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Il y brillera, ce dit-on,
D'une riche parure.

Le voyez-vous vous dites, non :
Ni moi, je vous le jure.

On dit que déja dans un an
La nouvelle Ducheffe
Pourra nous donner un enfant
Digne de fa nobleffe.

Qu'il fera joli, ce poupon!
L'aimable créature!

Le verrez-vous? je crois que non ;
Ni moi, je vous le jure.

Que Chaulnes fera fatisfait
De voir fa belle-fille
D'un rejetton auffi parfait
Augmenter fa famille !

Mais tout ceci n'eft que chanson,

Et que pure chimère ;

Nous ne voyons rien tout de bon,
Et je m'en défefpère.

Hé bien! qu'en dites-vous ? voilà la plaifanterie finie par ces couplets, au moins, je vous le répéte encore. J'ai retrouvé ici Me de Coulanges avec une fort jolie fanté; elle eft même engraiffée, ce qui eft un très bon fi

gne; je ne vous dirai pas beaucoup de nouvelles publiques, car je n'en fçais point. La Maréchale de Créqui a penfé mourir ; mais elle est hors d'affaire. Adieu, Mefdames, adieu mère & fille adorables; adieu, belle Pauline. Je fuis ravi, comme vous pouvez croire, que M. de Grignan ait été traité avec toutes les diftinctions qu'il mérite; mais feroit-il vrai que la Flotte ennemie fût devant Marseille avec quelque intention de le bombarder ? Quelle éternelle & malheureufe guerre ! Les Poëtes fatyriques ne finiffent point ici fur les chanfons & fur les épigrammes; mais je ne me charge de rien de tout cela; je me flate au moins qu'il vous en vient quelque chofe par des voies détournées. Adieu encore une fois. Voici la deuxième lettre que je vous écris, depuis celle que j'ai reçuë de vous.

1695.

LETTRE LXXXIV.

LE MÊME A Me DE SÉVIGNÉ.

A Chaulnes, ce 10 Octobre.

ME

E voici abfolument aux gages de Me la Ducheffe de Chaulnes ; c'eft ma bonne maîtreffe, quoique M. de Chaulnes m'affure que j'ai pris une étrange condition & que je fers une étrange maîtreffe. La voilà qui parle, écoutez-la bien. Me la Ducheffe De Chaulnes.

Nous voici, ma chère Gouvernante, dans une maison qui n'est pas trop laide; & mon secrétaire * la trouve affez honnêtement meublée; mais nous y voyons fouvent de fort mauvais temps; ce qui eft fort trifte à la campagne. Parlons, ma chère Gouvernante, de la belle Comteffe, dont nous ferions fort en peine, fi nous n'espérions qu'après ce temps-ci, fa fanté en fera beau*M. de Coulanges.

.

coup meilleure ; mais je vous confeille d'empêcher qu'elle ne prenne des remédes de M. Alliot; car feuë Me Colbert s'en eft fort mal trouvée. Il ne faut plus fonger qu'à la bien nourrir, & à rétablir fon eftomac tout doucement, pour revenir le plûtôt que vous pourrez dans un air beaucoup plus doux que celui de Grignan; j'ai impatience que la campagne foit finie, pour que vous me mandiez que Mile de Grignan changera de nom; perfonne ne fouhaite plus que moi de lui voir un bon établisfement. Je fuis ravie, ma chère Gouvernante, que vous defapprouviez l'achat de toutes ces vilaines petites maisons d'auprès de Paris vous approuviez, au contraire, l'acquifition que nous avons faite de Dampierre; je crois vous avoir mandé que nous n'avons pas donné un fol d'argent comptant. On nous céde Dampierre avec cinq mille livres de rente, qui y font attachez, pour l'entretenir ; & la vie durant de M. le Duc de Chaulnes, M. le Duc de Chevreuse prendra cinq mille livres de rente fur nos revenus. Nous nous

& que

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accommoderons auffi des meubles, afin de n'avoir aucun embarras. J'efpère bien, ma chère Gouvernante, que vous y viendrez faire de petits féjours avec moi, & que vous ne ferez pas fâchée de voifiner un peu avec Port Royal des champs. Mon Secrétaire à lu votre lettre à M. de Chaulnes avec tous les tons qui y convenoient, & nous avons bien plaint la belle Comteffe; mais c'est à M. de Chaulnes à vous répondre fur l'empreffement qu'il a eu de voir Me la Marquife de Grignan; il a reçu toutes les lettres de M. votre fils dont il eft fort content. Il faut laiffer toutes ces tracafferies-là de province, jufqu'à ce que nous foyons tous enfemble à Paris; vous jugez bien que je ferai toujours difpofée à ne lui pas faire fon procès, perfonne ne connoiffant mieux que moi les dits & redits de la ville de Rennes ; & le Secrétaire ne fçait que trop comme Beaucé autrefois hazarda de fe faire chaffer de l'hôtel de Méneuf pour fa mauvaise langue. A cet hiver donc, toute forte d'éclairciffemens & de bonnes intentions pour rétablir la

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