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lui obéir comme de fidéles fujets; & au grand étonnement des Hongrois, il remit fur la tê te de Jean la Couronne Royale. Tous les Etats aplaudirent à la magnanimité de cet Empereur & s'écrierent tous vive le grand Soliman & nôtre bon Roy; acclamation qui ne fut pas moins agréable à l'un qu'à l'autre. Nous devons dire un mot de cette Couronne mysterieufe moins eftimée par fa matiere quoique d'or & enrichie de dia mans, que par la main dont les Hongrois tiennent de l'avoir reçûë. Leur tradition eft qu'elle fut apportée du Ciel par un Ange, au couronnement du Roy Staniflas, qui par fa fainteté a merité d'être mis dans le Catalogue des Saints, dont l'Eglife celebre la fête. C'est une opinion commune en Hongrie, que le Royaume venant à vaquer, celui qui fe

trouveroit faifi de cette Couronne, fut-il le dernier du peuple, feroit Roy légitime, & les peuples obligez de lui obéir; pour cette raifon, elle eft gardée dans la fortereffe de Vigrad, dont le Gouvernement n'eft confié qu'à un des plus grands Seigneurs. Peter Peren en cette qualité en avoit été pourvû, & felon fa charge il avoit porté cette Couronne à Albe-Royale pour le couronnement du Roy Jean, & enfuite par inconftance ou par interêt, à celui de Ferdinand. Mais au lieu de la remettre dans le lieu de fon dépôt, felon fon ferment, il l'avoit gardée entre fes mains. Cependant ne fe croyant pas en fûreté dans la haute Hongrie, où l'armée des Turcs devoit paffer; il fe mit en chemin avec fa famille, pour fe retirer dans la baffe, emportant ce qu'il avoit de plus précieux. Jean Saracéne

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Commandant de Cinq-Eglifes, informé de fa marche, alla l'enlever en chemin avec sa suite&fes effets,& les livra à Soliman. Cet Empereur avoit remis Peren à la difcrétion du Roy Jean, comme fon fujet;mais il avoit gardé cette Couronne au grand regret des Hongrois; cependant,contre leur efperance, il la remit fur la tête de celui qui devoit la porter ; ce qui ne lui attira pas moins d'admiration , que la reftitution du Royaume après l'avoir conquis.

Le Roy reçut en grace ceux qui l'avoient abandonné : il n'y eut que Paul Vardan Archevêque de Strigonie & Peter Peren exclus de l'amniftie, comme les plus traîtres & les plus ingrats. Soliman voulut bien s'intereffer en leur faveur & comme le Roy marquoit de la peine à fe rendre, connoiffant leur incon

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ftance, cet Empereur lui dit ces belles paroles, qui furent une prédiction veritable : Pouvez» vous faire rien de plus grand de rendre vos ennemis ingrats; s'ils fe rendent indignes du pardon, ils périront par leur ingratitude, & vous triompherez par vôtre clemence. Le Roy ne put resister à une fi puiffante follicitation, il tendit la main à l'Archevêque & à Peren, qui lui jurerent de nouveau une fidelité inviolable. Enfuite Soliman confirma à Jean l'inveftiture du Royaume par des Patentes écrites en lettres d'or; & pour une plus grande marque de bienveillance, il laiffa auprès de lui Louis Griti, dont nous aurons lieu de parler, pour être de fon Confeil, & trois mille Janiffaires pour la garde de fa perfonne; & cet Empereur partit comblé de gloire & s'en retour

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na à Conftantinople.

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Le Roy fe trouvant paifible, s'appliqua à rétablir fon autorité; il trouva tous les Ordres fi bien intentionnez, qu'il recon nut mieux que jamais les grands fervices que l'Abbé George lui avoit rendu & ceux qu'il étoit capable de lui rendre. Il l'appella avec empreflement auprès de fa perfonne, & pour marque de fon eftime & de fa gratitude, il le déclara Miniftre & lui donna la charge de Grand Tréforier, la premiere & la plus importante de la Couronne. George répondit dignement aux faveurs & à la bienveillance de fon Roy. Il mit la main aux affaires avec un ofdre & une prudence, qui donna aux Grands & aux peuples l'efperance d'un régne heureux & tranquille; mais tout changea de face dans un moment lieu de régler le Royaume, le

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