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c'est dans la piété envers Dieu que je perfifte. Le gouverneur ayant demandé du papier, écrivit cette fentence contr'elle: Puifqu'Iréne n'a pas voulu obéir aux ordres des empereurs & immoler aux dieux, qu'au contraire elle perfévére encore à présent dans la religion des Chrétiens : j'ordonne qu'elle fera présentement brulée vive, comme fes deux foeurs l'ont été.

Le gouverneur Dulcetius ayant donné cette fentence, les foldats fe faifirent d'Iréne, la menerent en un lieu élevé, où fes deux foeurs avoient fouffert le martyre; & ayant allumé un grand bucher, ils lui commanderent de monter deffus. Sainte Iréne chantant des pfeaumes & célébrant la gloire de Dieu, fe jetta dans le bucher, & y fut confommée le 25. de Mars l'an 304.

AN. 304.

trius.

LVII.

Acta

Any

ap. Sur 30. Decemb.

an. 303.n.48.

Dans la même ville de Theffalonique, il vint en penfée à une vierge chrétienne, nommée Anyfie, d'aller à Sain. Dayl'affemblée des fidéles. Comme elle paffoit par la porte de Caffandre, il s'excita un tumulte parmi le peuple. Un des gardes de l'empereur l'ayant vue, fut épris de fa & ap. Baron. beauté. Il alla au-devant d'elle & lui dit : Demeure-là, où vas-tu ? Anyfie voyant fon infolence, & penfant à la tentation, fit fur fon front le figne de la croix. Le foldat fe trouvant offenfé de fon filence, la faifit, & lui demanda rudement: Qui es-tu? où vas-tu? Je fuis, dit-elle, fervante de Jesus-Chrift, & je vas à l'affemblée du Seigneur. Je t'empêcherai bien, dit-il, d'y aller: je t'emmenerai facrifier aux dieux ; car nous adorons aujourd'hui le foleil : les païens nommoient le dimanche le jour du soleil. En difant cela, il lui arracha le voile pour découvrir fon vifage. Anyfie tâcha de l'en empêcher, & lui dit en lui foufflant au visage: Va, miférable, Jefus-Chrift te punira. Le foldat emporté de colere, tira son épée, qu'il lui passa au travers du corps V uu ij

A&ta tom. I.

par le côté. Elle tomba auffitôt par terre, tremblante & palpitante, baignée de fon fang.

On compte plufieurs autres martyrs à Thessalonique Analect. p.65. pendant cette perfécution; le plus illustre de tous eft S. Démétrius. Il fut arrêté par ceux qui étoient députés pour prendre les chrétiens. L'empereur Maximien Galérius, qui étoit à Theffalonique, alloit à l'amphithéâtre voir les gladiateurs. Comme il en étoit proche, on lui présenta Démétrius; ayant appris que c'étoit un Chrétien, il commanda qu'on le gardât-là auprès en un bain public, & alla voir les combats. Il y avoit un gladiateur nommé Lyéus que l'empereur aimoit fort, & qui paffoit pour invincible. L'empereur promit une grande récompenfe à celui qui oferoit le combattre. Un jeune homme nommé Neftor fe leva des degrès d'en haut & accepta le combat, quoique l'empereur l'en voulût détourner. Il donna à Lyéus un coup mortel, dont il tomba fur le champ ; & l'empereur en eut un tel dépit, qu'il fe leva fur l'heure, & retourna tout chagrin à son palais, fans rien faire donner à Neftor. On le fit fouvenir de Démétrius, & dans fa colere il commanda qu'on le perçât à coups de lance au même lieu où on le gardoit. Quelques hommes pieux vinrent de nuit en cachette enlever le corps du martyr, avec la pouffiere & la terre où il étoit, & le conferverent.

525

A

LIVRE NEUVIE' ME.

I.
Actes de S.

Tharaque, S.
Probus & S.

Andronic.
Acta finc.

Tarfe, métropole de Cilicie, le gouverneur Numérien Maxime étant aflis fur son tribunal, Démétrius centurion lui préfenta Tharaque, Probus & Andronic, en disant: Vous voyez, Seigneur, devant votre tribunal ceux qui ont été présentés à votre grandeur à P. 457. Pompéïople, par les fpiculateurs Eutolmius & Palladius, comme étant de la religion impie des chrétiens, défobéissans aux ordres des empereurs. Le gouverneur Maxime dit à Tharaque: Comment t'appelles-tu? Car tu dois répondre le premier, puifque tu es le premier en rang,& le plus avancé en âge. Tharaque dit: Je fuis chrétien. Maxime dit : Laiffe ce mot impie: Quel eft ton nom, dis? Tharaque dit: Je fuis chrétien. Maxime dit, frappez-le fur la bouche,& lui dites: Ne répons pas l'un pour l'autre. Tharaque dit: Je dis mon vrai nom; fi vous demandez mon nom d'ufage, mes parens m'ont nommé Tharaque,& quand je portois les armes, on me nommoit Victor. Maxime dit: De quelle condition es-tu? Tharaque répondit: Ma condition eft militaire, ma famille Romaine, je suis né à Claudiopolis en Ifaurie; & parce que je fuis chrétien j'ai maintenant quitté le fervice. Maxime dit: C'eft qu'il ne t'étoit pas permis de servir à cause de ton impiété. Qui t'a donc donné ton congé? Tharaque dit: J'ai prié Fulvion chef de file, & il m'a congédié. Maxime dit: Et moi auffi, en confidération de tes cheveux blancs, je veux te favoriser, te procurer de l'honneur & l'amitié des empereurs,pourvû que tu m'obéiffes. Approche donc & facrifie aux dieux,comme les empereurs font eux-mêmes par toute la terre. Tharaque dit:

İls fe trompent eux-mêmes, entraînés par la grande erreur de fatan. Maxime dit: Caffez-lui les machoires, pour avoir dit que les empereurs fe trompent. Tharaque dit: Je l'ai dit, & je le dis toujours, qu'ils fe trompent comme hommes. Maxime dit: Sacrifie, te dis je, aux dieux de nos peres, & quitte ta fantaisie. Tharaque dit: Je fers le Dieu de mes peres, non par des facrifices fanglans; mais par la pureté du cœur, car Dieu n'a pas befoin de tels facrifices. Maxime dit: J'ai encore pitié de ta vieilleffe, & je te confeille de quitter cette folie, d'honorer les empereurs, d'avoir du refpect pour nous, & d'obferver les loix de nos peres. Tharaque dit: Je ne m'éloigne point de la loi de mes peres. Maxime dit: Approche donc & facrifie. Tharaque dit: Je ne puis faire une impiété ; j'ai dit que j'honore la loi de mes peres. Maxime dit: Quelle autre loi y a-t-il donc, miférable? Tharaque dit: Oui, il y en a une, & vous la violez en adorant des pierres, du bois, des inventions humaines. Maxime dit: Frappez-le fur le cou, en lui disant : Quitte ta folie. Tharaque dit: Je ne quitte point cette folie qui me fauve. Maxime dit : Je te la ferai bien quitter, & je te rendrai fage. Tharaque dit : Faites ce que vous voudrez, mon corps eft en votre puissance.

Maxime dit : Otez-lui fa tunique & le battez de verges. Tharaque dit : C'est maintenant que vous m'avez rendu vraiment fage, en me fortifiant par les coups, pour me donner plus de confiance au nom de Dieu & de fon Chrift. Maxime dit: Impie & maudit, comment nie-tu les dieux,toi qui confeffes que tu fers deux dieux. Tharaque dit: Je confeffe le Dieu qui eft réellement. Maxime dit: Tu as encore nommé Dieu un certain Christ. Tharaque dit: Il est ainsi; car ce Christ est le Fils du Dieu vivant; c'est l'espérance des Chrétiens; c'est lui

qui nous fauve par les fouffrances. Maxime dit : Quitte ces vains difcours, approche & facrifie. Tharaque dit: Je ne fuis point un difcoureur, j'ai déformais foixante ans; j'ai été ainsi élevé, & je ne quitte point la vérité. Démétrius centurion dit: Mon ami, épargne-toi, crois→ moi, facrifie. Tharaque dit: Retire-toi,miniftre de fatan, & prens pour toi tes confeils. Maxime dit: Qu'on le mette aux grands fers, & qu'on le remene en prison. Amenez celui qui eft le second en âge.

Démétrius centurion dit: Levoilà, feigneur. Maxime 'dit:Laiffe à part le langage inutile,dis: Comment t'appelles-tu? Probus dit: Premierement & principalement je m'appelle chrétien, enfuite parmi les hommes on m'appelle Probus. Maxime dit : De quelle condition es-tu? Probus dit: Mon pere étoit de Thrace ; je suis né à Side en Pamphylie,je fuis du peuple & chrétien. Maxime dit: Paganus. Ce nom ne fert de rien, crois-moi, facrifie aux dieux, afin que tu fois honoré par les empereurs, & que tu aies notre amitié. Probus dit: Je n'ai pas besoin de l'honneur des empereurs, & ne me foucie pas de votre amitié. J'avois des biens confidérables, que j'ai méprifés pour fervir au Dieu vivant par Jesus-Chrift. Maxime dit: Otez-lui fon manteau, ceignez-le, étendez-le & le frappez de nerfs de bœuf. Cette maniere de ceindre les patiens, marquée même dans l'évangile, servoit apparemment à ne les Joan. xxI. 7, pas expofer nuds; on leur faifoit donc comme une cein- 18. ture de leur tunique, ou de quelque autre chose. Tandis que l'on frappoit Probus à coups de nerfs, le centurion Démétrius lui dit: Épargne-toi, mon ami, tu vois ton fang couler par terre. Probus dit: Je vous abandonne mon corps; vos tourmens me font des parfums. Maxime dit: Ne quitteras-tu pas enfin ta folie? Qu'attens-tu, miférable? Probus dit: Je ne fuis point fou, je fuis plus

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