne lui

(4) A la quatrieme lune Chinoife,

refloit

khan.

reftoit, pour , pour ainsi dire, plus que Yen-king fa capitale. Genghizkhan parloit alors én maître & impofoit la loi. Un Of Apr. J. C. ficier de l'Empereur des Niu-tché dit dans le confeil qu'il Genghizfalloit marcher à l'ennemi, parce que l'armée Mogole étoit remplie de malades, & par conféquent hors d'état de tenir long-tems la campagne. Un autre représenta au contraire, qu'il y avoit tout à craindre d'une bataille perdue, & peu d'avantages à espérer d'une victoire remportée; il ajouta, que les troupes qui avoient ailleurs leurs familles, ne penfoient qu'à fortir de la ville. L'Empereur fe rendit à cet avis, & fit propofer la paix aux Mogols. Genghizkhan y confentit, & exigea que ce Prince lui donneroit une fille du feu Empereur Yun-tfi, avec cinq cens jeunes garçons & autant de filles, trois mille chevaux, de la foie, & une fomme confidérable d'argent. Après que toutes ces chofes eurent été remises entre fes mains, il leva le fiége, & se re tira par Kou-yong-koan. Il fit mourir en route tous les jeu nes gens des deux fexes qu'il avoit faits efclaves dans les vinces de la Chine; leur nombre étoit très-considérable.

pro

L'Empereur des Niu tché avoit été fi effrayé de l'arrivée des Mogols, qu'il réfolut de tranfporter fa cour à Pienleang (a), ou Kai-fong-fou dans le Honan, malgré l'avis de fes Miniftres, qui lui représenterent que les provinces du Nord alloient être perdues fi on les abandonnoit; mais ce Prince qui avoit pris fon parti, leur répondit, que fes trésors étant épuifés, les troupes affoiblies, & les villes voifines ruinées, il ne pouvoit pas être en fûreté dans Yenking. Il partit avec fa famille & un détachement de troupes, laiffant dans fa ville le Prince héritier fon fils, & quelques Officiers pour veiller à la garde de cette capitale. Cette conduité de l'Empereur, & celle qu'il tint encore enfuite, acheva de ruiner fes affaires. Dans la route il redemanda aux trou. pes leurs chevaux & leurs cuiraffes; la plupart fe mutinerent & tuerent leur Général, elles en nommerent trois autres, parmi lesquels étoit Kanta, revinrent fur leurs pas, & s'emparerent d'un paffage à deux lieues de Peking. Ceux

La) Pien-leang étoit à peu près où eft aujourd'hui Kai-fong-fou.

Tome III.

E

L'an 1214.

khan.

des Khitans qui étoient foumis à ce Monarque, fe foule Apr. J. C. verent dans le même tems, il avoit fait trancher la tête à Genghiz- quelques Seigneurs de cette nation; plufieurs, mécontens de ces traitemens, enleverent tout ce qu'ils purent prenHift. géné. dre, & fe retirerent fur les terres de Genghizkhan. Leur des Tatars mécontentement, joint aux follicitations de Kanta, qui of frit de joindre fes troupes à celles de Genghizkhan, servirent de prétexte à ce Prince pour rentrer dans la Chine. Il étoit à Hoam-tcheou en Tartarie quand il apprit la retraite de l'Empereur des Niu-tché à Kai-fong-fou. N'écou tant alors que fon ambition, il envoya le Général Mafgan bahadur (4) pour aller joindre Kanta, & investir ensuite Yenking.

Gaubil

Auffi-tôt que l'Empereur des Niu-tché fut inftruit de la marche des Mogols, il ordonna à fon fils de quitter Yenking, & de fe rendre à Kai-fong-fou. Plufieurs Officiers s'oppoferent à ce deffein de l'Empereur, ils penfoient au contraire qu'il falloit fortifier les frontieres, & laiffer le Prince héritier dans cette ville; mais leur avis ne fut point fuivi, & le départ du jeune Prince découragea la garnifon d'Yen-king & celles de toutes les places voifines. Les Niu-tché ne pouvoient plus cacher leur foibleffe, les Empereurs de la Dynaftie des Song qui régnoient dans le Midi en profiterent pour refufer de leur payer un tribut auquel ils avoient été forcés; mais la crainte qu'ils eurent en mêmetems que les Mogols ne détruififfent entiérement les Niutché, & ne pénétraffent enfuite dans le Midi, les empêcha de fe lier avec le Roi du Tangout pour faire la guerre aux Niu-tché. Ceux-ci étoient encore en état de résister longtems aux Mogols; ils avoient dans le Leao-tong une armée de deux cens mille hommes, qui avoit repris les années précédentes plufieurs villes, & fur-tout celle de Leao-yang capitale de la Province. Genghizkhan y envoya (6) ses Généraux Mogli & Güir, tant pour foutenir Lieouko, Chef des Khitans , que pour couper la communication du Pe-tcheli avec le Leao-tong. Toute la nombreuse armée

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(a) Les Chinois le nomment Min- (b) A la neuvieme lune de l'an 12140

gan.

L'an 12140

des Niu-tché fut bientôt diffipée, moins par la force des Mogols que par la trahifon des principaux Chefs. Lieou- Apr. J. C. ko reprit Leao-yang & Mougden (a) & fe rendit à Mogli. Genghiz Ce Général, pour intimider les garnifons des autres places, khan. fit égorger un grand nombre de foldats fous prétexte qu'ils avoient trop tardé à fe foumettre, & il ne fit ceffer ce carnage que quand on lui représenta que cette conduite obligeroit les autres garnifons à fe défendre jufqu'à l'extrémité. Mogli fit plufieurs détachemens de fes troupes qui fe rendirent maîtres de tous les poftes par lefquels on eft obligé de passer pour aller du Leao-tong à la Chine, & fur la fin de l'année il s'empara de Tong-tcheou place importante fituée à l'Eft d'Yen-king.

Pour foutenir une guerre fi onéreuse, & dans laquelle les L'an 121gi Niu-tché avoient fi peu d'avantage, leur Empereur étoit obligé d'exiger de grands impôts. Plufieurs Seigneurs qui étoient mécontens fe fervirent de ce prétexte, les uns pour fe rendre aux Mogols, les autres pour devenir indépendans. D'un autre côté, les Khitans qui étoient affez puiffans dans le Leao-tong pour fe foutenir, propoferent à leur Chef Lieou-ko de fe déclarer Empereur, & de fecouer le joug des Mogols; mais Lieou-ko qui s'étoit engagé par des fermens de refter foumis à Genghizkhan, ne voulut point y confentir, il croyoit qu'en prenant ce titre ce feroit s'opposer aux volontés du Ciel, & afin qu'on ne le preffât plus fur cet article, il envoya fon fils Sie-tou avec quatre-vingt-dix chariots, qui étoient chargés de riches préfens pour Genghizkhan. Le Khan Mogol, avant que de les recevoir, les fit expofer pendant fept jours fur des feutres, comme pour prendre le Ciel à témoin de la fidélité que Lieou-ko lui juroit, il traita honorablement le Prince Sie-tou qui lui remit un état des familles qui lui étoient foumises, leur nombre montoit à fix cens mille. Sur la fin de l'année Lieou-ko vint lui-même rendre hommage à Genghizkan.

Pendant que ces chofes fe paffoient ainfi du côté des Gaubil. Khitans, les Mogols étoient occupés du fiége d'Yen-king des Latars.

(c) Cette ville étoit alors appellée Pe-king, ou Cour du Nord.

Hift. géné.

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