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du Bellay, qui commandoit au nont 1536. du Roi; ce Prélat fit travailler aux fortifications, non qu'il crût poffible ni néceffaire de mettre cette Capi tale en état de défense, mais pour en imposer aux ennemis par ces travaux. Il rendit auffi à Paris le fervice de le fournir abondamment de vivres, précaution qui contribua beaucoup à diffiper les inquiétudes des habitans, principalement fondées fur le défaut d'approvifionnement, car les glaces de l'hiver, enfuite la féchereffe de l'été avoient deux fois interrompu la navigation de la Seine. Mais pour écarter plus efficacement le danger, le Cardinal engagea Paris à fecourir Péronne, à foudoyer dix mille hommes pour la défenfe de cette Place, à y faire porter des munitions de guerre.

D'un autre côté, le Duc de Vendôme en Picardie, le Duc de Guife en Champagne, raffembloient toutes leurs forces pour empêcher Péronne de tomber entre les mains des ennemis. Le Maréchal de Fleuranges s'é

toit enfermé dans cette Place. La barriére de la Somme une fois for- 1536. cée, la Picardie & l'Ile de France devenoient la proie du vainqueur. On fentoit la néceffité de l'arrêter à cette barriére; il fentoit la néceffité de la franchir. Tout annonçoit une attaque vigoureufe, & une vigoureufe défense. Mais lorfque le Comte de Naffau avoit commencé à menacer cette Place, elle étoit tellement dépourvue de tout, que les habitans avoient voulu l'abandonner. Ce fut d'Eftourmel, Gentilhomme voisin de Péronne, qui les détermina par fon exemple & fes fecours, à la réfiftance; il vint s'enfermer dans la Place avec fa femme & fes enfans, il y fit transporter tout ce qu'il avoit de grains & de vivres, il engagea tous les Gentilshommes de fon voifinage à en faire autant, ils employérent comme lui tout ce qu'ils avoient d'argent à défendre cette Place importante. Une Charge de Maître-d'Hôtel, & d'autres avantages confidéra

1536.

Belcar. liv.

21. n. 59.

bles, payérent dignement les fervices de d'Eftourmel.

Le Comte de Naffau, avant d'affiéger Péronne, crut devoir s'empa rer du Château de Cléry, fitué à deux lieues de cette Place, fur la Somme, Le Maréchal de Fleuranges qui commandoit dans Péronne voyant l'ennemi s'approcher, commença par bruler fes fauxbourgs ; de Cléry on appercevoit les flammes, le Comte de Nassau profita de la circonftance pour perfuader aux défenfeurs de ce Château que Péronne venoit d'être prife d'emblée, qu'elle effuyoit en ce moment les horreurs du pillage & de l'incendie, que le Château de Cléry auroit le même fort, s'il réfiftoit davantage, La garnifon intimidée se rendit; & ne fut défabufée qu'après la capitula

tion.

Une autre circonftance favorifa encore le Comte de Nassau dans le fiége de Péronne. Cette Place tiroit fa principale défense des marais dont

elle étoit environnée. Un Meunier,

né fujet de l'Empereur, & qui s'é- 1536.

toit établi à Péronne, crut devoir plus à fa patrie naturelle qu'à sa patrie adoptive, il fe rendit au Camp des ennemis, il fit voir au Comte de Naffau qu'il pouvoit deffécher ces marais & détourner les eaux par le moyen de certaines tranchées; parlà les moulins à eau devinrent inutiles, les habitans furent obligés de conftruire des moulins à bras, & pour entretenir l'humidité de leurs marais, ils y firent couler les eaux d'une fontaine qui étoit dans leur Villes. Ces reffources étoient foibles, cependant ni le bonheur, ni l'adreffe du Comte de Naffau, ni tous les efforts d'une armée nombreuse, ni l'action continuelle d'une artillerie puiffante & bien fervie, ni le jeu terrible des mines qui emporta le Comte de Dammartin (1), ni quatre affauts, dans l'un defquels périt le

(1)Ce Comte de Dammartin étoit de la Maifon de Boulainvilliers.

60.

Id. ibid. a.

1536.

Commandeur d'Eftrepagny (1), & dans chacun defquels les ennemis revinrent plufieurs fois à la charge, ne purent réduire Péronne.

Dans l'intervalle d'un de ces affauts à un autre, le Maréchal de Fleuranges manquoit de poudre. Le Duc de Vendôme & le Duc de Guise étoient à Ham avec trop peu de troupes pour livrer bataille au Comte de Naffau, mais ils épioient l'occafion de faire entrer des fecours dans la Place. Le Maréchal de Fleuranges envoya un foldat déterminé leur demander de la poudre; comme toutes les portes étoient obfédées par les ennemis, il fallut le defcendre avec une corde par-deffus les murs au milieu des marais, il poursuivit fa route à travers ces marais même, & arriva heureusement jufqu'à Ham. Le Duc de Guise se chargea de faire entrer dans la Ville, pendant la nuit, les fecours que Fleuranges demandoit; ik

(1) De la Maifon d'Humiéres.

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