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Palatin Charles Louis ayant entendu B. DE parler avantageufement de fa capa-SPINOSA, cité, & ayant vû fon Ouvrage fur la Philofophie de Defcartes imprimé en 1663. mais ignorant le venin qu'il cachoit dans fon fein, voulut l'attirer à Heidelberg, pour y enfeigner la Philofophie, & donna ordre au Docteur Fabricius, Profefleur en Theologie, & l'un de fes Confeillers, de lui en faire la propofi

tion.

Fabricius lui écrivit donc le 16. Fevrier de cette année & lui offrit au nom de fon Prince une chaire de Philofophie, avec une liberté trèsétendue de raifonner fuivant fes principes, comme il le jugeroit à propos, Philofophandi libertatem habebis ampliffimam. Mais à cette offre il joignit une condition, qui n'accommoda point Spinofa; ce fut qu'il n'abuferoit point de cette liberté au préjudice de la Religion établie par les Loix; quâ te ad publicè ftabilitam Religionem conturbandam non abufurum credit.

Spinofa vit bien l'impoffibilité où il étoit de raisonner fuivant fes prinTome XIII.

D

B. DE cipes, & de ne rien avancer en meSPINOSA. me tems qui fût contraire à la Religion établie, & ce fut ce qui l'engagea à refuser le pofte qu'on lui

offroit. Sa Lettre à Fabricius eft du 30. Mars 1673. Il lui mande que Pinftruction de la jeuneffe feroit un obftacle à fes propres études, & que jamais il n'avoit eu la pensée d'embrasser une femblable profession. Mais ce n'étoit là qu'un prétexte, & il fait affez connoître la veritable raifon de fon refus, en ajoûtant: De plus, je fais reflexion, que vous ne me marquez point dans quelles bornes doit être renfermée cette liberté, pour ne pas choquer la Religion établie.

Ce qu'on trouve dans le Mena➡ giana, to. 3. p. 3o. fur le compte de Spinofa, n'eft qu'une fuite de fauffetez. On y fait parler ainfi M. Menage. » J'ai oui dire que Spinofa étoit >> mort de peur qu'il avoit eu d'être » mis à la Baftille. Il étoit venu en » France, attiré par deux perfon»nes de qualité, qui avoient envie » de le voir. M. de Pompone en fut » averti; & comme c'étoit un Mi>niftre fort zelé pour la Religion,

»il ne jugea pas à propos de fouf- B. DE »frir Spinofa en France, où il étoit SPINOSA, capable de faire bien du defordre, » & pour l'en empêcher, il réfolut de le faire mettre à la Baftille. » Spinosa, qui en ent avis, fe fauva » en habit de Cordelier, mais je ne » garantis pas cette derniere cir»conftance. Ce qui eft certain, est » que bien des perfonnes qui l'ont » vû, m'ont affuré qu'il étoit petit, » jaunâtre,qu'il avoit quelque chofe » de noir dans la phyfionomie, & qu'il portoit fur fon vifage un ca»ractere de reprobation.

Ce dernier article eft vrai, fuivant Bayle, qui affure avoir entendu dire la même chofe à des perfonnes qui l'avoient vû. Pour ce qui eft de fon voyage en France, & des circonftances dont on l'a accompagné, il n'eft rien de plus faux. Il n'y a jamais mis le pied, quoique des perfonnes de diftinction ayent voulu l'y attirer. Sa mort ne doit donc pas être attribuée à la crainte d'être mis à la Baftille.

Il étoit d'une conftitution trèsfoible, mal fain, maigre, & attaqué

B. DE de phtifie depuis plus de vingt ans, SPINOSA.Ce qui l'obligeoit à vivre de regime & à être extrêmement fobre. Cependant on croyoit qu'il vivroit encore du tems dans cet état, lorfque fon Hôte & fa femme revenant du Sermon le 21. Mai 1677. le trouverent mort. Colerus le fait mourir à la page 164. le 23. Fevrier, & à la page 181. le 21. Cette derniere date eft la veritable, & s'accorde avec celle de l'Auteur de la Préface des Œuvres Pofthumes de Spinofa. La premiere eft sûrement fauffe, puifque le 23. n'étoit pas un Dimanche, comme Colerus le dit, mais un Mardi. Il étoit alors dans fa quarante-cinquième année.

Tout le monde convient que c'étoit un homme d'un bon commerce, affable, honnête, officieux, parfaitement défintereffè, & fort reglé dans fes moeurs. Mais fi l'on n'a du bien à dire de fa conduite, on ne peut dire que du mal de fa doctrine, qui n'eft qu'un tiffu d'abfurditez & d'impietez, fans liaison & fans ordre.

que

Catalogue de fes Ouvrages.

B. DE

1. Renati Defcartes Principiorum SPINOSA. Philofophia pars prima & fecunda more Geometrico demonftrata, per Benedictum de Spinofa Amftelodamenfem. Accefferunt ejufdem Cogitata Metaphyfica, in quibus difficiliores, que tam in parte Metaphyfices generali, quam fpeciali occurrunt, quæftiones breviter explicantur. Amftelodami 1663. in -4°• Spinofa paroît dans cet Ouvrage auffi orthodoxe fur la Nature de Dieu, que l'étoit Defcartes ; ce qui pourroit faire croire qu'il n'étoit pas encore dans les fentimens im pies dont il a rempli fes autres Ouvrages. Mais il eft bon de fçavoir qu'il n'y parle point selon fa pensée; comme on l'apprend par la Préface, qui eft d'un de fes difciples, nommé Louis Meyer, Medecin d'Amfterdam, dont on a deux autres Ou. vrages dans les mêmes principes que les fiens intitulez, l'un: Lucii Antiftii Conftantis de Jure Ecclefiafticorum liber fingularis, quo docetur quodcumque divini humanique Juris Ecclefiafticis tribuitur, vel ipfi fibi tribuunt, hoc aut falfo impieque ipfi tri

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