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vité et à l'étendue des iniquités commises. Le péché, en tant qu'il établissait une barrière éternelle et infranchissable entre l'homme et Dieu, a été aboli par la sentence du pardon; mais ce second Baptême, où la justice se mêle à la miséricorde, a laissé subsister dans l'âme des traces de mal à détruire, une difformité à guérir. La flèche meurtrière ayant été arrachée, il demeure une plaie à soigner, une cicatrice à fermer. L'offense a été pardonnée, mais des restitutions sont à faire, des réparations à offrir. Les peines canoniques infligées par l'Église, les pratiques de pénitence enjointes au pécheur dans le Sacrement, les tribulations de tout genre que la Providence sème pour lui sur le chemin de la vie, les mortifications qu'il s'impose volontairement lui-même, telles sont les œuvres satisfactoires au moyen desquelles le pénitent doit s'efforcer d'achever en ce monde l'acquittement et l'expiation de son péché.

Ces œuvres, accomplies dans l'état de grâce et de justice, et vivifiées par les satisfactions de Notre-Seigneur Jésus-Christ, deviennent, selon la parole de saint Cyprien 1, des œuvres rédemptrices qui complètent la vertu du Sacrement de Pénitence. Ces œuvres, N. T. C. F., ne sont pas seulement des œuvres médicinales, elles sont et doivent être des œuvres pénitentielles, des

1 Lib. I, epist. 3.

œuvres pleines de difficulté et de labeur; comme elles ont pour objet d'offrir à Dieu une juste compensation des coupables délectations du péché, il est nécessaire qu'elles renferment de l'amertume et qu'elles contrarient le penchant de la nature; pour corriger la déviation de l'esprit, qui s'est trop inclinée vers les sens, il faut que l'esprit, par un effort contraire, entraîne les sens avec lui jusqu'à la pratique de l'immolation. L'essence des choses le veut ainsi, et l'entière épuration de l'âme est à ce prix. Que si l'homme n'achève pas cette expiation ici-bas, s'il embrasse mollement la pénitence, si la volonté ou le temps de satisfaire lui manquent, s'il est emporté du théâtre des luttes libres avant la tâche terminée, d'autres expiations plus terribles, plus douloureuses lui sont réservées à l'entrée de l'autre vie. Le Purgatoire est le séjour où se poursuivront les rigueurs de l'exigence divine. En vérité, je vous le dis, l'âme n'en sortira point qu'elle n'ait payé jusqu'à la dernière obole, et qu'elle n'ait subi des délais et des souffrances dont Dieu seul connaît l'équation et la proportion avec les droits de sa justice. Elle est jetée dans le creuset, et le Dieu de toute sainteté, dont le regard sévère trouve des taches même dans les Anges, combien plus dans ceux qui ont habité ici-bas des maisons de boue! est assis auprès du fourneau," commandant au feu d'éprouver l'or, et de l'é

purer jusqu'à ce qu'il ait dévoré les dernières traces d'imperfection et d'alliage. Ainsi, N. T. C. F., soit dans ce monde, soit dans l'autre, et le plus ordinairement dans l'un et dans l'autre, le pécheur, même pénitent et réconcilié, est poursuivi par les conséquences et les restes de son péché. Des satisfactions, des expiations formidables sont exigées de lui. A moins qu'en dehors de la vertu du Sacrement des ressources d'un autre genre ne lui soient offertes, à moins qu'une remise ou commutation bénévole de sa peine ne lui soit octroyée, à moins qu'une amnistie royale n'intervienne, il est condamné à souffrir, à souffrir longtemps peut-être et assurément beaucoup avant d'être mis en possession du bonheur qui lui est destiné.

Or, N. T. C. F., cette ressource extra-sacramentelle, cette remise totale ou partielle de la peine temporelle, cette amnistie royale, c'est précisément l'Indulgence. Tous les principes et les éléments de la doctrine chrétienne que nous venons de rappeler nous rendront facile maintenant l'intelligence de la matière.

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Il existe en effet, comme nous l'avons vu plus haut, un sureroit de satisfaction provenant des scuffrances de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et aussi de celles de sa Très-Sainte Mère et des Ss. Les satisfactions du Sauveur sont sura

hondantes, non-seulement quant à lui-même, qui n'en avait aucun besoin, mais encore quant à notre rédemption générale et particulière, attendu qu'une seule goutte du Sang rédempteur eût formé une source suffisante pour alimenter les Sacrements et pourvoir à la dispensation des grâces de tout genre jusqu'à la fin des siècles. Pareillement, les satisfactions des Saints sont surabondantes par rapport à eux-mêmes, puisque nous supposons qu'ils n'avaient pas à satisfaire personnellement dans d'aussi grandes proportions; et elles sont superflues par rapport à nous dans l'ordre de notre justification, puisqu'elles n'ont pas la vertu de nous racheter du péché, non plus que de produire ni d'augmenter en nous la grâce: la grâce ne procède et ne peut procéder que de Dieu et de son Fils incarné. Quel sera donc l'emploi, l'usage de ces valeurs si grandes, de ces richesses si précieuses? Soyez tranquilles, N. T. C. F., Dieu, qui compte tous les soupirs de ses élus, qui ordonne à ses Anges de recueillir toutes leurs 1 larmes, ne laissera pas périr le fruit de tant de saints labeurs. Et puisqu'après notre péché pardonné avec sa conséquence éternelle, il nous reste le plus souvent des dettes temporelles à payer, voici que tous ces excédants de notre Chef et de nos frères vont nous être libéralement offerts, et qu'il ne tiendra qu'à nous d'en user à notre décharge.

Jésus-Christ n'a-t-il pas donné absolument à son Église le pouvoir de lier et de délier, de pardonner et de retenir? Si donc l'Église a reçu le droit et le commandement de puiser indéfiniment dans le trésor des mérites et des satisfactions du Sauveur pour effacer les souillures et pour remettre les peines éternelles des âmes par les Sacrements, qui osera dire qu'elle n'a pas reçu l'autorisation et la faculté d'étendre sa main vers le trop plein des satisfactions de Jésus-Christ et des élus pour le reverser et l'étendre, quand elle le juge bon et convenable, aux pénitents encore grevés d'obligations et de redevances? Celui qui serait assez osé pour contester à l'Épouse de Jésus-Christ cette autorité tomberait sous le coup de ses rigueurs, et de plus il nierait une des lois fondamentales de la constitution chrétienne.

Le Concile de Trente s'exprime ainsi : « La puissance de conférer les Indulgences ayant été donnée à l'Église par Jésus-Christ, et l'Église ayant usé de cette puissance dès les premiers temps, le saint Concile enseigne que l'usage des Indulgences, très salutaire au peuple chrétien et approuvé par l'autorité des Conciles, doit être conservé; et il frappe d'anathême tous ceux qui prétendent ou qu'elles sont inutiles, ou que la puissance de les accorder n'est pas dans l'Église 1.» Après cette définition, le Chré1 Sess. XXV, continuatio session,

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