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besoins, quand on y a donné lieu par des dissipations?

1517,

in Chron.Ci

tiz.

Un abus en entraîne d'autres; on vouloit de l'argent Paul.Lang. comptant, on mit les indulgences en parti, et les soins du recouvrement furent abandonnés à la discré- Florimond de Remond, tion des fermiers, qui devenoient les seuls intéressés. Orig.desHéCeux-ci firent nommer, pour la publication des indul- résies, liv. 1. chap. 8. gences, des prédicateurs et des quêteurs à leur gré; l'intérêt présida seul à ce choix.

Joachim.

bello Sinal

Par un autre abus on avoit publié quelque temps auparavant une autre croisade, et pour cette croisade, par un autre abus encore, des indulgences en faveur de l'ordre teutonique contre les Moscovites, Cochloeus, quoique ceux-ci fussent chrétiens; mais ils étoient de de actis et scriptis Lul'église Grecque, d'ailleurs si barbares et si peu connus theri, ad anen Italie, qu'on n'y étoit pas bien sûr de leur christia- num 1517. nisme, et qu'on s'en rapportoit sur ce qui les regar- Camerar. de doit aux chevaliers Teutons leurs ennemis. Un domi- cald. nicain, nommé Jean Tetzel, inquisiteur de la foi, chargé par l'ordre teutonique de publier ces indulgences, s'en étoit acquitté avec tant de succès, que sur sa réputation l'électeur de Mayence Albert de Sleidanus, Brandebourg, à qui les indulgences destinées pour l'Allemagne en 1517 furent adressées, crut ne pouvoir Belcar. faire un meilleur choix pour la publication des nou-n. 101. velles indulgences; sa qualité d'inquisiteur pouvoit ann. 1518. d'ailleurs donner du poids à ses prédications. Tetzel ne manqua pas de s'associer dans cet emploi les religieux de son ordre. Quand ces jacobins avoient prêché et bien exagéré la vertu des indulgences (1), les commis

(1) « Quiconque, disoient ces prédicateurs, met au tronc de la

lib. 1.

Rainald. ad

des entrepreneurs du bail faisoient leur quête; ces 1517. commis avoient établi leurs bureaux dans des cabarets,

où ils dissipoient une partie de la recette en excès et en débauches, à la vue des pauvres, qui, frustrés des aumônes, qu'on portoit aux indulgences, expiroient de faim dans la rue.

Les murmures qu'occasionnoit ce scandale fournirent aux augustins un prétexte dont leur jalousie avoit besoin. Outre la haine d'usage établie entre ces corps rangés sous la bannière de divers saints, les augustins avoient à venger une injure particulière; ils voyoient leurs honneurs transférés aux dominicains. Les augustins avoient eu plusieurs fois l'emploi de publier les indulgences. Jean Stupitz ou Staupits, leur vicaire

<< croisade un teston ou la valeur, pour une ame étant en purga« toire, il délivre ladite ame incontinent; et s'en va infaillible<<ment ladite ame aussitôt en paradis. Itaque, en baillant dix << testons pour dix ames, voire mille testons pour mille ames, a elles s'en vont incontinent et sans doute en paradis. >> proposition condamnée par la Sorbonne, le 6 mai 1518. D'Argentr. Collect. Judic. t. 1. p. 355.

<< Avec une bulle du Pape, disoient-ils encore, on ne peut jamais être damné, dans quelque disposition que l'on soit; << le Pape étoit le maître de faire sortir les damnés même de « l'enfer. »

Ils poussoient jusqu'au sacrilège l'indécence de leurs hyperboles. Les indulgences absolvoient à l'instant tout coupable, quel que fût son crime, etiamsi matrem Domini stuprasset. Perizonius, Durand, Hist. du Seizième Siècle, liv. 5. n. 18. Sleid. Commentar. lib. 1. « J'absous plus de pécheurs par mes indulgences, disoit Teta zel, que S. Pierre n'a converti de gentils par sa prédication. » Dur. Seizième Siècle liv. 5, n. 5.

« On ne peut nier, dit le zélé catholique Florimond de Rémond, qu'il n'y eût de l'abus, de l'ordure et de la vilenie en ces avares' « questeurs. >>

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général en Allemagne, prit donc le parti de crier, non pas contre les indulgences, non pas même contre la vente de ces indulgences, mais contre la manière dont celles-ci se publioient et se vendoient, ce qui signifioit seulement les dominicains n'entendent rien à cette commission, il faut la rendre aux augustins.

Des protestans disent que juger ainsi, c'est s'ériger en scrutateurs des cœurs, et qu'on doit penser que le pur zèle de la maison de Dieu dévoroit Stupitz et Luther. Mais sur quelle règle veulent-ils donc que l'histoire juge des motifs des hommes, et comment expliquer ce scrupule qui prend tout à coup aux augustins sur la vente des indulgences (1), quand ce n'est plus leur ordre qui en est chargé?

Tous ces moines avoient des protecteurs dans le siècle, et ces protecteurs étoient leurs créatures sans le savoir; l'électeur de Mayence l'étoit des dominicains, l'électeur de Saxe des augustins.

Stupitz étoit un homme de mérite pour son état et pour le temps; l'électeur de Saxe lui avoit confié la direction d'une université nouvellement fondée à Vittemberg, et Stupitz l'avoit remplie d'augustins.

Cet électeur, c'étoit ce sage, ce généreux Frédéric, qui étonna l'empire par le refus qu'il fit de sa couronne, et Charles-Quint par le refus qu'il fit de ses présens, après lui avoir mis cette couronne sur la tête.

Celui qui se distinguoit le plus alors dans l'ordre des augustins et dans l'université naissante de Vittemberg, étoit Martin Luther. Il avoit une assez grande

(1) Mézerai appelle tout cela des intérêts de besace.

1517.

réputation de savoir et d'éloquence, ce qu'il faut tou1517. jours entendre d'une réputation d'université, de cou

Phil. Mélancht. t. 2.

vent et du seizième siècle; le vrai talent force les barrières des temps et des lieux, mais il y avoit alors peu d'écrivains qui eussent véritablement du talent, et ceux-là on les lit encore aujourd'hui, mais qui est-ce qui lit les œuvres de Martin Luther?

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Cet homme trop célèbre naquit le 10 novembre 1483 Sur. in Com- dans la petite ville d'Islèbe, au comté de Mansfeld. ment. Le P. Maimbourg attache quelque mérite d'impartiaChytræi Saxonia. lib. 7. lité à convenir que Luther étoit né d'un homme ordinaire, et non pas d'un incube, comme l'ont écrit quelques auteurs. Un théatin italien (Cajetan Vieich ) le fait naître de Mégère, et le fait envoyer directement des enfers en Allemagne, mais du moins il ne donne cela que pour une fiction poétique bien ingénieuse.

Toute fiction à part, le père de Martin se nommoit Jean Luder ou Luther, et sa mère Marguerite Linderman, gens d'une condition médiocre. Ce fut à Erford que Martin Luther entra chez les augustins; il y entra malgré ses parens, en 1505, et y fut fait prêtre en 1507; la réputation qu'il y acquit le fit choisir par le vicairegénéral de son ordre pour prêcher et enseigner dans l'université de Vittemberg; il y prit le bonnet, et l'électeur de Saxe, qui, en l'entendant prêcher, avoit conçu pour lui beaucoup d'estime, fit les frais de la

cérémonie.

Les raisons qui engagèrent Luther à se faire moine annoncent une imagination sensible et prompte à s'enflammer; il avoit vu tomber le tonnerre à ses pieds, il avoit vu mourir subitement à ses côtés un de ses amis; de là une sainte horreur des jugemens de Dieu,

et un dégoût prématuré du monde qu'il ne connoissoit pas.

Il eut des visions, mais qui n'en avoit pas alors? Descartes lui-même en a bien eu un siècle et demi plus tard, et sans lui nous en aurions peut-être encore.

Stupitz chargea Luther d'écrire contre les nouveaux vendeurs d'indulgences. Luther avoit été jusqu'alors un religieux exemplaire et fidèle à ses vœux, comme il s'en accusa lui-même dans la suite. Il prit la plume par obéissance pour son supérieur et par zèle pour son ordre; il prit la plume pour ne la plus quitter:

Le bel-esprit, en Allemagne surtout, consistoit alors à disputer; tout étoit syllogisme et thèse; les écoles retentissoient d'une argumentation barbare, les écrits en étoient infectés. Luther étoit propre à cette double guerre; il étoit véhément; il avoit l'ardeur de l'enthousiasme, l'opiniâtreté du pédantisme, et toute l'insolence de l'orgueil; sa voix étoit forte, ses poumons infatigables, sa plume intarissable; il parloit avec cette facilité que donne la violence, même sans talent, et l'on trouvoit alors qu'il écrivoit bien.

1517.

ad Albert.

Il afficha d'abord, selon une autre pédanterie du Epist. Luth. temps, quatre-vingt-quinze propositions à la porte "Mongunt. de l'église de Vittemberg; ce fut là le premier acte d'hostilité.

Le répondant est toujours un peu plus diffus que l'agresseur, parce qu'il ne veut lui céder en rien. Tetzel, chef de la prédication des indulgences, répondit par cent six propositions qu'il fit afficher à Francfort-sur-l'Oder (1).

(1) Il importe peu de savoir que ces thèses furent attribuées à Conrad Wimpina, professeur en théologie à Francfort.

t. I.

Sleid. Comment. lib. 1.

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