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ligion ou le fervice de l'État, on ne devroit point apprendre l'Anglois. Il eft toujours prudent d'éviter un chemin qui peut conduire à un précipice. Au refte, pour cette langue comme pour l'Italienne & l'Espagnole, on auroit befoin de maîtres: c'eft pourquoi il faut premierement examiner fi l'on a le loifir & les autres commodités néceffaires pour les étudier, fans cela on doit les regarder comme un acceffoire, dont la privation ne fait point ou prefque point de tort au principal.

Quoique les jeunes perfonnes du fexe joignent fouvent une grande pénétration à beaucoup de jufteffe d'efprit, je n'eftimerois pas néceffaire de les engager dans l'étude de toutes les langues dont je viens de parler; mais je croirois au moins indifpenfable de les former de bonne heure. à parler purement, & à écrire correctcment notre langue. Il n'eft gueres de Cou

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très-grand mérite,capables de prendre les principes du beau langage, & de les enfeigner aux jeunes Demoifelles confiées à leurs foins. La chofe eft encore plus praticable dans la maison paternelle : il en eft peu, fur-tout à Paris, où il ne fréquente des gens de lettres qui fe feroient honneur de contribuer foit par des leçons réglées, foit par des converfations fouvent plus utiles que les leçons ; de contribuer, dis-je, à la culture de ces efprits. On ne néglige communément ni les graces du corps, ni les talens extérieurs; les dépenses pour des leçons de danfe ou de mufique vont quelquefois jufqu'à la prodigalité : cependant à un certain âge on fait peu d'ufage de ces talens, & l'on ne fait pas celui de bien parler & de bien écrire eft de tous les mo

attention que

mens & de toutes les heures de la vie; fans ce double fecours l'efprit le plus brillant perd la moitié de fes avantages,

que

& que ceux même qui en admirent le fonds, ne peuvent s'empêcher de regretter le défaut d'études & de principes. C'eft pourquoi dans la jeuneffe de leurs enfans, & fur-tout des Demoifelles, les parens devroient être extrêmement attentifs dans le choix des gouvernantes, emploi qu'on ne confie que trop fouvent à des perfonnes qui parlent un jargon farci d'expreffions irréguliéres & de prononciations vicieuses, que leurs éleves contractent par imitation, & qu'il eft impoffi ble de corriger ou de déraciner dans un âge plus avancé. L'abrégé de M. Reftaud fuffiroit pour les enfans plus jeunes; on y pourroit joindre enfuite fes Principes généraux & raisonnés, pour leur faire comprendre d'une maniére plus développée les règles dont ils connoîtroient déja les premiers élémens. La forme de dialogues qu'il a donnée à cet ouvrage, en faciliteroit l'étude aux éleves & l'exé

Rhétorique.

cution aux maîtreffes; & parce que ce livre contient ce qu'il y a de plus effentiel dans les autres Grammaires, on pourroit s'y borner pour les jeunes Demoifelles, dont tout le tems n'eft point occupé à l'étude comme celui des garçons. L'expérience qu'on en a faite dans des Maifons Religieufes, a fuffifamment démontré l'excellence de cette méthode.

La Rhétorique doit fuivre la Grammaire : j'entens ici par Rhétorique, non ces Traités ordinaires écrits fans choix & fans goût, qui ne parlent que de tropes, de figures, de périodes, de lieux communs, dans lefquels en apprenant à faire des amplifications fur toutes fortes de fujets, on ne parvient qu'à penfer confusément, & à parler fans justesse, mais les regles prifes dans la nature, & formées fur la pratique des excellens Orateurs. Telle eft l'idée que se font faite de la vraie, de la belle éloquence

les

R

les grands Auteurs qui en ont traité ; parmi les Anciens, Ariftote, Denis d'Halicarnaffe, Quintilien, &c. parmi les Modernes, M. Rollin. Il feroit à fouhaiter qu'on pût en puifer les principes dans les originaux & dans les fources mêmes, je veux dire dans leurs écrits; mais comme cette lecture demanderoit un tems confidérable; & d'ailleurs un difcernement exquis, je penfe qu'il eft plus à propos d'indiquer ici les ouvrages qu'il faudroit confulter par préférence. Les Dialogues de M. de Fenelon fur l'éloquence, & fa Lettre à l'Académie Françoise méritent d'être lus & médités : il y regne un goût formé d'après l'antique, & qui n'en eft pas plus mauvais pour cela. Si l'on y joignoit l'ouvrage de Cicéron, qui a pour titre l'Orateur, qui dépouillant les regles de leur fechereffe ordinaire, donne tout à-la-fois le précepte & l'exemple; le Traité du Sublime de Longin, le frag

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