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Chr. Virdun. p.

261.

Ces nonces étoient Jean évêque de Tufculum, & AN. 1101. Tibere domeftique du pape. Jean, quoique Romain, XI. fut premierement chanoine regulier à S. Quentin de Norgaud évêque Beauvais puis étant revenu dans le monde, il fe fit d'Autun rétabli. moine au Bec fous la conduite de S. Anfelme. Quand pape Urbain vint en France, Jean gagna fes bonnes graces & le fuivit à Rome; il devint abbé, enfuite évêque, & enfin le pape Pascal l'envoïa en Angleterre l'an 1101. pour recueillir le denier faint Pierre. Il rencontra en chemin Hugues archevêque de Lyon qui alloit à Jerufalem, & qui étoit accompagné de l'évêque de Challon & de celui d'Autun, dépofé l'année précedente au concile de Poitiers les cardinaux legats Jean & Benoît. Comme l'archevêque n'étoit pas content de ce jugement, & s'en plaignoit publiquement, il perfuada à Jean de Tufculum de rétablir l'évêque d'Autun: en recevant fa purgation & le ferment que firent l'archevêque de Lyon & l'évêque de Challon pour en certifier la verité. Ainfi Jean de Tufculum ramena avec lui Norgaud d'Autun, & le fit rentrer dans fon diocese, où il exerça les fonctions épifcopales comme pleinement justifié.

par

L'archevêque de Lyon étant arrivé à Rome, y trouva des chanoines d'Autun qui y avoient porté leurs plaintes contre lui. Car après le départ des cardinaux il avoit excommunié ces chanoines, pour s'être pourvûs devant des juges Romains à fon préjudice, & pour avoir aliené quelques biens de leur églife, afin de fournir aux frais du procès. Ils se justifierent à Rome, le pape les renvoïa abfous, & l'archevêque de Lyon partit pour Jerusalem avec l'évêque de Die.

Cependant les cardinaux Jean & Benoît, qui étoient A N. 1101. revenus de Rome, & avoient rendu compte de leur légation, fe plaignirent hautement que l'évêque de Tufculum eût infirmé leur fentence contre l'évêque d'Autun; & leur mécontentement paffa jusques à quitter la cour. Jean se retira à Pavie dans une communauté dont il avoit été tiré : Benoît demeura à Rome dans l'églife, de fon titre.

XII. Etienne de Gar

de Beauvais.

Epift. 87.

Pendant qu'ils étoient en France, Yves de Chartres lande élû évêque leur écrivit au fujet d'Etienne de Garlande élû évêque de Beauvais. Cette églife, dit-il, eft defaccoutumée depuis fi long-tems d'avoir de bons pafteurs, qu'elle femble être en droit d'en élire de mauvais. Elle vient de prendre, fuivant la volonté du roi & de fa concubine, un clerc qui n'eft point dans les ordres facrcz; ignorant, occupé du jeu & de femblables amufemens, & autrefois chaffé de l'églife pour un adultere public par l'archevêque de Lyon légat du faint fiege. Si jamais il parvient à l'épiscopat par l'autorité du pape, on impofe de notre tems aux canons un filence pernicieux. Je vous en avertis, afin que vous foïez fur vos gardes; car cet intrus fe preffera d'aller à Rome ou d'y envoier, de gagner la cour par préfens & par promeffes, & furprendre le pape par tous les artifices poffibles. Nous vous déclarons donc la ve rité de la chofe, afin que vous puiffiez pourvoir à l'autorité du faint fiege & à votre réputation ; car si notre attente eft fruftrée en cette occafion, nous ne fçaurons plus que répondre à ceux qui parlent contre Epift. 89. l'églife Romaine.

Yves écrivit au pape Pascal fur le même fujet en ces termes: Comme véritable fils de l'église Romai

ne

ne & forti de fon fein, je ne puis m'empêcher d'être AN. 1IDI. fenfiblement touché lorfqu'elle eft déchirée par la médifance. C'est pourquoi je vous prie que fi l'on porte devant vous de nos quartiers des accufations contre des évêques ou d'autres perfonnes, ou des cxcuses en leur faveur, vous ne vous preffiez pas d'y ajouter foi, mais que vous accordiez un délai convenable & long, pour vous faire informer de la veripar des perfonnes vertueufes du voifinage. Autrement s'il paroît quelque decret indigne de vous, nous garderons le refpect, mais nous cefferons de vous donner des avis inutiles. Et que votre fainteté ne trouve pas mauvais fi je prens cette liberté : c'est - que j'ai déja vû plusieurs personnes zelées pour la juftice, qui voïant que l'on avoit pardonné ou diffimulé plufieurs crimes, fe font impofé filence, n'ef perant prefque plus la correction des abus. Il avertit enfuite le pape de l'élection d'Etienne de Garlande, s repetant les mêmes reproches qu'il avoit marquez dans fa lettre aux légats. Qu'il n'eft pas foudiacre, qu'il eft fans lettres, joüeur, adonné aux femmes, & qu'il a été excommunié pour adultere. Le plus grand merite d'Etienne étoit fa nobleffe. Il étoit fils de Guillaume de Garlande Sénéchal de France, qui étoit alors la premiere charge de la couronne, & luimême fut depuis chancelier. Il devoit être jeune, puifqu'il vécut encore quarante ans.

Etienne alla trouver le pape pour faire confirmer fon élection, & Yves de Chartres ne put lui refufer une lettre de recommandation, où fans rien dire di- epist. 94. rectement contre la verité, il fe joint à l'église de Beauvais fa mere pour prier le pape de lui accorder

epift. 95.

-ce qu'elle demande autant que la juftice & l'honneur AN. 1101. du faint fiege le permettent. Etienne fut refufé, & le pape fit des reproches à Yves de fa recommandation. A quoi il répondit : J'ai reçû une extréme joie & du refus qu'a reçû Etienne qui briguoit l'église de Beauvais, & de la reprimande paternelle que vous me faites à son fujet, quoique dans ma derniere lettre je n'aïe rien écrit de contraire à la premiere. Il a extorqué de moi cette lettre par fon importunité; mais j'ai cru qu'étant bien entenduë, elle lui nuiroit plûtôt que de lui fervir. La vôtre m'a fait voir clairement combien vous êtes ferme dans l'amour de la juftice, & le zele de la maifon de Dieu, & je l'ai fait connoître prefque à toutes les églifes du roïaume.

le

Entre les évêques aufquels Yves de Chartres envoïa cette lettre du pape, étoient deux des plus vertueux de la province de Reims, Lambert d'Arras & Jean pift. 97. de Theroüianne, qu'il exhorta à faire par obéïffance pour pape ce qu'ils avoient fait jufques alors par le feul amour de la juftice. Avertiffez, ajoute-t'il, votre métropolitain d'affembler le clergé de Beauvais pour faire une élection canonique, afin que fon autorité guérisse les foibles & affermisse les forts ; qu'il honore fon miniftere, & ne s'expose pas à voir executer par d'autres ce qui le regarde. Yves écrivit auffi au clergé de Beauvais, pour les encourager élire un bon fujet à la place d'Etienne, comme le pape leur ordonnoit ; mais il ne leur recommande, dit-il, perfonne en particulier.

spift. 98.

XIII.

à

En Angleterre le délai qui avoit été pris jusques à Saint Anfelme Pâque 110i. fut prorogé jufqu'au retour des dépu

foutient le roi Henri.

Edmer. 3. Nover,

tez envoïez à Rome touchant l'affaire des invefti

tures. Cependant à la Pentecôte la cour fut extrémement troublée par la nouvelle de l'arrivée en Angle- AN. 1101. terre de Robert duc de Normandie. Le roi Henri & les feigneurs étoient dans des défiances mutuelles : le roi craignoit qu'ils ne l'abandonnaffent pour se joindre à fon frere, les feigneurs craignoient que fi le roi étoit une fois paifible, il n'exerçât fur eux une autorité trop abfolue. Ils n'avoient confiance de part & d'autre qu'en l'archevêque Anfelme, & il reçut au nom de la nobleffe & du peuple la promesse du roi de les gouverner fuivant de juftes & faintes loix.

Mais quand le duc Robert fut effectivement entré en Angleterre, les feigneurs oubliant leur ferment, fongeoient à paffer de fon côté ; & le roi Henri craignoit non feulement pour fon roïaume, mais pour fa vie. Alors il eut recours à Anfelme, & promit de lui laiffer un pouvoir abfolu, pour excrcer tous les droits de l'église en Angleterre, & d'obéïr toujours aux ordres du pape. Anfelme affembla les feigneurs, & leur parla en présence de toute l'armée, avec laquelle le roi marchoit au devant de fon frere. Il leur repréfenta fi fortement combien étoient déteftables devant Dieu & devant tous les gens de bien, ceux qui manquoient à la foi jurée folemnellement à leur prince, que tous protefterent qu'ils demeureroient fideles au roi, dût-il leur en coûter la vie. Le duc Robert de fon côté perdit l'efperance qu'il avoit dans la défection des seigneurs,& fut touché de l'excommunication qu'Anfelme avoit publiée contre lui comme ufurpateur : ainfi il fit la paix avec fon frere, & fe retira.

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