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Avant J. C.

Meté.

Lin-toa-fou dans le Chenfy. Il eft vrai que le Tanjou les défavoua & voulut faire paffer ceux qui les avoient faites pour des brigands, fur lefquels il n'avoit aucune autorité; mais fon deffein n'étoit que d'amufer les Chinois avec lefquels il ne vouloit pas rompre une paix, qui lui étoit néceffaire pour rétablir fes affaires, quoique dans le fond elle fut nuifible à fes fujets qui étoient tellement accoutumés à vivre de brigandages, qu'il n'y avoit que la guerre qui pût leur procurer les chofes les plus néceffaires. Comme ces incurfions fourniffoient à leurs fubfiftances, le Tanjou étoit forcé de les permettre. Les Grands de la Nation ne faifoient même aucune difficulté de les entreprendre. C'est dans cette vûe, après que l'Impératrice fut morte, & que Hiao-ven-ti lui eut fuccédé, que le Vice-Roi d'Occident $fu-ki: vint camper dans le pays d'Ortous avec un corps des L'an 177. Huns; de-là il ofa faire des courfes jufques aux portes de Si-gan-fou Capitale de l'Empire, ce qui obligea l'Empereur d'envoyer contre lui une armée de quatre vingt-cinq mille hommes. Les Huns furent chaffés; mais cette course étoit une infraction aux traités, & il falloit, pour donner quelque fatisfaction aux Chinois, punir, au moins en apparence, le Vice-Roi; c'eft ce que fit le Tanjou en le rappellant, le forçant à quitter les frontières de la Chine, & l'envoyant commander d'un autre côté où il devint plus utile aux Huns: il foumit de vastes pays, où probablement ils avoient pénétré auparavant, mais qui n'étoient point alors fujets du Tanjou.

Ven-bien

Le Vice-Roi d'Occident se rendit à la tête d'une puiffante armée dans le pays des Yue-chi. Ces Peuples, qui Sfaki avoient été battus autrefois par les Huns, furent entié- tum-kao. rement foumis dans cette guerre; ils habitoient dans le pays de Kan-tcheou, de Kua-tcheou & de Cha-tcheou qui n'étoient pas alors de la dépendance des Chinois comme ils le font aujourd'hui. De-là continuant fa marche vers le Sud-oueft, il alla foumettre les Peuples de Chenchen, qui demeuroient dans le défert de Chamo au Nord du Tibet & dans les environs du Lac de Lop, où ils vivoient, comme les autres Tartares, fous des tentes Tome I.

E

Me-té.

Sfu-ki.
Lie-tai-ki-

fu.

Avant J.C. avec de nombreux troupeaux. Les Ou-fiun, Peuples fitués à l'Occident du pays des Huns, au Nord d'Igour & le long des rivieres d'Irtifch & d'Ili, tomberent auffi fous la domination des Huns; mais ces pays malgré leur étendue & leur éloignement du principal campement du Tanjou, ne furent pas encore les bornes de fon Empire. Le Vice-Roi avec les troupes s'avança jusques chez les Hou-te, Peuples encore plus occidentaux : leur pays fitué vers le Kaptchaq en tournant un peu au Nord, produit d'excellens chevaux & beaucoup de Marthes Zibelines. Les Huns fubjuguerent encore plufieurs autres Peuples voifins, de forte qu'il paroît que les Etats de Meté s'étendoient depuis la Corée & la mer du Japon jufques aux frontieres Orientales du Kaptchaq, & peut-être même jufques au Volga; une partie de la Siberie en tirant une ligne parallele à Tobolsk lui étoit foumise. Pendant que le Vice-Roi étoit occupé à faire la conquête de ces vaftes pays, le Tanjou apportoit tous fes foins à regagner les bonnes graces de la Cour de la Chine, & à renouveller le Traité de paix. Si les, Chinois avoient eu quelque fujet d'être mécontens des irruptions faites par les Huns, le Tanjou prétendoit avoir auffi à fe plaindre des Officiers Chinois qui n'avoient pas moins contribué que les Huns à l'infraction des Traités faits depuis long-tems entre les deux Nations; il soutenoit que, dans ces courfes faites à l'infçu des deux Monarques, le plus grand tort étoit du côté des Chinois qui lui avoient fouvent porté leurs plaintes à ce fujet, fans avoir jamais voulu recevoir les excufes qu'il avoit toujours été prêt de leur faire; qu'ils avoient même arrêté fes Ambaffadeurs & rompu d'eux-mêmes la paix. Enfuite pour faire voir qu'il avoit défaprouvé la conduite du Vice-Roi; il affura l'Empereur, qu'il avoit envoyé cet Officier faire la guerre dans l'Occident. Il prit delà occafion d'annoncer à ce Prince les grandes conquêtes que les Huns venoient de faire dans la grande Boukharie, dans la Tartarie occidentale & dans la Siberie. Il comptoit vingt-fix Royaumes différens, dont les

Avant J. C.

Me-té.

Peuples étoient devenus fes Sujets. Il finit par demander que, comme la paix étoit rétablie dans fes Provinces Occidentales, il lui fût permis de renouveller les anciens Traités avec les Chinois, afin de procurer du côté de l'Orient le repos aux troupes, la tranquilité aux vieillards & la fécurité dans toutes les familles des deux Empires. L'Empereur de la Chine n'étoit pas dans l'intention Su-ki de faire la paix; des intérêts d'Etat l'en détournoient; les Huns lui paroiffoient trop voifins de la Chine, & fon deffein étoit de les en éloigner d'avantage. Ceux-ci envoyerent de nouveau des Ambaffadeurs vers l'Empereur, en même-tems les Miniftres Chinois représenterent que le Tanjou, devenu plus puiffant depuis les grandes conquêtes que fes troupes avoient faites du côté de l'Occident, ne pouvoit plus être regardé comme un de ces petits Princes de Tartarie qu'il étoit aifé de foumettre; que d'ailleurs, dans la fuppofition qu'on pût fe rendre maître de fes Etats, tout le pays n'étoit qu'une terre ftérile & inhabitable pour les Chinois; qu'ainfi, puifque tout le fang que l'on répandoit pour une conquête de cette espéce ne pouvoit produire à l'Empire aucun avantage, on ne devoit point, par entêtement & par caprice, recommencer une guerre, dans laquelle les Chinois, malgré les fuccès dont leurs entreprises pourroient être fuivies, n'avoient que. des pertes réelles à attendre, foit en hommes, foit en argent. Entrainé par ce difcours l'Empereur fe décida pour la paix; il fit fçavoir fes intentions au Tanjou, combla même d'éloges ce Prince, en le félicitant fur fon empreffement à foulager les Peuples, & fur ce qu'il fuivoit les traces de ces anciens Rois qui s'étoient rendus fi recommandables par leurs vertus. Ces fentimens, qui n'étoient dictés de part & d'autre que par l'intérêt, firent bien moins d'impreffion fur les Huns que les riches présents dont les lettres furent accompagnées.

Le Tanjou fit publier de fon côté dans tous fes Etats le Traité de paix qu'il venoit de conclure avec la Chine, & ordonna qu'il fut obfervé. Cette paix fit beaucoup de plaifir aux Chinois qui en avoient befoin.

Duhalde tome 2.

Avant J. C. (a). Depuis long-tems leurs frontieres étoient exposées aux
Meté. fréquentes irruptions des Huns. Un grand nombre de Chi-
nois avoient perdu la viedans les combats. L'Empereur pu-
blia à cette occafion un Manifeste dans lequel il se plaignoit
amerement de tous ces ravages, il s'accufoit d'en être l'au-
teur. » Si j'avois eu plus de fageffe & de
plus de fageffe & de vertu, dit-il, ils
» ne feroient pas arrivés. Dans cette continuelle amertume,
je n'ai ceffé de chercher les moyens de procurer une
paix heureufe au-dedans & au dehors; j'ai envoyé fou-
» vent des Ambaffadeurs dans la Tartarie, & je fuis par-
» venu à inspirer au Tanjou mes véritables intentions, qui
tendent également au bien des deux Nations. Il les a
comprises, il en a reconnu la droiture, & il veut con-
» tribuer de fon côté au bien commun. Nous oublions

L'an 174.

Lao-cham.
Sfu-ki.

Lie--tai-ki

Su.

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de part & d'autre le paffé, & nous nous réuniffons pour le bien de nos fujets. Etablir l'union dans fa famille, eft » un des premiers points des devoirs d'un Prince, c'eft » cette année que je puis dire enfin m'en être acquitté. Cette Déclaration ne paroît pas s'accorder avec l'averfion que ce Prince avoit marquée d'abord,& elle fembleroit être mieux placée dans la bouche du Tanjou. Quoiqu'il en foit, ce dernier ne jouit pas long-tems de la paix. A peine futelle publiée qu'il mourut, laiffant l'Empire de Tartarie à fon fils Ki-yo, qui prit le titre de Lao-cham Tanjou.

Auffi-tôt que le nouveau Tanjou fut monté fur le Thrône, Kam-mo. L'Empereur de la Chine lui envoya une Princeffe de fa famille. Son deffein étoit que le Tanjou l'épousât, & la fit déclarer Impératrice de Tartarie. La jeune Princeffe eut beaucoup de répugnance à aller demeurer chez les Huns, mais il fallut obéir, & Tchong-hang-yue fut chargé de la conduire. Cette alliance paroiffoit devoir entretenir la paix entre les deux Nations, mais le perfide Miniftre qui en avoit été l'inftrument, après s'être acquité de fa commiffion, abandonna le parti de l'Empereur de la Chine & s'attacha au Tanjou. II lui donna des confeils

(a) Ce difcours eft rapporté dans le Recueil du Pere du Halde, le Texte fe trouve dans un livre Chinois de la Bi-.

bliothèque du Roi, qui eft intitulé Kou-
ven-yuen-kien.

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qui tendoient à mettre la difcorde, & qui pouvoient devenir d'autant plus préjudiciables aux Chinois en parti- Avant J.C. culier, que le Miniftre étoit inftruit des deffeins de l'Em- Lao-cham. pereur & de la véritable fituation des affaires de la Chine. Tchog-hang-yue s'oppofoit de toutes fes forces au luxe Chinois qui commençoit à s'introduire parmi les Huns. Il en faifoit voir les conféquences dangereuses, & foutenoit que pour des peuples, qui font continuellement à chaffer dans les forêts ou à garder leurs troupeaux, les habits de peaux à caufe de leur durée étoient préférables à toutes les plus belles étoffes de foye qui fe fabriquent à la Chine; que le lait & les productions de la Tartarie fuffifoient pour la nourriture des Huns ; que s'ils adoptoient une fois les mœurs des Chinois, ne pouvant plus fe paffer alors de leurs denrées, il ne défefpéroit pas de voir un jour les Huns foumis à la Chine. C'eft ainfi qu'il ne ceffoit de représenter au Tanjou que fes fujets ne devoient point s'écarter des mœurs qui avoient toujours rendu leurs ancêtres invincibles. A ces confeils, il en joignoit d'autres qui tendoient à rendre le Tanjou plus abfolu. Il voulut qu'il eut un état éxact du nombre de fes fujets & de la quantité de leurs biens,afin que par-là il fut plus en état,lorfqu'il voudroit entreprendre quelque expédition contre la Chine, de lever de grandes armées. Devenu l'ennemi mortel des Chinois, il engageoit le Tanjou à traiter avec beaucoup de hauteur leurs Ambassadeurs. En effet lorfque l'Empereur de la Chine écrivoit au Tanjou, il s'exprimoit ainfi: L'Empereur prie refpectueusement le Grand Tanjou des Huns, &c. la grandeur des tablettes étoit déterminée. Tchong-hangyue confeilla au Tanjou de se servir de tablettes beaucoup plus grandes,& de mettre en tête,Le Grand Tanjou des Huns, engendré du Ciel & de la Terre, établi par le Soleil & la Lune prie refpectueusement l'Empereur de la Chine de &c. Dans toutes les occafions Tchong-hang-yue cherchoit à mortifier les Chinois qui étoient à la Cour du Tanjou, particulierement ceux qui étoient chargés des Ordres de l'Empereur de la Chine. Il s'efforçoit de mettre les Huns au - deffus des Chinois. Les Huns lui, difoit-on, méprisent les viêil

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