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cellule, le trouva qui pleuroit amerement. Il s'ar rêta long-tems, & voiant que fes larmes ne tariffoient point, & qu'elles ne venoient point à fon ordinaire, de tendreffe dans la priere, mais de trifteffe: il lui en demanda la cause. Le Saint lui répondit: Tout ce monaftere que j'ai bâti, & tout ce que j'ai préparé pour les freres, a été livré aux Gentils par le jugement de Dieu : à peine ai-je pû obtenir de fauver les perfonnes. Ce qui fut accompli environ quarante ans après. quand les Lombards ruinerent le monaftere du Mont-Caffin.

Outre les prédictions, on rapporte un grand nombre de miracles de faint Benoît: & entre 32 autres celui-ci. Un jour comme il étoit fortiavec les freres pour travailler aux champs, un païsan vint au monaftere outré de douleur, portant entre fes bras le corps de fon fils mort, & demandant le Pere Benoît. Comme on lui dit qu'il étoit aux champs avec les freres, il jetta le corps dé fon fils devant la porte du monaftere : & dans le tranfport de fa douleur, il courut d'une grande viteffe chercher le Saint. Si-tôt qu'il le vit, il fe mità crier Rendez-moi mon fils, rendez-moi mon fils. Saint Benoît s'arrêta & lui dit : Vous ai-je ôté vôtre fils? Le païfan répondit : Il eft mort, venez le reffufciter. Le Saint fort affligé de ces paroles, dit : Retirez-vous, mes freres, retirez-vous. Cela ne nous appartient pas, c'eft aux faints Apôtres. Mais le pere affligé perfiftoit, proteftant avec ferment, qu'il ne fe retireroit point, que le faint Abbé n'eût reffufcité fon fils. Saint Benoît lui demanda où il étoit Voila, ditil, fon corps à la porte du monaftere. Le Sainty étant venu avec fes freres fe mit à genoux, coucha fur le corps de l'enfant, & fe relevant étendit les mains au ciel, & dit : Seigneur, ne regardez pas mes pechez, mais la foi de cet

fe

hom

homme, & rendez à ce corps l'ame que vous en avez ôtée. A peine eut-il achevé fa priere, que tout le corps de l'enfant trembla à la vuë de tous les affiftans: faint Benoît le prit par la main & le rendit à fon pere plein de vie & de fanté.

XI.

Saint Benoît avoit une foeur nommée Scholaftique qui s'étoit confacrée à Dieu dès l'enfan- Ste. Scholastique. ce, & vivoit dans un Monaftere proche du fien. Elle venoit le voir une fois l'an; & il alloit la recevoir affez près de la porte du Monaftere. Il y vint donc un jour avec fes difciples, & après avoir paffé la journée à louer Dieu, & à s'entretenir de chofes faintes, ils mangerent ensemble fur le foir. Comme ils étoient encore à table, & qu'il fe faifoit tard, Scholaftique dit: Je vous prie ne me quitez point cette nuit, & que nous parlions de la joie celefte jufques à demain matin. Il répondit: Que dites-vous, ma fœur ? Je ne puis en aucune façon demeurer hors du Monaftere. Le tems étoit fort ferein: fainte Scholaftique mit fa tête fur la table, dans fes mains jointes pour prier Dieu, répandant des torrens de larmes ; & quand elle fe releva, il vint de tels éclairs, un tel tonnere, & une pluye fi violente, que ni faint Benoît ni les freres qui l'accompagnoient, ne purent mettre le pied hors de la porte de la maifon. Saint Benoît demeura donc malgré lui, & paffa la nuit avec fa foeur en converfation fpirituelle. Le lendemain ils retournerent chacun chez foi. Mais trois jours après faint c. 34% Benoît étant dans fon Monaftere, & levant les yeux, vit l'ame de fa foeur entrer au ciel en forme de colombe. Ravi de fa gloire il rendit graces à Dieu declara fa mort aux freres, & les

envoia pour apporter le corps à fon Monaftere, & le mettre dans le tombeau qu'il avoit preparé pour lui-même : afin, dit faint Gregoire, que

la

XII.

noit.

2.40.

6. 37.

la mort ne feparât pas les corps, dont les efprits avoient toûjours été unis en Dieu.

entre

Saint Benoît ne furvécut pas long-tems à fa Mort de foeur; & la même année de fa mort, il la préfaint Be- dit à quelques-uns de fes difciples, qui demeuroient avec lui; en leur recommandant le secret, & à d'autres plus éloignez, leur donnant des fignes pour la connoître. Six jours avant sa mort il fit ouvrir fon fepulchre. Auffi-tôt il fut saisi d'une fiévre violente, & comme elle augmentoit tous les jours, le fixiéme il se fit porter dans l'oratoire, fe prepara à la mort, en recevant le corps & le fang de Nôtre-Seigneur, & levant les yeux & les mains au ciel, les bras de fes difciples qui le foutenoient, il renV. Mabill, dit l'efprit en priant. Cette devotion, de fe faipraf. a. re porter à l'Eglife pour y mourir, eft remarquable, & on en voit d'autres exemples. Saint Benoît mourut le famedi vingt & uniéme de Mars 543. la veille du Dimanche de la paffion. Le même jour deux Moines, dont l'un étoit dans le Monaftere, l'autre en étoit éloigné, eurent la même vision. Ils virent un chemin couvert de tapis, & éclairé d'une infinité de flambeaux, qui s'étendoit vers l'Orient depuis le Monaftere jufqu'au ciel. Un perfonage venerable y paroiffoit, qui leur demanda, pour qui étoit ce chemin. Ils dirent qu'ils n'en fçavoient rien. C'eft, leur dit-il, par où Benoît, le bien aimé de Dieu eft monté au ciel. Il fut enterré dans l'oratoire de faint Jean-Baptifte, qu'il avoit bâti à la place de l'autel d'Apollon; & il fe fit plufieurs miracles dans la caverne de Sublac, qu'il avoit habitée.

XIII.

S. Maur

Dès le neuviéme fiecle il a paffé pour conftant, en France. qu'un Evêque du Mans avoit envoié demander à T.1. A faint Benoît quelques-uns de fes difciples, pour SS. Ben, fonder un Monaftere dans fon diócefe. Que faint

1

Benoît 1

Mau. P.

274.

Benoît lui envoia faint Maur avec Faufte & trois pref-SS. autres, cinq en tout. Qu'ils apprirent en chemin Vita S. la mort de faint Benoît : & qu'étant arrivez à Orleans, ils apprirent celle de l'Evêque du Mans, qui les avoit demandez ; & dont le fucceffeur n'étoit pas difpofé à les recevoir. Mais un Seigneur nommé Florus, particulierement cheri du Roi, leur donna une terre nommée Glanfeüil fur la Loire, dans le diocefe d'Angers; & y fit bâtir un monaftere qui fubfifte encore. Il y avoit quatre Eglifes dédiées à faint Pierre, à faint Martin, à faint Severin, & à faint Michel. Eutrope Evêque d'Angers en fit la dedicace vers l'an 550. Florus offrit à Dieu en ce monaftere fon fils Bertulfe, qui n'avoit encore que huit ans, lui-même y embraffa la vie monaftique : & plufieurs fuivirent fon exemple. Ce qui eft certain, eft que du tems du Roi Theodebert, faint Maur Diacre vint dans le diocefe d'Angers, y fonda le monaftere de Glanfeüil; & après l'avoir gouverné long-tems eut Bertulfe pour Succeffeur Saint

:

Maur mourut vers l'an 584. comme l'on croit, Martyr. R. & le quinziéme de Janvier jour auquel l'Egli- 15.Janu. fe honore fa memoire.

XIV. Mort de S. Cefaire d'Arles. Vita lib.2.

Saint Cefaire d'Arles étoit mort l'année precedente après avoir gouverné cette Eglife pendant quarante ans. Il en vécut plus de foixante & douze ; & fes infirmitez le faifoient fouvent paroître demi mort. Voiant approcher fa fin, il n. 35• demanda combien il y avoit jufques à la fête de faint Auguftin, & dit: J'efpere en Nôtre-Seigneur, que ma mort ne fera pas éloignée de la lienne, car vous fçavez comme j'ai toûjours aimẻ sa doctrine très-catholique. Il fe fit porter n. 36. fur une chaife dans le monaftere des filles, qu'il avoit fondé trente ans auparavant : fçachant que Sup. liv. la crainte de fa mort leur faifoit perdre la nour- XXXI. n. riture & le fommeil, & qu'elles ne faifoient plus 17.

Tome VII.

R

que

:

que gemir, au lieu de pfalmodier. Mais ce qu'il AN. 542. leur dit pour les confoler ne fit qu'augmenter leur affliction car il étoit aifé de voir qu'il alloit mourir. Elles étoient plus de deux cens, & leur Superieure fe nommoit Cefaire auffi-bien que la foeur de faint Cefaire, à qui elle avoit fuccedé. Le Saint les exhorta à garder fidéleAp. Ba- ment la regle, qu'il leur avoit donnée ; & par ron. an. fon teftament, que nous avons, & par fes let508.m.33. tres, il les recommande aux Evêques fes Succeffeurs & au clergé, aux gouverneurs & aux citoiens de la ville: afin que perfonne ne les inquietât à l'avenir.

Après leur avoir donné fa benediction & dit le dernier adieu, il retourna à l'Eglife metropolitaine, & mourut entre les mains des Evêques, des Prêtres & des Diacres, le troifiéme jour après la fête de faint Genés, fixiéme des calendes de Septembre, la veille de la fête de faint Auguftin, & le lendemain de la dedicace de fon monaftere: c'est-à-dire, le vingt-feptiéme d'Août .37. 542. Le peuple fe jetta fur fes habits pour les garder; à peine les Prêtres & les Diacres pûrent-ils l'empêcher de les mettre en pieces, & fes Reliques guerirent un grand nombre de malades. Saint Čefaire avoit fait quantité de mira cles de fon vivant, & il en fit encore quantité après fa mort. Il fut regreté de tout le monde, des bons & des mauvais Chrétiens, & des Juifs; & on l'enterra dans l'Eglife de fainte Marie, où étoit la fepulture des Religieufes de fon monafte re. Sa vie fut écrite incontinent après, en deux Ada SS. livres. Le premier adreffé à l'Abbeffe Cefarie la · Ben.p.658.; jeune, dont le principal auteur fut Cyprien Eve que de Toulon mais deux autres Evêques, Firmin & Viventius y travaillerent auffi. Le fecond livre fut écrit par Meffien Prêtre, & Etienne Diacre. Tous ces auteurs étoient difciples de

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