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Mathématiques. 1

métaux. Celle-ci renverfant d'abord le jugement, puis ruinant la fortune, & celle-là faifant quelquefois du même homme un compofé monftrueux de fuperftition & d'impiété. Au refte les ouvrages fur ces deux matieres font fi ridiculement écrits & enveloppés de tant d'obscurités , que la lecture d'un feul fuffira pour dégoûter de tous les autres. Il n'en eft pas de même des Mathématiques & de la Géométrie, qu'on regarde comme les fondemens de la nouvelle Phyfique, & qui font devenues les fciences à la mode. Leur certitude & leur utilité méritent bien que nous nous y arrêtions un peu, parce qu'elles font relatives à tous les objets que nous avons déja traités, & que, toutes chofes d'ailleurs égales, un efprit géométre faifira mieux qu'un autre le vrai goût de tous les beaux Arts.

Que l'on ne s'étonne point fi mon

des Mathé

style se fent un peu de la matiere que je De l'étude vais traiter. Il n'eft pas permis de s'écar- matiques. ter ici de la précision, & la précision eft prefque toujours compagne de la féche reffe. L'étude des Sciences en général, mais celle des Mathématiques en parti→ culier, fera toujours longue & pénible pour ceux qui étudieront fans méthode, ou qui feront mal conduits dans leurs études, & elle fera prefque infructueufe pour ceux qui s'y adonneront feulement par occafion, par air, par ennui, par caprice, & même pour ceux qui s'y li vreront par goût, s'ils n'ont aucun but déterminé.

On évitera le premier de ces inconvé niens, en se pourvoyant des meilleurs Auteurs, & en choififfant les meilleurs Maîtres qui ne font pas toujours les plus chers, comme on fe l'imagine dans le monde. Et pour ne pas donner dans le second, il feroit à propos de fe deman

doit fe propo

der à foi-même, en ouvrant un livre, en
appellant un Maître, en prenant la regle
& le compas, & Cui bono? quel eft mon
>> deffein ? que veux-je faire ?» Je ne fe
rai jamais étonné qu'un voyageur qui fe
met en route fans fçavoir pourquoi, qui
marche au hazard, qui ne fçait où il va,
avance peu, fe fatigue beaucoup, trou-
ve fa route ennuyeuse, l'abandonne par
dégoût, la reprenne par fantaisie, pour
la quitter encore & s'arrêter enfin tout
court. S'il avoit eû quelques vûes en par-
tant, s'il eût connu le terme de fon voya-
ge, à chaque pas il fe fût naturellemen:
apperçû de fes progrès, & il eût fenti for
à mẹfure qu'il eût

courage augmenter,
approché de fon but.

But que l'on Un galant homme qui n'est destiné ni fer dans l'étu- à être arpenteur, ni académicien, ni irthématiques génieur, & qui n'ouvre un cours de Ma

de des Ma

thématiques que pour prendre une teir cure de ces fciences, doit moins fe pro

pofer d'acquérir des connoiffances, que de cultiver fon efprit. C'eft donc principalement à la culture de l'efprit que je rapporterai tout ce que je dirai dans la fuite de l'étude des Mathématiques. Je ne perdrai jamais de vûe cet objet. Je pourrois y ramener l'étude même de la Catoptrique, de l'Architecture civile & de toute autre partie des Mathématiques, mais je m'arrêterai à celles qui entrent communément dans le nombre des connoiffances d'un homme inftruit, je veux dire, l'Arithmétique, l'Algébre & l'Analyse, la Géométrie, la Méchanique, l'Aftronomie & l'Architecture militaire. Si je parle quelquefois des autres, j'y ferai entraîné par le rapport qu'elles ont avec les précédentes.

De l'étude des Mathématiques en

C'est à la perception, au jugement, au raifonnement, à la démonftration & à la méthode que fe réduisent toutes les opé- général. rations de l'entendement humain. Con

Elle perfectionne la pre

cevoir l'énoncé d'une vérité ; fe convain cre de cette vérité par la démonstration; fe fervir de la vérité énoncée & de fa démonftration pour découvrir & démontrer d'autres vérités; voilà les principaux dégrés de nos connoiffances, Voyors maintenant comment l'étude des Mathématiques en général tend à perfectionner les opérations de notre efprit, & à élever les dégrés de nos connoiffances,

Les vices de la perception & du jumiere opéra-gement naiffent prefque toujours de la tion de l'ef- difette de termes convenables & de l'ob

prit.

fcurité de ceux qu'on employe. Qu'ont fait les Mathématiciens pour obvier à ces vices? ils ont multiplié le nombre des termes, felon les befoins qu'ils en ont eû; & ils ont apporté une fcrupuleufe exactitude à définir ceux dont ils fe fervent. Ils ont obfervé de n'y attacher qu'une idée fimple, ou qu'une certaine collection d'idées déterminée : l'ufage

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