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De tes regrets au moins que ma mort foit fuivie,
Qu'un trifte fouvenir de moi, de mes malheurs,
De mon trépas enfin t'arache quelques pleurs.
J'en ai tant répandu depuis le jour funeste
Que tu quittas cesLieux où malgré moi je refte;
Et tu ne les quittas peut-être alors, ces Lieux,
Que pour fuir unObjet qui t'étoit odieux.
Ah! cruelle penfée où mon cœur s'abandonne !
C'eft toi.... N'y fongeons plus. Le jufte Ciel
l'ordonne;

Subiffons fa rigueur, refpectons fes Decrets;
Et jufques dans mon fein étouffons mes regrets.
Non, tant de fermeté répugne à la nature,
Et la raifon en vain m'interdit le murmure.
Il eft
trop douloureux de voir finir fes jours
Quand une main fi chére en interromt leCours.
Dans quel aveuglement ton amour t'a jettée!
Eft-ce là le bonheur dont tu t'étois flattée ?
Après de fi grands maux il faut,loin d'en guérir,
Ceffer de vivre enfin pour ceffer de fouffrir.
Cet Amant que ton cœur te peignoit fi fidelle,
Qui te juroit lui-même une ardeur éternelle,
Avec qui tu devois joüir d'un fort si beau,
T'abandonne, ou plûtôt te réduit auTombeau.
Comment au fouvenir de tant d'ingratitude
Souffrir fans murmurer le tourment le plus
Brude?

Pourquoi t'avoir aimé, toi qui m'as pû trahir!

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AhCruel! ou pourquoi ne te puis-je hair!
Quai-je dit? Quel tranfport de mon amé
s'emparé !
Pardonne, cher Amánt, fi mon efprit s'égare;
Je verrois plus tranquille aprocher le trépas
Sije pouvois du moins mourir entre tes bras.
Loin de le regarder comme un affreux fuplice,
Je faurois de mes jours te faire un facrifice,
Et fans me plaindre alors ni de toi,ni des Dieux,
Je mourrois fatisfaite en mourant à tes yeux.
Plus pénétré que moi de mes propres allarmes,
A mon trifte Destin tu donnerois des larmes,
Je les verrois couler & beniffant mon fort....
Mais non, ton amour feul empêcheroit ma

mort.

Vains defirs! vain espoir dont mon ame frapée

S'est déja julqu'ici trop long-tems ocupée! Malheureuse! Pourquoi comter fur fon amour, Quand mes pleurs n'ont pas même obtena fon

retour?

Sans ceffer de l'aimer j'ai ceffé de lui plaire;
Et voilà ce qui rend ma perte neceffaire;
Je n'en acufe pas le Deftin en couroux

Je meurs, cruel Alcippe, & je meurs par tes

coups.

Cependant ne crains rien, mon cœur te le pardonne.

Mais que fens - je? Déja ma force m'abandonne....

Je ne puis.... Ah voici mon funefte moment! J'expire, cher Alcippe, & j'expire en t'ai

mant....

Pourquoi donc malgré moi vois-je encor la lumiere?

Ah! tout jufqu'à la Mort eft fourd à ma priere, Plus je l'implore & plus elle tarde à venir. Hélas! que je prévois un funefte avenir ! Dans mes égaremens reconnois ton ouvrage, De la raifon déja tu m'as ravi l'ufage:

Heureufe, fi l'excès de mes maux, malgré moi, Me faifoit perdre encor l'amour que j'ai pour

toi!

FAUSTINE.

ELEGIE IV.

UE fais-tu? Quoi toûjours, malheureufe Fauftine,

A foupirer en vain ton lâche coeur s'obstine!
Et loin de te venger des affronts qu'on t'a faits,
Tu te livres encor à de honteux regrets:
Ces plaintes, ces foupirs qui t'échapent sans
ceffe

Pourront-ils rapeller l'objet de ta tendresse ? Les pleurs contre un Ingrat font d'un foible fecours.

La plus promte vengeance est le plus für re

cours.

Tu les pairas bien cher ces pleurs qu'un cœur trop tendre,

Qu'un foible, un lâche, amour me force de répandre,*

Perfide! Au fonds d'un Cloître à l'abri de mes

coups,

Tu crois pouvoir brayer un trop juste cour

roux ;

Mais apréhende tout d'une Amante en furie;

Si

Si je prolonge encor une funefte vie,

Ce n'eft que pour venger un amour malheu

reux,

L'éteindre dans ton fang, nous en punir tous deux.

Tremble. Un coeur irrité ne fait pas fe con

traindre.

S'il n'efpére plus rien, il n'a plus rien à crain» dre.

J'ai perdu pour jamais ton coeur. Perfide
Amant!

Il faut que je l'immole à mon reffentiment.
Trop flatteur fouvenir de fon ardeur paffée
Ne viens plus apaiser une Amante offensée,
De fon crime plûtôt rapellons la noirceur :
Ne fongeons qu'à ce jour fi funeste à mon

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Il me dit qu'abjurant le vain éclat du Monde,
Honteux d'avoir fuivi fes folles volupteż,
I quittoit pour jamais toutes fes vanitez.
Traitre ! tu déguifois ton ame criminelle;
Indigne de brûler d'une flamme fi belle,
Un lâche repentir te détachant de moi,
Fourniffoit une excufe à ton manque de foi.
Je m'en plains! Hé! voit-on dans le fiécle où
nous fommes

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