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plaifir pour moi, que je préfère à d'autres, qui paroiffent plus fenfibles; mais une retraite que j'admire, c'eft celle de Mlle de la Trouffe, Dieu lui fait de grandes graces, & fon état est maintenant bien digne d'envie. Me de Chaulnes veut toujours fe repofer, & court inceffamment. Il y a chez elle des dîners magnifiques; le Chevalier de Lorraine, M. de Marfan, M. le Cardinal de Bouillon; cela fe foûtient de cette forte tous les jours de la femaine. Me de Pontchartrain eft affez málade; La Comteffe de Gramont eft retournée à la Cour en affez bonne fanté. L'on ne fe fouvient plus ici de Me de Meckelbourg, fi ce n'est pour parler de fon avarice. On dit que M. de Montmorenci va époufer Me de Seignelai, j'ai peine à croire ce mariage-là. M. de Coulanges arriva hier de S. Martin & de Versailles; mais c'est chez Me de Louvois qu'il eft defcendu; à tous Seigneur, tout honneur. Je comprens fort bien que l'on s'accommode d'un

*

*M. de Coulanges appelloit Me de Louvois fa feconde femme.

mari qui a plufieurs femmes; j'en fouhaiterois encore une ou deux, comme Me de Louvois, à M. de Coulanges. Le Maréchal de Villeroi prêta hier le ferment *, & prit le bâton enfuite; il fit attendre beaucoup le Roi, parce qu'il s'ajuftoit; il avoit un habit de velours bleu d'u ne magnificence extraordinaire, &t fa bonne mine le paroit plus que fon habit. Me la Ducheffe du Lude m'a fait promettre que je vous ferois mille complimens & mille amitiez bien tendres de fa part. Le Roi a donné à Me de Soubize l'appartement que le Maréchal d'Humieres avoit à Versailles; & celui de Me de Soubize aux Princeffes d'Epinoi; celui de ces Princeffes à M. de Rafilli; & de la Dncheffe d'Humieres, pas un mot. Adieu, ma chère amie, je vous embraffe & vous aime beaucoup. F'ai peur que la charmante Pauline ne m'oublie à la fin; l'abfence laiffe tout craindre, même quand on est heureux. Continuez, je vous prie, de faire mes complimens dans

*Pour fa Charge de Capitaine des Gardesdu-Corps de S. M

D. iiij

le château de Grignan. Je fuis fort obligée à M. le Chevalier ( de Grignan) de l'honneur de fon fouvenir, & je vous conjure, de l'en remercier pour moi; je fuis véritablement occupée de fes maux; fon ami le P. de la Tour prêche à S. Nicolas, & fi je fuis en état de pouvoir fortir, ce fera mon Prédicateur pour ce Carême. On vous a fans doute envoyé tous les fonnets, qui ont été faits à la louange de la Princeffe de Conti.

1695.

LETTRE XXXI.

LA MÊME A LA MÊME.

J

A Paris, le 22 Février.

'Ai perdu mon petit fecrétaire, mon amie, & je ne puis me réfoudre à vous faire voir de ma mauvaise écriture. J'effaye un fecrétaite nouveau, mandez-moi fi vous li

* C'étoit M. de Coulanges.

fez bien fon écriture. La nouvelle qui fait ici le plus de bruit, eft le mariage de la belle Pauline; on dit que l'Abbé de Simiane eft parti pour se trouver aux noces; quand je dis que je n'en fçais rien, perfonne ne me veut croire. La Ducheffe du Lude dit qu'elle le fçait par le Chevalier de Grignan; pour moi, je pardonne tout le fecret que vous m'en faites, pourvu que cela foit vrai; vous croirez par-là que j'aime paffionément M. de Simiane. M. le Duc de Chaulnes donne des diners magnifiques; il en a donné un à Me de Louvois, comme il l'auroit donné à M. de Louvois; un autre au Chevalier de Lorraine, & à toute ́ ́ la maifon de MONSIEUR; j'étois du premier; & pour le fecond, j'y envoyai mon fils, qui s'appelle M. de Coulanges; à mesure qu'il me vient des années, les fiennes diminuent, de façon que je me trouve encore: bien vieille pour être fa mère. Tous les Courtifans font devenus Poëtes ;; l'on ne voit que des bouts-rimez, les uns auffi remplis de louanges, que les autres de médifances; Dieu me gar

de de vous envoyer ces derniers il en court un à la louange du Cardinal de Bouillon, qui paffe pour une chanfon; qu'en dites-vous, mon amie? Que dites-vous auffi du Prince Dauphin? je laiffe à mon fecrétaire le foin de vous mander cette hiftoire; car il se mêle quelquefois. d'écrire de fon ftyle. On dit que c'eft une affaire réfoluë que le mariage de Mlle de Croiffi avec le Comte de Tillieres*. Me de Maintenon est encore languiffaate; mais elle fe porte beaucoup mieux. Me de Gramont paroît à la Cour fous la figure d'une beauté nouvelle; elle eft parfaitement guérie. M. l'Abbé de Fénelon a paru furpris du préfent que le Roi lui a fait*; en le remerciant il lui a représenté qu'il ne pouvoit regarder, comme une récompenfe, une grace qui l'éloignoit de M. le Duc de Bourgogne: le Roi lui a dit qu'il ne

*Ce mariage ne fe fit point. Mlle de Croif fi fut mariée en 1696 au Marquis de Bouzoles, & le Comte de Tillieres époufa en 1699 Mile du Gué de Bagnols, niéce de Me de Cour langes.

** de l'Archevêché de Cambrai..

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