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Ni conftance en amour, ni foi parmi les Hommes?

Que font-ils en cédant à de foibles attraits, Qu'expofer une Amante à d'éternels regrets? Leurs coups font toûjours fürs. Tendres, foumis, fidelles,

Tandis qu'à leurs defirs ils nous trouvent rebelles;

Parjures, dès qu'ils font maîtres de notre cœur Les cruels fans pitié nous arrachent le leur.

Que pouvois-je efpérer d'un Sexe fi perfide, Toûjours de notre honneur perfécuteur avide? Et devrois-je acufer un Amant malheureux Qui n'en fuit qu'à regret l'exemple dangereux? Que dis-je ? Le fait-il? Eft-ce à moi de mè plaindre ?

Il m'aima fi long-tems: Qui pouvoit l'y contraindre ?

Toute autre avoit pour lui des charmes im→ puiffans;

Et ce n'eft qu'à Dieu feul qu'il porte fon encens
Pourrois-je fouhaitter qu'il eut pouffé l'outrage
Jufqu'à men faire encor un facrilege Homage?
Et prétendrois-je enfin qu'une foible beauté
Eut plus d'attraits pour lui que la Divinité ?
Ne pouvant imiter une Vertų fi
pure,
Pourquoi l'acables-tu des traits de l'impofture?

Si jadis il reçut tes foupirs & tes vœux
Il fe les attira par les plus tendres feux:
Et c'est toi qui te plains de fon ingratitude!
Ah! mortel fouvenir du tourment le plus rude,
Puis-je outrager un cœur qui renonçant à moi
Ne viole en ce jour ses fermens ni fa foi ?

Il me quitte, il eft vrai. Mais pour un cœur fenfible

J'étois feule à la Grace un obftacle invincible; Hé!mon pouvoir fur lui peut-il mieux éclatter, Que lorfque pour me fuir il lui faut tout quitter?

Non, non. Son changement n'eft que trop légitime,

Et fa pérféverance auroit été fon crime; Quand Dieu parle, malheur à qui fourd à fa

voix

Le force de parler pour la derniere fois.

Pardonne, cher Amant, fi ma jaloufe rage A fait à ta Vertu le plus fenfible outrage: Je t'aimois trop hélas! pour la pouvoir fouffrir. Je la haïffois trop pour ne la point flétrir. De fa févérité mon ame couroucée,

Pouvoit-elle un moment en fouffrir la pensée ? Je voïois d'un autre œil ton loüable deffein. Alors il me plongeoit un poignard dans le sein,

Nouriffant à regret le feu qui me poffede,
J'en connoiffois le mal & craignois le remede
Et mon cœur défarmé fans avoir combatu,
Cherchoit à s'en venger jufques fur ta vertu.
Fougueufes paffions dont je fuis la victime,
Voulez-vous plus avant m'engager dans le
crime?

Hélas! Et contre qui voulez-vous m'animer?
Contre l'unique Objet qui me fût enflammer,
Dont encor malgré moi mon ame poffédée
Ne fauroit éloigner la dangereuse idée,
Ciel! fic'eft t'offenfer que de penfer à lui,

Contre lui contre moi deviens donc mon

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apui :

Arache de mon cœur un penchant fi funefte,
Eteins des feux impurs que déja je déteste.
J'ai befoin,ô mon Dieu! de toi pour les domter:
Sans ton fecours envain le voudrois-je tenter :
TaGrace dont l'attrait fait vaincre tout obfta-

cle,

Peut feule en ma faveur opérer ce miracle. Daigne rompre mes fers & je les quitterai. Daigne m'ouvrir les yeux & je te chercherai. Mais quel calme à l'instant se répand dans

mon ame!

Déja je fens l'effet d'une célefte flamme;

Acheve ton ouvrage, ô Grace de mon Dieu ! Et je dis à ce Monde un éternel adieu.

Pour toi, dont jufqu'ici la trop chere mémoire

Balançoit dans mon cœur une telle victoire, Tu viens de me donner un exemple trop beau, Pour ne t'imiter pas, Paulin, jufqu'au Tombeau.

Ne crains plus déformais que par la moindre atteinte

Je cherche à rallumer ton ardeur prefqu'éteinte,
Non, jamais mes regards ne te feront fentir
D'un jufte changement l'injufte repentir.
J'éviterai les tiens. Plus tu me fus fidelle
Plus je dois imiter ta Sainteté, ton Zélé;
Si même amour jadis enflamma notre cœur,
Même fort déformais fera notre bonheur.
Et telle qu'on a vu la pieufe Héloïfe,
Fidelle à fon Amant, mais à son Dieu foûmife,
Dans un Cloître prier & gémir nuit & jour
Je vais, en le pleurant, expier mon amour.

警察

D

ELISE.

ELEGIE V.

UNdevoir trop auftere esclave miférable, L'honneur l'amour, tout rend mon deftin déplorable!

Quel tourment! S'il ne doit finir qu'avec mes jours

Juftes Dieux!hâtez-vous d'en terminer le cours Faut-il toûjours qu'en proie au feu qui me poffede

J'y fuccombe, & je n'ofe y chercher du remede!

Que le cœur de regrets & d'amour confumé
Je paroiffe infenfible aux yeux qui l'ont

charmé.

Vain fantôme d'Honneur qui nous tient fi
fujettes,

Tes rigoureufes Loix font-elles fatisfaites?
Jufqu'ici j'ai fu taire un amour malheureux;
Et je n'ai fait qu'aigrir & qu'acroître mes feux:
Que le cœur quand il aime à peine à fe con-
traindre!

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