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ment les prêtres, de ne leur point parler de leur vivant, & ne point affifter à leurs funérailles après leur mort. Que fi quelqu'un méprife cette églife à caufe de fa petiteffe & reçoit fes excommuniés, ne croyant pas devoir lui obéir à caufe de fa pauvreté, il doit fçavoir qu'il déchire l'églife, que J. C. veut qui foit une. Et celui-là, foit diacre, foit prêtre, foit évêque, nous le mettrons au rang d'Andronic, nous ne lui toucherons point dans la main, & nous ne mangerons point avec lui : tant s'en faut que nous communiquions aux faints myftéres; avec ceux qui voudront communiquer avec Andronic & Thoas.

AN. 411.

Epift. 573

Cet acte étoit accompagné d'une lettre adreffée à tous les évêques au nom de l'églife de Ptolemaïde, qui contenoit les caufes de l'excommunication & les crimes d'Andronic, & déclaroit d'abord qu'il ne devoit point être réputé ni nommé chrétien: mais que, comme maudit de Dieu, il devoit être chaffé de toutes les églifes avec toute fa famille. L'excommunication fut auffi lue dans l'affemblée du peuple de Ptolemaïde: mais auparavant Synefius fit un difcours où après avoir marqué la répugnance avec laquelle il est entré dans l'épiscopat, les peines qu'il y fouffre, & particuliérement les crimes d'Andronic, il exhorte fon peuple à choisir un autre évêque. L'affemblée fe récria à ces mots: & Synefius voyant qu'il ne les pouvoit perfuader d'agréer fa démission, remit la chofe à une autre fois. Dans ce difcours, il dit ces paroles remarquables, fur la diftinction des deux espèces de p. 198 gouvernemens, le fpirituel & le temporel.

J'ai voulu vous faire voir par expérience, que joindre la puiffance politique au facerdoce, c'eft filer ensemble deux matiéres incompatibles. L'antiquité a eu des prêtres eu des prêtres qui Idem epift. 125; étoient juges: les Egyptiens & les Hebreux ont été long-tems gouvernés par les prêtres. Mais à mon avis depuis que cette œuvre divine a été traitée humainement, Dieu a féparé ces genres de vies : il a déclaré l'un facré, l'autre politique: il a attaché les uns à la matiére, les autres à luimême : ils doivent s'appliquer aux affaires, & nous à la prière. Pourquoi voulez-vous joindre ce que Dieu a féparé, & nous impofer une charge qui ne nous convient pas? Avez-vous befoin de protection ? adreffez-vous à celui qui eft chargé de l'exécution des loix. Avez-vous befoin de Dieu ? allez à l'évêque. Le vrai facerdoce a pour but la contemplation,

AN. 411.

Epift. 72.

qui ne s'accorde point avec l'action & le mouvement des affaires. Et enfuite: Je ne condamne pas les évêques qui s'appliquent aux affaires; mais fçachant que je puis à peine fuffire pour l'un des deux, j'admire ceux qui peuvent l'un

& l'autre.

Andronic, effrayé de l'excommunication portée contre lui; témoigna de la foumiffion, & promit de fe convertir. Tout le monde pria Synefius de le recevoir : lui feul n'en étoit point d'avis, perfuadé que ce n'étoit qu'hypocrifie. Il s'attendoit bien & il prédifoit, qu'à la premiére occafion il reviendroit à fon naturel. Toutefois il céda à l'avis du plus grand nombre & des évêques plus expérimentés: car il étoit encore dans la premiére année de fon ordination. Il différa donc d'envoyer aux évêques la lettre qu'il avoit écrite contre lui; & le reçut à condition qu'il traiteroit plus humainement fes femblables, & fe gouverneroit par raison. Il ne manqua pas de commettre de plus grands excès que devant, & d'ajouter de nouvelles caufes à fon excommunication qui n'étoit que fufpendue; & Synefius en avertit les évêques pour lui interdire l'entrée de l'églife. Toutefois Andronic étant enfuite tombé en difgrace & maltraité à fon tour: Ep. 39. Synefius fuivit, comme il dit, l'efprit de l'églife, de relever ceux qui font abattus, & d'abattre ceux qui s'élèvent. Il intercéda donc pour lui, jufques à fatiguer ceux qui avoient l'autorité. Il le délivra du tribunal funefte où il avoit été condamné, adoucit fa difgrace en tout le reste & le recommanda même à l'évêque Théophile; ce qui doit être arrivé peu de tems après fon excommunication.

AN. 412.
XLVI.

drie.

7.36.

Car Théophile évêque d'Alexandrie tomba en léthargie Mort de Théo. & mourut le quinziéme d'Octobre, fous le neuviéme conphile. S. Cyrille fulat d'Honorius, & le cinquiéme de Théodofe : c'eft-à-dire évêque d'Alexan- l'an 412, après avoir tenu ce fiége pendant vingt-fept ans, Socr.v11. c. 7. depuis l'an 385. On dit qu'en mourant il difoit: Que tu Sup. liv. XVIII. es heureux, abbé Arfène, d'avoir eu toujours cette heure devant les yeux ! Il laiffa plufieurs écrits: fçavoir un grand volume contre Origène, où il reprenoit prefque tous fes difcours, & fa perfonne même ; fautenant qu'il avoit déja été condamné par les anciens. Il écrivit auffi contre les Antropomorphites un fort long traité, où il prouvoit par les faintes écritures que Dieu et incorporel. Outre fes lettres pafchales qu'il envoyoit tous les ans, nous avons de lui quef

Vita P P. de com

punét. lib. 111. n.

5. p. 565.

Gennad. ferist. 33.
Sup. xx. 50.

Synef. ep. 9 ap.

Balfam. & n.
Caf Col. x. c. 2.

Conc.p. 1797.

2.

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AN. 412.

can. 6,

ques lettres canoniques. Premiérement une ordonnance tou-
chant la veille de l'Epiphanie, qui tomboit le dimanche. En
cette fête les Egyptiens célébroient tous ensemble le baptême.
& la nativité de J. C. & en jeûnoient la veille: mais com-
me il n'eft pas permis de jeûner le dimanche, Théophile
ordonne qu'en ce cas on prenne quelques dattes, fans chan-
ger l'heure de l'office, qui ne fe fera que le foir & depuis
none. Dans un mémoire adreffé à Ammon pour la province de can. 1.
Lyco, il ordonne que l'on dépofe ceux qui ont communiqué
avec les évêques: que les ordinations fe faffent par l'évêque, du
confentement & avec l'approbation de tout le clergé, au
milieu de l'églife, en préfence du peuple, & que l'évêque.
demande tout haut, fi le peuple peut auffi rendre témoigna-
ge à l'ordinand: mais que l'on ne faffe point d'ordination en
cachette, puifque l'églife eft en paix, c'eft-à-dire en liberté,
fous les princes chrétiens. Ce qui refte des offrandes, outre can. 7.
ce qu'on a confumé pour les faints myftéres, doit être par-
tagé entre les clercs; & les catéchumènes n'en doivent ni
boire ni manger, mais feulement les clercs, & les fidèles
qui vivent avec eux. C'eft que l'on offroit abondamment
du pain & du vin pour le faint facrifice. Les autres canons
de Théophile regardent pour la plupart des affaires particu
liéres. Mais tous font voir la grande autorité de l'évêque
d'Alexandrie par toute l'Egypte, pour faire obferver les ca-
nons, ou en difpenfer en cas de néceffité; & pour approu-
ver ou corriger la conduite des évêques. Nonobftant la divi-
fion que produifit l'affaire de S. Jean Chryfoftome, Théo-
phile mourut dans la communion de l'églife univerfelle, &
particuliérement de l'églife Romaine : comme on voit par les
titres d'honneur que le pape S. Leon lui donne ; & fa doc-
trine a toujours été reconnue orthodoxe.

On élut à fa place Cyrille fon neveu, fils de fa fœur: mais ce ne fut pas fans difficulté. Car plufieurs vouloient élire l'archidiacre Timothée. Abondantius qui commandoit les troupes étoit pour lui, & le peuple en vint jusques à la fédition. Cyrille l'emporta, & fut intronifé trois jours après la mort de Théophile. La victoire fur le parti oppose lui donna plus d'autorité que n'en avoit eu Théophile même; & depuis ce tems, les évêques d'Alexandrie pafférent un peu les bornes de la puiffance fpirituelle, pour entrer en part du gouvernement temporel. Cyrille commença par fermer

Ep. 94.95. al. 64.

65.

Socr. VII. c. 7.

& ibi. Valef.

AN. 412.
XLVII.

S. Auguftin inter

cède pour les Donatiftes.

Aug. ep. 139. al. 158. ad Marcel.

n. 1.

les églifes des Novatiens, & leur ôter tous leurs trésors. Quoiqu'un grand nombre de Donatiftes fe convertît après la conférence, quelques-uns demeurérent opiniâtres, jufques à déclarer qu'ils ne changeroient pas de parti, quand même on leur feroit voir la vérité de la doctrine catholique & la fauffeté de la leur. Il y eut à Hippone même de leurs Circoncellions & de leurs clercs, qui s'étant mis en embuscaEpift. 134. n. 2. de, tuérent un prêtre catholique nommé Reftitut, & enlevérent de fa maifon un autre nommé Innocent, à qui ils arrachérent un œil, & lui rompirent un doigt à coups de pierre. Ils furent pris par les officiers publics, & menés au comte Marcellin, qui leur fit donner la queftion; non fur le chevalet à l'ordinaire, avec les ongles de fer & le feu, mais feulement avec des verges : & ils confefférent leur crime.

ad. Apr.

Epift. 133.al. 159:

Saint Auguftin, craignant qu'on ne les punît fuivant la rigueur des loix, écrivit au comte Marcellin, pour le conjurer de ne les pas traiter comme ils avoient traité les catholiques. Nous pourrions, dit-il, diffimuler leur mort, puifque nous ne les avons ni accufés, ni préfentés devant vous; mais nous ferions fâchés que les fouffrances des ferviteurs de Dieu fuffent vengées par la loi du talion. Non que nous voulions empêcher que l'on ôte aux méchans la liberté de mal faire: mais nous defirons que, fans leur ôter la vie, ni les mutiler, on les faffe paffer de leur inquiétude insensée à une tranquillité raifonnable, ou de leurs actions criminelles à quelque travail utile. C'eft-à-dire, qu'il demandoit qu'on les retînt en prifon, ou qu'on les occupât à quelque ouvran. 2. ge public. S. Auguftin marque dans cette lettre

Ep. 134. al. 160.

2.2.

, que les évêques mêmes fe fervoient fouvent dans leur jugement du châtiment des verges, comme les maîtres pour leurs écoliers & les peres pour leurs enfans.

Il écrivit auffi au proconful Apringius, qui devoit juger ces criminels, & qui étoit frere de Marcellin & chrétien comme lui. S. Auguftin lui fait la même priére, & dit : Si j'avois affaire à un juge qui ne fût pas chrétien, je ne lui parlerois pas ainfi; mais je n'abandonnerois pas pour cela la caufe de l'églife, & s'il vouloit bien m'écouter, je lui repréfenterois que les fouffrances des catholiques doivent être des exemples de patience, qu'il ne faut pas ternir par le fang de leurs ennemis : & s'il ne fe rendoit pas à mes inftances, je le foupçonnerois de n'y réfifter qu'en haine de la

religion. Et enfuite: On a fait enforte que les ennemis de l'églife qui s'efforcent de féduire les ignorans par la prétendue perfécution dont ils fe vantent, ont eux-mêmes confeffé les crimes horribles qu'ils ont commis contre des clercs catholiques. On ferá lire les actes pour guérir ceux qu'ils ont féduits. Voulez-vous que nous n'ofions faire lire ces actes jufques au bout, s'ils contiennent l'exécution fanglante de ces malheureux; & que l'on foupçonne ceux qui ont fouffert, d'avoir voulu rendre le mal pour le mal?

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Comme Marcellin tardoit d'envoyer à S. Auguftin les ac- Epist. 139. al. 158; tes de ce procès, qu'il lui avoit promis, il lui écrivit pour l'en preffer car il les vouloit faire lire dans l'églife d'Hippone, & s'il fe pouvoit, dans toutes celles de la province; pour faire voir à tout le monde que les Donatiftes, qui s'étoient féparés fous prétexte de ne point participer aux prétendus crimes de quelques catholiques, confervoient parmi eux une grande multitude de fcélérats convaincus juridiquement. Il prie encore Marcellin de conferver la vie à ceux-ci, & à d'autres qui continuoient leurs violences, en fe faisant ouvrir par force des églifes. Si le proconful, ajoute-t-il, perfifte à les vouloir punir de mort, du moins faites inférer dans les actes les lettres que je vous ai écrites à l'un & à l'autre fur ce fujet. S'il ne le veut pas, du moins qu'il garde les coupables en prison; & nous aurons foin d'obtenir de la clémence des empereurs, que les fouffrances des ferviteurs de Dieu ne foient pas déshonorées par le fang de leurs ennemis. Je fçais que l'empereur a facilement accordé la grace aux Sup. xx. n, 22; païens qui avoient tué les clercs d'Anaune, que l'on honore maintenant comme martyrs.

A la fin de cette lettre il marque ainfi la multitude de fes occupations: Si je pouvois vous rendre compte de mon tems, & des ouvrages auxquels j'ai été obligé de travailler, vous feriez furpris & fenfiblement affligé de la quantité d'affaires qui m'accablent, fans que je puiffe les remettre & qui ne me permettent pas de travailler à ce que vous me demandez instamment, que je fouhaite, & qui m'afflige plus que je ne puis dire, de ne le pouvoir exécuter. Car quand j'ai quelque peu de relâche, de la part de ceux qui ont tous les jours recours à moi pour leurs affaires, & qui me preffent de telle forte, que je ne puis les éviter, ni ne dois les mépriser; je ne manque pas d'autres écrits à composer, qui

XLVIII Occupations de S. Auguftin

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