tour; cependant elle ne me parle point encore du jour de fon départ. Avez-vous bien chaud à Grignan, ma très-belle? Je me fouviens d'y avoir été par un temps pareil à celui-ci. L'affaire du Ménil-montant paroît tout-à-fait rompuë; cependant j'ai dans la tête qu'elle fe raccommodera. Adieu, ma chère amie.

LETTRE XXXVII.

LA MÊME A LA MÊM E.

A Paris, le & Juillet.

E puis répondre pour M. de Tréville qu'il auroit été ravi que vous euffiez augmenté la bonne compagnie qui l'entendit; & je fuis affurée, ma chère amie, que vous auriez été contente de votre journée; mais vous nous regardez du haut en bas de votre château de Grignan, & je m'amufe à vous defirer toujours fans m'en pouvoir empêcher. On eft fort alerte ici fur le grand événement du fiége de Namur, car c'eft tout de

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bon, & apparemment ce fiége fera meurtrier ; vous fçavez que le Maréchal de Boufflers s'eft jetté dedans avec fix régimens de dragons à pied, & celui du Roi à cheval; ainfi le pauvre Sanzei eft dans Namur tout comme un grand homme; M. le Maréchal de Boufflers a la fiévre doubletierce, mais il aura bien d'autres affaires qu'à l'écouter. Le Maréchal de Lorges eft hors de danger. Tout retentît ici des louanges du Maréchal de Villeroi; il n'y a guères de jours que le Roi n'en parle avec éloge, & tous les guerriers qui compofent fon armée, n'écrivent ici que pour chan ter fes louanges. Je crois qu'à la fin M. le Duc de Chaulnes va acheter Putaut, qui eft une maison près du pont de Neuilli, fituée fur le bord de la rivière; il y a de quoi faire des merveilles, & il les fera; car il a une extrême envie d'une maifon de campagne. Le Roi va à Marli pour quinze jours; fi la Ducheffe du Lude eft de ce voyage, ce fera pour la troifiéme fois de fuite; ces diftinctions charment quand on eft en ces payslà, heureux qui peut voir cela dy

du point de vue, où il faut l'envisager. Je n'ai point vu la lettre du P. Quênel, on dit qu'il la defavouë, & il ne fçauroit mieux faire. Vous fçavez, ma très-belle, que M. de la Trappe a remis fon Abbaye entre les mains de Dom Sozime, Supérieur de fa Maifon, avec la permiffion du Roi; & qu'il fe va trouver fimple Religieux : cette fin eft bien digne de lui, & couronne parfaitement une fi belle vie. Pour l'Oraison funèbre du P. de la Ruë, on n'en parle non plus pré-fentement, que de celle que l'on fit pour la Reine mère. On ne fçait pas qu'il y ait eu un M. de Luxembourg, dans le monde; eft bien fou qui compte fur la gloire qui fuit la mort ; ce n'est en vérité pas de cela qu'il faut être occupé dans cette vie; mais les hommes auront toujours leurs erreurs & les chériront. M. de Coulanges ar riva avant-hier au foir ici plus charmé de M. de Bouillon, de Mile de Bouil-lon & de Navarre que de tous fes an-ciens amis; il partit hier pour Choifi,, où il fera jufqu'à ce que notre voya-ge de S. Martin s'accompliffe; je ne me fens pour ces fortes de parties que

la force du projet; l'exécution eft fort au-deffus de moi. Ma fœur monte dimanche fur l'Hypogriphe, & arrive lundi à Paris. M. de Bagnols * ne perd pas de vue le Maréchal de Villeroi, cela me fait craindre pour fa vie. M. de Rheims a acheté la maifon d'Erval deux cens vingt-une mille livres. Adieu, ma très-aimable, n'oubliez pas de m'aimer, je vous en conjure; & ne me laiffez point oublier dans le lieu que vous habitez; mandez-moi fi la charmante Pauline aura été bien contente du portrait myf térieux que vous lui avez donné. Me de Quélus me vint voir hier plus jolie qu'un ange; elle me demanda en grace de venir voir l'arrangement de fa maison ; j'aurai plus de peine à rendre cette vifite, que je n'en montrerai; ce que je fens la-deffus ne peut être confié qu'à vous, ma chère amie.

* Intendant de l'armée de Flandre.

LETTRE XXXVIII.

LA MÊME A LA MÊME.
A Paris, le 29 Juillet.

L n'eft plus queftion, ma chère amie, ni de M. Arnauld ni du P. Quefnel; toutes les penfées font tournées du côté de Namur. Ces derniers tuez ont jetté une confternation qui ne laiffe plus de joie ici. Me de Morstein eft inconfolable. La bonne Chanceliere* pleure amérement for petit-fils de Vieuxbourg; & Me de Maulevrier renvoie bien loin tous les gens qui lui veulent parler de confolation, jufqu'au P. Bourdalouë. On ne fçait point de nouvelles du Comte d'Albert, finon qu'on le croit trépané; & depuis cela pas un mot, M. & Me de Chaulnes en font dans une extrême inquiétude. Vous fçavez que M. le Prince de Conti a la petite vérole; elle eft fortie avec

* Anne-Françoife de Loménie, femme de Louis Boucherat, Chancelier de France.

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