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LIVRE TROISIE'ME.

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Endant ces heureux fuccez Soliman arrivé à Bellegrade, fe mit en chemin nir en perfonne au fecours de Bude. Ses Generaux fe prefferent d'aller à fa rencontre; ils laifferent leur armée campée devant Bude, où leur prefence n'étoit plus neceffaire, pour avoir l'honneur d'informer eux-mêmes cet Empereur de la profperité de fes armes & rendre compte de leur conduite; ils furent reçûs avec de grands éloges; mais fur tout Mustafa Bacha, pour avoir réduit la Tranfilvanie fans avoir répandu de fang. Soliman arriva à deux lieues de Bude où il fit poser fon camp; on lui fenta huit cens prifonniers Hongrois enchaînez, parmi lesquels

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étoient plufieurs Officiers de marque. Soliman les condamna tous à la mort comme traîtres & rebelles, ayant été pris les armes à la main contre leur Roy. La Reine par fes prieres obtint grace pour les Officiers, le refte dans un moment fut maffacré par les Janiffaires, Maillat fut conduit à Conftantinople pour avoir pris le parti de Ferdinand contre fon ferment, & finit fes jours en prifon.

Après ces jugemens l'Empe reur Turc envoya au Roy trois beaux chevaux, dont les harnois en broderie d'or étoient relevez de perles & de pierreries. A la Reine des colliers & des braffe lets très-riches, avec plufieurs pieces de toiles fines de Babylo ne; au Régent & aux Grands Seigneurs de la Cour, des veftes magnifiques avec des chaînes d'or. Ces prefens furent diftri

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buez en prefence de la Reine, à laquelle l'Envoyé fit ce compliment de la part de Soliman : Que cet Empereur feroit ve» nu en perfonne lui rendre vifite, s'il ne lui étoit défendu par fa loi : que pour garder les bienfeances, Sa Hauteffe la prioit de ne point le venir voir dans fes tentes: qu'au refte ik " n'avoit pas moins de bienveillance & de refpect pour elle, que fi elle étoit fa propre fille : qu'il lui demandoit feulement » le plaifir de lui faire conduire » le Roy fon fils, defirant embraffer l'enfant du Roy Jean fon grand ami: qu'il vouloit le faire connoître aux deuxPrinces fes fils, qui l'accompagnoient; qu'elle ne devoit entrer en aucune défiance, l'affùrant qu'il » n'étoit venu que pour le maintenir dans fon Royaume, comme il avoit fait le Roy fon pere.

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- La Reine fut fort troublée à cette demande, elle ne pouvoit fe réfoudre à hazarder la vie ou la liberté de fon fils; mais le Régent lui reprefenta fortement : qu'elle ne devoit pas entrer " dans de tels foupçons; que So- s liman étoit religieux à fa paro- « le; que cette défiance l'offen- " feroit & feroit changer les fentimens favorables que ce Prin ce lui avoit marqué qu'enfin il s'obligeoit d'accompagner le Roy à la tête des Grands de la « Cour, d'avoir l'honneur de le « prefenter lui-même à Soliman, & fur fa vie de le lui ramener. Quelques Hiftoriens ont écrit que cet Empereur avoit voulu voir ce jeune Roy, pour s'éclaircir par lui-même d'un bruit qui s'étoit répandu, que c'étoit une fille & non un garçon, & que pour ce fujer cette Princeffe le eachoit avec tant de foin, & ne

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vouloit permettre de le voir qu'aux perfonnes de fa confidence. Mais il y a bien plus d'apparence que ce fut par politique que Soliman voulut le faire porter dans fa tente, comme un hommage que ce Prince devoit rendre à Sa Hauteffe: quoi qu'il en foit, la Reine fe rendit aux judicieuses remontrances du Regent; elle fit parer le Prince d'une maniere Royale, le fit conduire avec fa nourrice & quelques Dames du premier rang, dans un char doré, fuivi du Regent, du grand Chancelier, & de tous les Seigneurs qui avoient reçû des prefens du Sultan : de cortège en trouva un autre en chemin ; c'étoit un corps de Cavalerie & de Janiffaires de la garde, tous magnifiques, qui mirent le char du Roy au milieu de leurs bandes, & l'escorterent en pompe au fon des inftrumens, jufqu'aux fuper

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