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har.

AN. 405.

dans ce concile des lettres du pape faint Innocent, qui demandoit que les évêques ne paffaffent pas la mer légèrement. Ce qui fut ordonné par le concile fur la fin de la même année 405, c'est-à-dire, le huitiéme de Décembre. Il y eut L. 39. C. Th. de encore un refcrit de l'empereur, adreffé à Diotime proconful d'Afrique, pour l'exécution des peines portées contre les Donatiftes; & ce fut apparemment l'effet de la députation du concile de cette année.

Peu de tems après, faint Auguftin écrivit contre un grammairien Donatifte laïque nommé Crefconius, qui ayant trouvé l'écrit de S. Auguftin contre le commencement de la lettre de Petilien, y avoit fait une réplique, adreffée à S. Augustin même. S. Auguftin lui répondit en trois livres: puis voyant que le feul argument de leur fchifme entre Maximien & Primien fuffifoit pour répondre à tout, il en fit un quatriéme livre. Il commence par juftifier l'éloquence & la dialectique contre les calomnies de Crefconius, qui prétendoit que chrétiens n'en devoient point user. S. Auguftin montre qu'elles ne font point à craindre à ceux qui défendent la vérité & qu'il eft permis de reprendre ceux qui fe trompent, même de les attaquer, & d'ufer de véhémence, felon que la charité le demande. Il confirme tout cela par les exemples des apôtres & de J. C. même.

les

Le vieil Arface ne tint que feize mois le fiége à C. P. & mourut âgé de quatre-vingt-un an, l'onziéme de Novembre, fous le confulat de Stilicon & d'Anthemius; c'est-à-dire, en 405. Sa place demeura quelque tems vacante par l'ambition de ceux qui la briguoient. Enfin l'année suivante 406, fous le fixiéme confulat d'Arcade avec Anicius Probus, on élut évêque de C. P. le prêtre Atticus, quatre mois après la mort d'Arface, c'est-à-dire vers le dixiéme de Mars. Atticus étoit de Sebafte en Armenie. Il avoit en fa jeuneffe pratiqué la vie monaftique, fous la conduite des difciples d'Euftate de Sebaste, qui étoient de l'héréfie des Macédoniens: mais étant en âge d'homme, il revint à l'églife catholique. Il avoit plus de bon fens naturel que d'étude. Il étoit habile dans la conduite des affaires, foit pour engager une intrigue, foit pour s'en démêler. Il s'acquit beaucoup d'amis par fes maniéres infinuantes; car il étoit d'agréable converfation, & fçavoit s'accommoder à tout le monde. Ses fermons étoient médiocres, enforte que l'on ne fe fou

11. Retract c. 26.

IX.
Mort d'Arface.
Atticus évêque
de C. P.

Pall p. 94.
Sup. l. xx1. n. 9.
Soz. v111. c. 27.

Socr. v1. c. 20.

AN. 405.

Pall. p. 95.

X.

cioit pas de les écrire. Quoiqu'il paffât pour ignorant, il ne laiffoit pas, quand il avoit le loifir, d'étudier les meilleurs auteurs prophanes, & d'en parler fi à propos qu'il étonnoit les fçavans.

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Atticus avoit été le principal auteur de la confpiration contre S. Jean Chryfoftome. Comme il vit que ni les évêques d'Orient, ni le peuple de C. P. ne vouloit communiquer avec lui, il obtint pour les y contraindre des refcrits de l'empereur. Celui qui étoit contre les évêques, portoit : Si quelqu'un des évêques ne communique pas avec Theophile, Porphyre & Atticus qu'il foit chaffé de l'églife & dépouillé de fes biens. Ceux qui étoient riches & attachés à leurs biens, communiquérent malgré eux avec Atticus: ceux qui étoient pauvres & foibles dans la foi, fe laifférent gagner par préfens. Mais il y en eut qui mépriférent généreufement leurs biens & leur pays & tous les avantages temporels, & s'enfuirent pour éviter la perfécution. Les uns allérent à 7.96. Rome, les autres fe retirérent dans les montagnes ou dans les monaftéres. L'édit contre les laïques portoit: Que ceux qui étoient conftitués en dignité, la perdroient; les officiers & les gens de guerre feroient chaffés; le refte du peuple & les artifans feroient condamnés à une groffe amende, & bannis. Nonobftant ces menaces, le peuple fidèle à S. Jean Chryfoftome, plutôt que de communiquer avec Atticus, faifoit fes priéres en campagne à découvert, avec beaucoup d'incommodité.

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Cependant les députés du pape & des évêques d'Italie étoient en chemin, pour venir à C. P. Ils vouloient aller à Theffalonique, & ils avoient des lettres à rendre à l'évêque Anyfius, qui s'intéreffoit avec zèle pour la bonne caufe avec les autres évêques de Macédoine, comme il paroît par les lettres de S. Chryfoftome. Mais comme ils paffoient le long des côtes de la Grèce, pour aborder à Athènes, ils furent arrêtés par un tribun militaire, qui les mit entre les mains d'un centurion, les empêcha d'approcher de Theffalonique, & les fit embarquer dans deux vaiffeaux. Un grand vent de midi qui s'éleva, leur fit paffer en trois jours la mer Egée & les détroits de l'Hellefpont, fans manger. Le troifiéme jour, à la douziéme heure, c'eft-à-dire au commencement de la nuit, ils arrivérent à la vue de C. P. près la maison de campagne de Victor: ils y furent arrêtés par les gardes du port,

&

& ramenés en arriére, fans fçavoir par quel ordre; & on
les enferma dans une fortereffe maritime de Thrace, nom-
mée Athyra. On les y maltraita: on mit les Romains dans
une chambre; Cyriaque & les autres Grecs en plufieurs
différentes, fans leur laiffer même un valet pour les fervir.
On leur demanda les lettres dont ils étoient porteurs.
Mais ils répondirent: Comment pouvons-nous, étant députés,
nous difpenfer de rendre en main propre à l'empereur, les
lettres de l'empereur fon frere & des évêques? Ils perfiftérent
à refufer les lettres quoiqu'ils en fuffent preffés par le
notaire Patrice, & par quelques autres enfuite. Enfin il
vint un tribun nommé Valerien, natif de Cappadoce, qui
arracha les lettres à l'évêque Marien avec tant d'effort, qu'il
lui rompit le pouce. C'étoit les lettres de l'empereur toutes
cachetées, avec les autres lettres. Le lendemain des
gens en-
voyés par la cour ou par Atticus, car ils ne purent le fça-
voir, vinrent leur offrir trois mille pièces d'argent, & les
prier de communiquer avec Atticus, fans parler de l'affaire
de Jean. Ils demeurérent fermes, & fe contentérent de prier
Dieu que, puifqu'ils ne pouvoient rien faire pour la paix
du moins ils retournaffent fans péril à leurs églifes. Dieu le
leur fit connoître par diverfes révélations, entre autres à
Paul diacre de l'évêque Emilius, homme très-doux & très-
fage. Car étant dans le vaiffeau, il vit l'apôtre faint Paul,
qui lui difoit: Prenez-garde comment vous marchez
comme imprudent, mais comme fage; parce que les jours
font mauvais. Le même Valerien vint les tirer promptement
du château d'Athyra & les fit embarquer fur un vaiffeau
très-mauvais, avec vingt foldats de diverfes compagnies.
On difoit même qu'il avoit donné de l'argent au maître du
vaiffeau pour les faire périr. Après avoir fait plufieurs ftades
& étant près de faire naufrage, ils abordérent à Lampfaque,
où ayant changé de bâtiment, ils arrivérent le vingtiéme
jour à Otrante en Calabre; fans avoir pu apprendre où étoit
S. Jean Chryfoftome, ni ce qu'étoient devenus Cyriaque &
les autres évêques Orientaux qui étoient partis avec eux
comme députés.

non

AN. 405.

Eph. v. 15.

P. 34

XI.

D'abord le bruit courut que ces autres évêques avoient été jettés dans la mer : enfuite on fçut qu'ils avoient été ban- Evêques Orien nis en des pays barbares, où des efclaves publics les gardoient. Cyriaque d'Emefe fut envoyé à quatre-vingts milles

Tome IV.

C

taux maltraités.
Pall. p. 19
P.

AN. 405.

P. 198.

P. 200.

2. Cor. 11.15. 1. Cor. iv. 9.

au-delà d'Emefe, à Palmyre, fortereffe de Perfe. Eulyfius de Boftre en Arabie fut envoyé à trois journées plus avant, dans un château nommé Misphas près des Sarrafins. Pallade fut envoyé à Sienne, dans le voisinage des Blemmyens ou Ethiopiens: Demetrius dans l'Oafis, près de Mazique. Les foldats prétoriens qui conduifoient ces évêques, leur ôtérent l'argent qu'ils avoient pris pour la dépenfe de leur voyage, & le partagérent entre eux; & les ayant montés fur des ânes maigres, ils leur faifoient doubler les journées, arrivant fort tard, & partant avant le jour, enforte que leur estomac ne pouvoit garder le peu de nourriture qu'ils prenoient. Ils les attaquoient continuellement de paroles fales & infolentes; ils ôtérent à Pallade fon valet, & l'obligérent lui-même à jetter fon écritoire. Ils ne les laiffoient point approcher des églifes, & fe logeoient ou dans des hôtelleries pleines de femmes perdues, ou dans des fynagogues de Samaritains & de Juifs. Comme ils en étoient fatigués, un d'entre eux'dit: Pourquoi nous affligeonsnous de ces logemens ? Dépend-t-il de nous de les choifir, & d'éviter cette indécence? Ne voyez-vous pas que Dieu est glorifié en tout ceci? Combien de ces malheureuses femmes, qui avoient oublié Dieu, ou ne l'avoient jamais connu, ont été excitées à penser à lui & à le craindre? S. Paul, qui a fouffert tout cela, difoit : Nous fommes la bonne odeur de J. C. & nous fommes un spectacle aux anges & aux hommes.

Les évêques de la communion de Théophile, qui se trouvoient fur leur paffage, non contens de n'exercer envers eux aucune humanité faifoient des préfens aux foldats prétoriens, pour les chaffer au plus vite de leurs villes. Ceux qui en uférent ainsi, furent principalement l'évêque de Tarfe celui d'Antioche: celui d'Ancyre fur-tout, & celui de Pelufe. Ils aigriffoient leurs gardes par menaces & par préfens pour ne pas même permettre qu'ils fuffent chez les laïques qui P. 201. le defiroient. Au contraire, les évêques de la feconde Cappadoce témoignérent par leurs larmes la compaffion qu'ils avoient des exilés, particuliérement Théodore de Tyane Bofphore de Colonie, qui avoit quarante-huit ans d'épifco& Serapion d'Oftracine, qui en avoit quarante-cinq. Bofphore eft le même qui affifta au concile général de C, P. en 381, fi connu par l'amitié de S. Bafile. Serapion, l'un des plus fidèles difciples de S. Chryfoftome, & qu'il avoit ordonné évêque d'Heraclée en Thrace, fe cacha long-tems dans

P. 202.

Sup. liv. XVIII.

7. I.

Sup. L. xxx. 7. 21.

Chryf. epist. 13.

al. 14 ad Olymp.

Pall. p. 155.

pat,

AN. 405.

un monaftére de Goths; peut-être celui de Promotus à C. P.
Il fut chargé de mille calomnies, amené devant les juges,
fouetté & tourmenté, jufques à lui arracher les dents; & en-
fin banni dans fon pays, qui étoit l'Egypte. Un faint vieillard
nommé Hilaire, qui depuis dix-huit ans ne mangeoit point
de pain, fut relégué à l'extrémité du Pont après avoir été
battu non par ordre du juge, mais par le clergé. Brison,
frere de Pallade, quitta volontairement fon églife, se reti-
ra dans une petite terre qu'il avoit, & y labouroit de fes
propres mains, lorfque Pallade écrivoit le dialogue où il
décrit cette perfécution. Elpide, évêque de Laodicée en Sy-
rie, s'étoit enfermé dans une chambre haute avec Pappus,
s'occupant à la prière; & il y avoit trois ans qu'ils n'avoient
defcendu l'escalier de la maison. Heraclide, évêque d'Ephèse,
étoit depuis quatre ans prifonnier à Nicomédie, l'évêque
Silvain étoit à Troade, où il vivoit de la pêche d'autres P. 196.
étoient retirés en divers lieux: il y en avoit, dont on ne
fçavoit ce qu'ils étoient devenus. Quelques-uns communiqué-
rent avec Atticus, & furent transférés en des églifes de
Thrace.

Pour les prêtres, les uns avoient été envoyés en Arabie & Sup. xxx. 7. 38. en Palestine le confeffeur Tygrius en Mefopotamie. Philippe mourut peu après en exil dans le Pont. Théophile étoit en Paphlagonie. Jean fils d'Ethrius bâtit un monaftére à Céfarée. Comme on menoit Etienne en Arabie, les Ifaures l'arrachérent à fes gardes, & le laifférent en liberté fur le mont Taurus. Sallufte étoit en Crète : Philippe, moine & prêtre des écoles, en Campanie. Le diacre Sophronius afcète étoit en prifon en Thébaïde. Le diacre Paul, aide de l'économie étoit en Afrique : un autre Paul, diacre de l'Anastasie, à Jérufalem. Hellade prêtre du palais étoit retiré dans un petit héritage qu'il avoit en Bithynie. Plufieurs étoient cachés à C. P., d'autres s'étoient retirés en leur pays. Le moine Etienne, qui avoit porté les lettres à Rome, fut pris à C. P. battu pour ce fujet, & tenu dix mois en prifon. On lui propofa d'em- Pall. p. 197. braffer la communion d'Atticus ; & comme il le refufa lui déchira violemment les côtés & la poitrine : mais il en guérit, & dix mois après fut envoyé en exil à Pelufe. Un foldat de province, des compagnies qui fervoient près de l'empereur, ayant été dénoncé, comme amateur de S. Chry

on

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