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serves, des expectatives, des mandats apostoliques etc. Ils sentirent la nécessité de mettre dans leurs intérêts les corps qui avoient le plus de lumières et d'autorité: de là naquit l'expectative des gradués, qui fut reçue si favorablement en France, qu'elle sembla y demander grâce pour les autres expectatives. Les papes, principalement Boniface VIII et Clément VI, en avoient accordé plusieurs, soit de leur propre mouvement, soit sur les instances de l'université, et c'étoit un droit établi long-temps avant le concile de Bâle; ce concile le reconnut et le fixa; mais il n'avoit réservé aux gradués que le tiers des prébendes, la pragmatique y ajouta le tiers des cures et des chapelles: le concordat, au lieu de donner aux gradués un bénéfice sur trois qui vaquent successivement, ce qui exigeoit des soins et entraînoit des contestations, leur réserva les bénéfices vacans (1) dans quatre mois de l'année, janvier, avril, juillet, octobre, dont deux de rigueur, janvier et juillet, dans lesquels les bénéfices doivent être conférés au plus ancien gradué nommé, deux de faveur, avril et octobre, dans lesquels le collateur ou le patron ecclésiastique peut choisir entre tous les gradués tant simples que nommés. Si le concordat n'eût fait que de tels changemens à la pragmatique, il n'auroit pas éprouvé tant d'opposition.

On distingue donc deux espèces de gradués, les gradués simples et les gradués nommés. Les gradués simples sont ceux qui n'ont en leur faveur que le temps d'étude prescrit par le concordat, et leurs lettres de degrés. Les gradués nommés ont de plus des lettres de

(1) Les gradués ne peuvent requérir que les bénéfices vacans par mort.

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5. De collat.

nomination de quelque université, qui les présente à un collateur ou patron ecclésiastique, pour être pourvus de bénéfices dans les mois affectés aux gradués nommés. Ce sont les mois de rigueur. Les mois de fa- Concord.tit. veur égalent les gradués simples aux gradués nommés; D'Herimais cette distinction de gradué simple et de gradué court, lois ecclés. P. senommé disparoît dans l'usage. On accorde des lettres conde, ch. 8. de nomination à tout gradué qui en demande et qui a les dispositions exigées par le concordat. Or tout gradué qui aspire aux bénéfices, a soin de demander des lettres de nomination.

Le temps d'étude fixé par le concordat, est de dix ans pour les docteurs ou licenciés en théologie; de sept ans pour les docteurs ou licenciés en droit canonique, en droit civil et en médecine; de cinq ans pour les maîtres-ès-arts; de six ans pour les bacheliers en théologie, de cinq ans pour les bacheliers en droit canonique ou en droit civil.

Les nobles de père et de mère ont un privilège pour Ibid. abréger leur temps d'étude; ils peuvent obtenir des bénéfices comme bacheliers en droit civil et en droit canonique, après y avoir étudié seulement trois ans. Un tel privilège suppose un de ces deux préjugés, ou que les nobles acquièrent plus facilement la science que les roturiers, ou qu'ils en ont moins besoin. Ne seroit-ce pas un reste de l'ancienne barbarie qui, avant François I, sembloit interdire toute étude et toute connoissance à la noblesse?

Si, dans les mois de rigueur, il y a concurrence entre plusieurs gradués nommés, la différence peut être ou de degré ou de faculté. Quant au degré, le docteur est préféré au licencié, le licencié au bachelier, le

de

d'Hericourt,

seconde par

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bachelier au maître-ès-arts. Quant à la faculté, la 1518. théologie est préférée au droit, le droit canonique au droit civil, le droit civil à la médecine. Si les concurrens sont de même faculté et de même degré, c'est la date Concordat. des degrés qui décide. Si enfin tout est égal entre eux, collat. le collateur ou le patron ecclésiastique peut choisir. lois Eccles. Si le gradué est régulier, un bénéfice, de quelque tie, chap. 8. valeur qu'il soit, le remplit; s'il est séculier, il ne peut être rempli que par un bénéfice de 400 livres. Tout cela est juste et simple, mais on pourroit trouver qu'en général le concordat assujétit la signification des grades à trop de formalités. On a cru devoir ajouter aux dispositions du concordat sur les gradués une préférence en faveur des professeurs de l'université de Paris et des principaux de ses collèges.

n. 11.

Il

y a dans le concordat un autre article transcrit mot à mot de la pragmatique, et tiré d'une constitution faite par le pape Martin V, au concile de Constance. Cet article a pour titre : De excommunicatis non vitandis. Des excommuniés qu'il ne faut point fuir. On y restreint aux seuls excommuniés dénoncés les effets, soit spirituels soit civils, de l'excommunication. Il ne faut fuir que les excommuniés dénoncés, mais pour ceux-là, il faut les fuir, il faut rompre tout commerce avec eux. C'étoit une grande modération pour le temps, c'étoit un adoucissement considérable de l'ancien abus de l'excommunication, mais seroit-ce assez pour un siècle où les esprits si éclairés savent rapporter avec tant de précision chaque objet à son principe particulier? Si les droits de la raison, si les intérêts de l'humanité, si les intérêts même du clergé bien entendus peuvent autoriser quelques doutes respectueux,

pourquoi l'excommunication ne se borneroit-elle pas à des effets spirituels? pourquoi faut-il qu'elle entraîne encore des effets civils? Si le royaume de J. C. n'est pas de ce monde, pourquoi perdroit-on les avantages de ce monde, parce qu'on est exclu du royaume de J. C.? Que celui qui n'écoute pas l'Eglise, soit pour nous comme un païen et un publicain : mais un païen, un publicain même reste un homme, les avantages temporels doivent lui rester; il faut le traiter avec justice, avec humanité, lui assurer son honneur, sa fortune, ses droits de citoyen. Qu'il perde dès ce monde les douceurs, les consolations attachées aux biens spirituels, qu'il perde tout pour l'éternité, n'est-il pas assez malheureux? Faut-il encore qu'on lui enlève jusqu'aux fragiles avantages de cette courte vie? Faut-il que je lui refuse mes secours, s'il en a besoin; mon estime, s'il la mérite; ma confiance, s'il sait l'attirer; mon respect, s'il est vertueux? Faut-il que je le haïsse, parce qu'il se trompe; que je sois cruel, parce qu'il est aveugle ?

Mais l'excommunication sera moins redoutée, si elle n'entraîne point d'effets civils!

J'ose répondre au contraire qu'elle eût été plus respectée, si elle se fût bornée aux effets spirituels. Rien ne décrédite plus une loi que de l'étendre au delà de ses limites naturelles. Un tort purement spirituel ne mérite qu'une peine spirituelle. C'est cette confusion du spirituel et du temporel, faite dans des temps d'ignorance, qui a produit les malheurs du clergé. On ne prendra point plaisir à rappeler ici des torts excusés autrefois par les circonstances, effacés aujourd'hui par le temps, toujours exagérés par l'hérésie, par l'irréli gion, et reprochés jusqu'à satiété par le vulgaire même,

aujourd'hui plus indocile sans être plus éclairé qu'autrefois. Réduisons-nous au vrai. Dans les siècles qu'on appelle d'ignorance, les ecclésiastiques étoient les plus instruits, par conséquent les moins imparfaits des hommes; mais c'étoient des hommes, ils abusèrent de leurs avantages; ils aimèrent mieux gouverner leurs semblables que de les instruire; ce fut alors que toutes les bornes furent confondues et arrachées; l'autorité spirituelle servit à envahir l'autorité temporelle (1), l'excommunication eut les effets les plus terribles, surtout contre les rois (2). Mais quand les tribunaux séculiers eurent pris quelque consistance, quand ils furent éclairés, ils réclamèrent leur héritage. A peine le parlement est-il rendu sédentaire, qu'on voit commencer entre Pierre de Cugnières pour le parlement, l'arche vêque de Sens et l'évêque d'Autun pour le clergé; cette querelle qu'on n'a point vu finir sur les bornes des deux puissances, querelle dans laquelle le clergé n'a cessé de perdre. Peut-être lui a-t-on tout ôté parce qu'il avoit tout usurpé (3). Au moyen de l'appel comme d'abus, le clergé, dit Mézerai, croit avoir aujour

(1) « Ils avoient étendu leur juridiction spirituelle en tant d'affaires « et matières, que les faubourgs étoient trois fois plus grands que la « ville. » Pasq. Recherc. liv. 3. chap. 22.

(2) On sait que, le roi Robert ayant épousé Berthe, sa parente, et ayant mieux aimé s'adresser aux évêques de son royaume qu'au Pape pour avoir une dispense, le Pape mit la France en interdit; excommunia le Roi et ses évêques ; qu'alors le Roi fut abandonné de tous ses sujets, qu'à peine lui resta-t-il deux ou trois domestiques, qui le servoient avec horreur, et qui jetoient aux chiens tous les mets qu'il avoit touchés. Ce prince faisoit pourtant brûler des Manichéens devant lui et devant la reine sa femme. O! superstition.

(3) Ce qui fut après cher vendu à nos ecclésiastiques, dit Pasquier, liv. 5, c. XI, en parlant de l'attentat des évêques qui, joints à

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