décoration de plusieurs autres Eglises. Elle étoit d'une grande vertu , & d'une grande noblesse descenduë de l'Empereur Avitus. Vers ce tems arriva la conversion des Sueves, III. qui étoient Ariens, & établis en Galice depuis fion des Conver. plus de 150. ans. Le Roi Charraric ou Theo Sueves. demir avoit un fils malade , & reduit à une Greg. telle extrémité, qu'il ne respiroit que foible- mirar, S. Marti ment. Alors le Roi dit aux liens ; Ce Martin 1.6 que l'on dit qui fait tant de miracles en Gaule, dites-moi , je vous prie , de quelle religion il étoit ? On lui répondit : Il étoit Evêque, & enseignoit à son peuple que le Fils doit étre honoré également avec le Pere & le Saint-Esprit, comme étant égal en substance. S'il est ainsi, reprit le Roi, que quelques-uns de mes fidéles amis aillent jusques à son temple, portant de grands presens; & s'ils obtiennent la guerison de mon fils, je croirai ce que ce Saint a cru, après m'être informé de la Foi catholique. 'Il fit donc peser de l'or & de l'argent autant que pesoit son fils, & l'envoia à Tours au sepulcre de saint Martin. Les envoiez étant revenus rap. porterent au Roi qu'ils y avoient vu faire plufieurs miracles , & ajoûterent : Nous ne sçavons pourquoi vôtre fils n'a pas été gueri. Le Roi comprit que son fils ne gueriroit point, qu'il ne crût JESUS-CHRIST égal à son Pere: c'est pourquoi il commença à bâtir une Eglise magnifique en l'honneur de faint Martin, & quand elle fut achevée, il dit : Si je suis assez heureux pour recevoir des reliques de ce Saint , je croirai tout ce qu'enseignent les Evêques.. Il envoia, donc encore les siens avec un plus grand present. Etant arrivez à Tours, ils demanderent des reliques. On offrit de leur en donner suivant la coûtume : c'est-à-dire , des linges ou d'autres draps, qui eussent été quel X 4 quc que tems sur le tombeau ; mais ils dirent: Permettez-nous de mettre nous-mêmes ce que nous emporterons. Alors ils mirent sur le fepulchre du Saint , une piece d'un drap de foie après Pavoir pesée, & dirent : Si nous trouvons graces devant nôtre faint Patron, ce que nous avons mis pesera demain davantage , & nous le garderons comme une benediction. Après donc avoir veillé une nuit, le lendemain matin ils peserent le drap de foie : mais le poids s'éleva autant que la balance pût monter. Comme ils emportoient cette relique avec grande folemnité, les prisonniers de la ville les entendirent chanter; ils demanderent ce que c'étoit, & on leur dit : Ce sont des reliques de faint Martin, que l'on envoie en Galice. Les prisonniers invoquerent le Saint, furent délivrez, vinrent jus ques aux reliques remercier leur Liberateur, & l'Evêque obtint du Juge leur grace. Les envoiez de Galice en eurent une grande joie, ne doutant point que le Saint ne leur fût favorable , & après une heurçuse navigation ils arriverent chez eux. Les reliques furent reçuës avec une extrême veneration : le fils du Roi parfaitement guéri vint au-devant ; le Roi reconnut l'unité du Pere & du Fils, & du Saint-Esprit, & fut oint du saint chrême, avec toute sa maison; & les lépreux, qui étoient en grand nombre dans son peuple, furent tous guéris. Il fe fit quantité de miracles en la nouvelle Eglise de faint Martin, & le peuple étoic fi zelé pour la Religion catholique, qu'il eût souffert le martyre s'il en eût eu l'occafion. C'est ainsi que cette histoire est rap portée par Gregoire, qui fut Evêque de Tours IV. environ douze ans après. Saint Mar- Cette conversion se fit principalement par les tin de Due travaux d'un autre faint Martin , que la proviForius. lib, dence fit arriver en Galice , en même tems que les me. 2. V. carm. d. Sme dopo les reliques y arrivoient. 'Il étoit de Pannonie que faint Martin de Tours ; & étant An. 562. allé en Orient visiter les faints lieux , il se ren- Greg. V. dit un des plus sçavans hommes de son tems. Ce hifts: 2; ifid, de Il. fut donc lui qui donna aux Sueves de Galice la luftr. 6.35. regle de la foi : qui affermit les Eglises, fonda Id. Chr. des monafteres , compofa des livres de picté, & écrivit grand nombre de lettres, pour exhorter les nouveaux convertis à la pratique de toutes les vertus. Saint Martin fonda entre autres le monastere de Dume , dont il porta depuis le nom: c'est un lieu proche de Brague ; où par le secours du Roi , il établit une communauté sous la regle de faint Benoît , qu'il introduisit par V. Aila. SS. Ben. consequent en Espagne. to.1.p.261. p.874. v. Concile d'Ariamir , que l'on croit être le même Theo- de Brague. demir, il se tint un concile à Brague le premier To.s.p.836. jour X 5 jour de Mai , où assisterent huit Evêques, entre An. 563. autres Martin , que l'on croit être l'Evêque de Dume. Lucretius Archevêque de Brague y prefidoit ; & d'abord il propola d'assurer la foi, par ticulierement contre les restes des Priscillianistes. Sup livi Il fit lire la lettre de faint Leon , envoiée à saint XXVII. Turibius & aux Evêques de Galice, & celle du con cile des quatre provinces à Balconius : puis on proposa dix-sept articles contre les mêmes erreurs , qui furent approuvez par le concile. Ensuite on lut les canons de discipline , tant des conciles generaux que des particuliers ; & onen publia vint-deux nouveaux dans ce concile , dont la plûpart regardent les ceremonies. Canis. En general il est ordonné d'observer par tout le même ordre dans la psalmodie, sans y mêler les coûtumes des monasteres : de dire les mêmes 4.5. leçons , & de suivre dans la Mesle & le Baptê me, la forme établie par Profuturus Evêque de Brague. Il est défendu de chanter dans l'Eglise aucune poësie hors les Pseaumes, & les Ecritu12. res saintes : ce qui semble retrancher les hym nes. Les Evêques doivent saluer le peuple par 6. 3. Dominus vobiscum comme les Prêtres, sans se distinguer. Toutefois la distinction a prévalu, & 6. 10. les Evêques disent : Pax vobis. Il n'y a que les Soûdiacres qui puissent toucher les vases facrez. 5.11. Les Lecteurs ne porteront point en chantant dans l'Eglise d'habit feculier , ni de grands cheveux comme les Gentils. Les Diacres ne cacheront point l'orarium : c'est-à-dire , l'étole ; mais le porteront sur l'épaule, pour se distinguer des Soûdiacres. Les Clercs qui ne mangent point de 8:14. chair, mangeront au moins des herbes cuites avec de la chair , pour ôter tout foupçon de *Priscillianisme. On fera trois portions des biens de l'Eglise , pour l'Evêque, pour le clergé, pour les repara tions. Ce qui est offert pour les morts, ou pour 6.7. que l'on enterre dans l'enceinte de leurs murs. Dans le même tems vivoit en Espagne un fa- VI. meux solitaire nommé Emilien , & furnommé S.Emilien S. Donat. Cucullat, apparemment à cause de son habit. Il Alta SS. étoit de basse naissance , & après avoir quelque Ben. 8o. . tems gardé les brebis, il se mit sous la discipline p. 205. d'un hermite nommé Felix : puis il retourna à Vergege petite ville d'Aragon, alors du diocese de Tarafone ou Turisone, aujourd'hui Calahorre. Ensuite il se retira dans le fond des montagnes voisines , appellées Disterces , & y pratiqua la vie monastique pendant quarante ans. Didyme Evêque de Tarasone le tira de sa folitude pour l'ordonner Prêtre , & lui donna la conduite de l'Eglise de Vergege : mais les grandes aumônes donnerent pretexte à quelques Clercs de l'accuser, comme un dillipateur des biens de l'Eglise; & l'Evêque jaloux de la vertu d'Emilien, écouta leurs plaintes , & le renvoia dans sa solitude. Il y vécut encore long-tems , faisant grand nombre de miracles , & édifiant par ses discours tous ceux qui le venoient voir. Il vécut cent ans, & mourut comme l'on croit l'an 574. Sa vie fut écrite dans le fiecle suivant par S. Braulion Evêque de Saragoce, sur le rapport de ceux qui en X6 avoient |