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la terre qu'il en étoit innocent, & que le fort déplorable de tant de peuple devoit être attribué à l'ambition aveugle de Charles & de Ferdinand d'Autriche.

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Le Royaume commençant à refpirer, le Miniftre reprit en main les affaires. Comme les finances font les nerfs & la force d'un Etat, & qu'elles regardoient directement fon emploi, fon premier foin fut de les rétablir. Quoiqu'il trouvât les coffres de la Couronne vuides & le public hors d'état de foûtenir de grands impôts par les malheurs & les ravages des guerres, cependant il régla les fubfides avec tant de difcretion, il prit des mefures fi juftes & fi défintereffées pour les faire lever, que l'on vit le Tréfor Royal bien entretenu & le peuple foulagé ; auffi, ce qui eft rare avec la confiance de fon Roy, il mérita l'a

mour des peuples; l'attachement qu'ils eurent pour fa perfonne, par la douceur de fon administration, fut dans la fuite un des grands motifs de l'envie quand elle l'attaqua. Heureux avantage & glorieux privilege, que de Miniftres ont merité dans un emploi pareil, sut tout pendant leur vie.

peu

Après avoir réglé les finances, il fit remplir les charges; comme il avoit un grand difcernement pour connoître le caractere & la portée des fujets, la brigue, la faveur, ni même les alliances, n'eurent jamais le pouvoir de le corrompre. Le merite feul l'emportoit chez lui, & on n'a pû lui reprocher d'avoir avancé perfonne par d'autre confidération que le service du Roy & le bien de l'Etat. C'eft ce qui lui attacha des amis folides & effectifs, & lui fit des ennemis

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parmi les Grands qui s'en croyoient méprisez, parce que fouvent il étoit obligé de leur préferer, dans les emplois & dans les graces, des fujets d'un moindre rang, mais d'une plus grande capacité.

Après ces fages difpofitions au dedans, il fongea à la fureté du Royaume pour le dehors; il fit entendre au Roy qu'il étoit de fa gloire d'entretenir un nombre de troupes bien difciplinées, commandées par des Officiers braves & fidéles, avec des appointemens bien payez à quoi il fut fi attentif, que le Roy qui fit la guerre à Ferdinand toute fa vie , remporta toûjours de grands avantages, fans aucune perte, qui ne fut aufi-tôt réparée. Ce qui juftifie bien que la gloire des Rois, & le bonheur des peuples font ordinairement des effets de l'experience & de

la probité des Ministres.

Il remontra auffi au Roy, la neceffité de mettre en bon état les places fortes, & d'en édifier de nouvelles dans les lieux expofez: fur tout combien il étoit important de fortifier la ville de Bude Capitale du Royaume, qui depuis la prife de Bellegrade étoit la tête & le cœur du Royaume. Il y fit employer un habile Ingenieur Italien,& lui-même s'appliqua à y faire travailler avec tant de foin & de diligence, que cette place fut en peu de temps, en état de faire une grande & longue resistance. Il femble que ce Miniftre eut prévû qu'il devoit un jour la défendre lui-même, contre un puissant ennemi.

Mais parmi fes falutaires confeils, toûjours fuivis de l'exccution, il n'oublia jamais les devoirs de fon état, & les obligations de fon caractere. Il prit

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d'autant plus à cœur les interêts de l'Eglife & de la Religion, qu'il la vit attaquéc en Allemagne, par l'herefie la plus dangereufe & la plus facile à infinuer, Aattant les hommes dans leurs plus vives paffions, & les déchargeant des Commandemens pénibles de Jefus-Chrift & de fon Eglife. C'eft fur tout ce qu'il prit à cœur de bien faire comprendre au Roy, pour le repos de fa confcience, & la tranquillité de fon Royaume. Il lui inf pira le même zéle qui avoit animé le Roy Mathias un de ses predeceffeurs, quarante ans auparavant; lorfque Jean Hus & Jerôme de Prague ayant femé leurs erreurs en Bohëme envoyerent de leurs plus fameux Prédicateurs, pour perfuader à ce Prince de recevoir leur doctrine. Mais ce fage Roy leur ayant donné audiance, fut fcandalifé &

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