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M. de Coulanges eft allé à Chaulnes; ils reviendront tous dans un mois, & c'est tout à l'heure. L'Abbé & moi, ne laifferons point ignorer à Me de Sanzei tout ce vous dites pour elle. Je vous demande mille complimens pour Me de Grignan, ma très-aimable: je vous demande auffi d'embraffer la belle Pauline pour l'amour de moi, tout comme fi vous n'aviez point de fujet de vous plaindre d'elle.

LETTRE XLIV.

LA MÊME A LA MÊME.

A Paris, le 28 d'Octobre.

Ous avez eu la colique, ma chère amie, & quoique je fçache que vous vous en portez bien préfentement, je ne fçaurois être raffurée que je ne le fois par vous-même. Je vous demande auffi des nouvelles de Me de Grignan; fi vous fçaviez combien l'air fubtil eft contraire à fes maux, vous l'obligeriez de fe

1695.

mettre dans une litière bien faite & bien commode,& vous gagneriez Paris; l'air de Lyon lui feroit connoî. tre qu'il n'y a point de meilleur reméde pour elle que de changer de climat; c'eft l'avis de mon oracle (Helvétius). La Maréchale de Boufflers a été fort malade d'une pareille maladie, elle fe porte très-bien aujour d'hui. Le Roi eft de retour dans une parfaite fanté. Je vis hier la Ducheffe du Lude, qui eft venue à Paris pour fe faire faigner & purger, fans autre raifon, je crois, que d'avoir trop de fanté. Il s'eft fait de grands changemens à Chaulnes; M. de Chaulnes aime fon château comme fa vie, & ne le peut quitter. Me de Chaulnes paffe les jours, & peut-être une bonne partie des nuits à jouer. M. de Coulanges eft devenu délicat & précieux, les vifites de Province l'ennuyent. Je vois fouvent notre perite accouchée (la Ducheffe de Villeroi*); elle a un fils un peu plus grand que fon père, & un peu moins grand que le Maréchal de Ville(

Marguerite le Tellier, fille du Marquis de

Louvois, Miniftre de la guerre.

roi); il n'y a point de jour qu'elle ne me demande des nouvelles de Mile de Grignan, & qu'elle ne lui fouhai te tous les biens & les maux qu'elle a. L'on dit que le Maréchal de Lorges fe porte mieux, & on n'appelle plus fa maladie une apoplexie; la Maréchale, qui l'eft allée trouver, væ avec lui aux eaux de Plombières. Tout le monde croit le mariage de M. de Lefdiguières fait avec Mlle de Clerambault; le charme que Mc de Lefdiguières trouve dans ce mariage, c'est qu'elle n'aura point fon fils avec elle. Le monde dit auffi celui de Mlle d'Aubigné avec le fils ** de M. de Noailles, & je crois qu'en cette occafion le monde dit vrai. Au refte ma très-belle, j'ai à vous apprendre l'Abbé Têtu eft charmé de Me de Carman, & qu'il fe plaint hautement de toutes fes amies de ne lui avoir pas fait connoître ce merire-là plûtôt. On parle fort ici de la folitude

que

Ce mariage ne fe fit point avec Mlle de Clérembault, mais avec Mlle de Duras, fille du Maréchal de ce nom en 1696.

** Ce mariage ne fe fit que le premier Avril 1698.

1695.

*

de Me la Marquife de Grignan; on dit que fa vie n'eft pas foûtenable, parce qu'il ne faut voir perfonne, ou voir bonne compagnie; vous voyez combien votre retour, & celui de fa belle-mère font néceffaires; mes confeils fur cela vous paroîtront bien intéressez ; je fouhaite que cette raifon ne vous empêche pas de les fuivre, & que vous me croyiez auffi tendrement à vous que j'y fuis. Je vous demande en grace de dire bien des chofes de ma part à Me de Grignan, & de ne pas oublier la belle & charmante Pauline.

LETTRE XLV.

LA MÊME A LA MÊME.

A

A Paris, le 7 Novembre.

PRÈS avoir réfléchi avec toute l'application poffible fur tout ce que vous me mandiez, ma chère

* Mc la Comtesse de Grignan

amie, Helvétius a encore voulu emporter votre lettre afin d'y penfer à loifir; il ne me rapporta qu'hier ce que je vous envoie, il eft perfuadé que l'air fubtil eft fort contraire à Me de Grignan, & que s'il étoit poffible qu'elle fe mît dans une litière bien commode, & qu'elle fit de petites journées, elle ne feroit pas plûtôt arrivée à Lyon qu'elle fe trouveroit fort foulagée; c'eft un reméde que nous approuvons fort ici. Notre oracle Helvétius a fauvé la vie à la pauvre Tourte; il a un reméde für pour arrêter le fang, de quelque côté qu'il vienne; c'eft un très-joli homme & très-fage; fa phyfionomie ne promet pas tant de fageffe; car il reffemble à Dupré comme deux gouttes d'eau. Je vous demande des nouvelles de Me de Grignan, ma très-aimable, pour me récompenfer de toutes mes confultations. M. le Marquis de Grignan m'eft venu voir, il est assurément moins gras qu'il n'étoit, je lui en ai fait des complimens très-fincéres: Me fa femme me fit l'honneur de venir ici hier; je la trouvai fi confidérablement embellie qu'elle me parut une

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