nant tous les jours pour aller à Saint- Marie Stuard, fille de Jacques II, Roi d'Angleterre, & femme de Guillaume III, Roi d'Angleterte, lequel n'étoit connu alors en France que fous le nom de Prince d'O range. D L $695. LETTRE XXIX. LA MÊME A LA MÊME. C Paris, le 21 Janvier. * Omptez, Madame, qu'on ne fonge point ici qu'il y ait eu un M. de Luxembourg dans le monde. Vous ne me faites pitié où vous êtes, que par les réfléxions que vous vous amufez à faire fur des morts, dont on ne se fouvient plus du tout. Les meilleurs amis de M. de Luxembourg s'affemblent encore fouvent; le prétexte eft de le pleurer, & ils boivent, mangent, rient, fe trouvent de bonne compagnie; & de Caron, pas un mot. C'eft ainfi qu'eft fait le monde, ce monde que nous voulons toujours aimer. On parle à peine encore de la Princeffe d'Orange qui n'avoit que trente-trois ans, qui étoit belle, qui étoit Reine, qui gouvernoit, & qui eft morte ** * Mort le 4 Janvier 1695, âgé de 67 ans, ** Morte le 7 Janvier 1695, pas en trois jours, Mais une grande nouvelle, c'eft que le Prince d'Orange eft malade très-affurément; la maladie de la Reine, fa femme, étoit contagieufe; il ne l'a point quittée; & Dieu veuille qu'elle ne l'ait quitté pour long-temps. Il fe paffa hier une belle & magnifique fcène à l'hôtel de Chaulnes ; MONSIEUR y paffa prefque toute la journée avec fes bontez & fes agrémens ordinaires pour la maîtreffe de la maifon. L'appartement de cette Ducheffe eft dans le point de la perfection; depuis le falon jufques au dernier cabinet, tout eft meublé de ces beaux damas galonnez d'or que vous connoiffez; on a fait dans la chambre du lit une cheminée d'une beauté & d'une magnificence qui ne fe peut dire; il y avoit de gros feux par tout, & des bougies en fi grande quantité, qu'elles auroient obfcurci le foleil s'ils s'étoient trouvez ensemble. Me de Chauln s eft allée ce matin rendre la vite à MONSIEUR, & enfuite à Ver ail es pour quelques jours; c'est ce qui la empêchée de vous écrire. Il n'y a de plaifirs qu'à Grignan, mon amie; mais ce qui eft trifte, c'eft qu'il n'y en a point pour nous à Paris, quand vous êtes à Grignan. Je révère & eftime tout ce qui habite ce beau château. M. le Marquis de Grignan m'a écrit la plus jolie lettre qu'il eft poffible; elle a été trouvée telle par les connoiffeurs. Rendez-moi de bons offices auprès de Me fa femme; mais, mon amie, rendez-m'en de bons auprès de vous, je vous en fupplie. On parle ici tous les jours de l'aimable Pauline, & toutes fes amies s'en fouviennent fi tendrement, qu'elle est une ingrate fi elle ne s'en foucie plus; mais pourvu qu'elle ne m'oublie pas, je lui pardonne tout le refte. La petite Ducheffe de Sulli, qui eft à mon gré la vieille, vient de m'envoyer prier de vous faire à tous mille complimens de fa art. Aimez-moi toujours, je vous en conjure, ma chère amie. LETTRE XXX. LA MÊME A LA MÊ M E. A Paris, le 4 Février. N voit bien que vous avez: ou On avez:00 amie, puifque vous croyez avois plus froid que nous; jamais il n'y a eu un hiver comme celui-ci. Le foleil fe fait voir depuis deux jours, mais il ne fe laiffe point fentir; c'eft un privilège dont vous jouiffez à Grignan, j'en fuis affurée. Je comprens à merveilles que Me de Grignan fe faffe un plaifir de ne point faire de vifites; c'eft un avantage que j'ai au milieu de Paris; mais auffi n'ai-je point de raifon pour m'incommoder; point d'enfans, point de famille; graces à Dieu, affez de dégoût pour ces fatigantes occupations; bien des années, & une affez. mauvaise fanté; tout cela fait demeurer au coin de fon feu avec un 1695 |