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que nous la pouvons defirer par un amour très-pur, très-defintereffé & très-gratuit.

Ad

Eph.

c. 6. 17.

5. Non feulement Dieu veut que les hommes tendent à la vie éternelle comme à leur fin, & qu'ils y afpirent par leurs defirs, mais mais il veut qu'ils faffent de ces defirs un moyen d'y parvenir. Car faint Paul nous reprefente l'efperance de la beatitude comme un cafque dont les Chrétiens doivent être armés pour réfifter aux démons. Prenez, dit-il, le cafque du Salut, c'est-à-dire, de l'efperance du Salut; comme il s'explique lui-même 1. ad dans l'Epître aux Theffaloniciens. Et Theff. dans l'Epître aux Hebreux il attribuë c. 5. &< à ce defir la victoire des Prophetes & des Patriarches fur les Rois du monde, Per fidem vicerunt regna. Car cette foi dont il parle en ce lieu, n'est Hebr. pas la foi des myfteres, mais la foi 11. 33 des promeffes de Dieu, & l'efperance de les obtenir, qui leur faifoit regarder & faluer de loin la patrie celefte qu'ils defiroient.

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Ainfi vouloir éteindre ce defir de la beatitude dans les Chrétiens c'eft les vouloir defarmer, c'eft leur vouloir ôter les fecours par lefquels tous

C.

Ad

les Saints font demeurés victorieux
& prétendre les faire marcher par des
routes inconnuës & toutes contraires
à celles que l'Apôtre nous a enfei
gnées.

feroit

6. Mais quand l'efperance ne nous pas neceffaire pour nous défen. dre contre nos ennemis invifibles, elle nous eft neceffaire pour elle-même auffi-bien que la foi. Car comme on ne peut point être fauvé fans foi, on ne le peut être auffi fans efperance. Elle fait partie de notre régénération; ce qui fait dire à l'Apôtre S. Pierre 2. Pet. que Dien nous a régénerez en une efpec. 1. v.rance vive: REGENERAVIT nos in fpem

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Auffi, bien loin de détourner les fidéles de cette vûë comme trop intéreflée, il les exhorte au contraire Ibid. d'efperer parfaitement en cette grace 13. qui leur eft offerte, n'y ayant point. de plus grande ingratitude que de refufer les biens que Dieu nous 'veut' donner, & qui n'ont pour fin que de nous rendre parfaitement foumis à lui. Il veut même que ce defir foit fi vif & fi preffant, que quelque terrible que foit le dernier avenement de Jesus-Chrift, il nous le rende de

2. Pet.

firable, & nous le faffe prévenir par nos fouhaits & par nos prieres. Expectantes properantes in adventum c. 3. v. diei Domini per quem cali ardentes 12. folventur & elementa ardore tabefcent.

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Réponses aux raifons par lesquelles on prétendroit autoriser l'indifference pour fon falut.

J

Es verités que nous avons éta

Lblies ne peuvent gueres tire con

battues que par un raifonnement,
qu'il eft befoin d'éclaircir pour diffi-
per entierement ce qu'il y a de fpe-
cieux dans les faufles confequences
du defintereffement parfait, que nous
avons propofées au commencement
du chapitre troifiéme. Il eft certain,
dit-on,
que l'amour de Dieu ne
fçauroit être pur s'il ne fe termine
à Dieu, & s'il n'a uniquement la
gloire de Dieu & la volonté de
Dicu pour objet, & non
propre gloire & notre propre in-
terêt. Or la gloire de Dieu fe trouve
auffi-bien dans le fupplice des mé-

notre

chans que dans le falut des bons ; & fa volonté fe rencontre également dans l'une & dans l'autre de ces deux conduites fi differentes; puifque Dieu a de toute éternité refolu de punir les reprouvés auffi bien que de glo

rifier fes élus. Si fa mifericorde eft adorable dans le choix qu'il fait des élus pour la gloire, fa juftice ne l'eft pas moins dans le refus qu'il fait de fa gloire aux reprouvés. Il faut donc également adorer ces deux volontés, puifqu'elles font également faintes. Il en faut fouhaiter l'execution. Il s'y faut également foumettre. Et ce ne pourroit être que par une vûë d'amour propre que nous préfererions l'une à l'autre, & à l'égard des autres & à l'égard de nous-mêmes : ce qui enferme, difent-ils, cette indifference pour fon falut.

Pour éclaircir ce que cette objection peut avoir d'obfcur, il faut remarquer comme on a déja fait ailleurs, que l'on peut confiderer la volonté de Dieu en deux manieres; ou comme caufe de tous les évenemens du monde, rien n'arrivant que parce que Dieu le veut operer, ou le veut permettre; ou comme la regle de toutes chofes, c'est

à-dire comme la loi éternelle, que l'on appelle fa volonté fignifiée, quand il nous la fait connoître, foit en la gravant dans notre cœur, foit en nous la faifant declarer par ceux qui nous parlent de fa part. Or c'eft proprement à la volonté de Dieu confiderée comme juftice & comme loi éternelle que nous devons conformer nos defirs & nos volontez; car nous ne devons même nous foumettre à fa volonté qui caufe les évenemens,que parce que la justice éternelle nous le commande. C'eft dans cette juftice éternelle que nous apprenons ce que nous devons vouloir à l'égard de toutes chofes. C'eft felon elle que nous ferons jugez. C'est par la conformité à cette juftice que nos actions font juftes, & par la contrarieté à cette juftice qu'elles font injuftes.

Il faut donc fuivre dans le defir de labeatitude ce qu'elle nous en prefcrit. Or nous avons déja fait voir qu'elle nous prefcrit de tendre à aimer Dieu d'un amour parfait & fans aucun partage des puiffances de notre ame;qu'elle veut que nous defirions de l'aimer de toute l'ardeur dont notre nature eft Capabledans l'ordre où Dieu l'a éta

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